( Le Patriote, 5 octobre 2013) – 30 novembre 2013. C’est le délai accordé aux agents enregistrés dans les effectifs des différents corps de l’Armée, de la gendarmerie et de la police nationale pour regagner leur poste. Ces officiers, sous-officiers et soldats du rang, sortis du pays à l’occasion de la crise postélectorale, sont sommés de rentrer en Côte d’Ivoire pour faire ce pour quoi ils sont payés par le contribuable ivoirien. On se le rappelle, dès les premières heures de la fin de la crise survenue après l’élection présidentielle, le chef de l’Etat s’était rendu au Ghana, au Togo, au Benin et au Liberia pour demander aux forces de défense et de sécurité proches de l’ex-chef d’Etat, Laurent Gbagbo, de revenir en Côte d’Ivoire. Des missions ministérielles, organisées en l’occurrence par les ministres de l’Intérieur et celui en charge de la Défense, avaient permis de faire revenir certains officiers comme le colonel Konan Boniface, Zohin Honoré, au pays. D’autres tels que le colonel Alphonse Gouanou et le commandant Jean-Noël Abéhi avaient décliné l’offre. Aujourd’hui, si l’ancien commandant de l’escadron blindé de la gendarmerie est en prison pour atteinte à la sûreté, l’ancien commandant adjoint du bataillon de Bondoukou, lui, et plusieurs centaines de militaires, paramilitaires, gendarmes et policiers proches de l’ancien régime sont toujours en exil.
Aux dernières nouvelles, le Ghana n’étant plus sûr, depuis l’arrivée du président John Dramani Mahama au pouvoir, ces officiers et sous-officiers en rupture de ban avec la hiérarchie militaire se sont dispersés dans d’autres pays à travers l’Afrique. Le capitaine Blé Kouassi, ancien aide de camp du général Mangou, qui était auparavant exilé au Ghana, a été arrêté le 15 juillet dernier à Niamey et extradé en Côte d’Ivoire. Parce qu’il était soupçonné de nouer des contacts dans ce pays dans le but de mener des actions subversives dans son pays. Quant à la plupart de ces exilés issus des rangs des ex-FDS se retrouvent, ils sont aujourd’hui, selon certaines sources, en Afrique centrale. Notamment au Congo-Brazzaville. Ce sont les militaires et paramilitaires dirigés par le colonel Gouanou Alphonse ainsi que ceux réunis autour de l’ancien commandant de la police maritime, le commandant Kouakou Brou dit « maréchal KB ». En plus de ces deux officiers, d’autres non moins connus sont concernés par la mesure du Gouvernement.
C’est justement en voulant rentrer en contact avec certains d’entre eux que l’ex-fesciste, Doumbia Major, également ancien porte-parole en Europe du sergent Ibrahim Coulibaly au plus fort de la rébellion, a été arrêté le 1er septembre dernier à Brazzaville par la Direction de la Surveillance territoriale. Puis expulsé en France, sa terre d’asile. L’ultimatum lancé par les autorités ivoiriennes ne concerne pas seulement cette catégorie de « corps habillés » sortis du pays à l’occasion de la crise postélectorale. Mais visent également d’abord ceux qui étaient revenus à leur poste après les appels incessants du Président de la République et qui sont ensuite ressortis. Ensuite les agents des forces de l’ordre qui continuent de boycotter à leur manière les nouvelles autorités. Cette dernière catégorie qui refuse de travailler sous les ordres de la nouvelle hiérarchie militaire et administrative use de subterfuges pour ne pas remplir ses devoirs. En complicité, parfois avec certains médecins-militaires, ils se sont abonnés aux congés-maladies à n’en point finir pour mieux être libres de leurs mouvements dans leur volonté inébranlable de comploter contre l’Etat de Côte d’Ivoire. Ces soldats passent la plupart de leur temps au Ghana ou dans leur circonscription d’origine et se pointent chaque fin du mois à la banque pour prendre leur solde et leur salaire. La décision prise par le Gouvernement le mardi dernier, conjointement signée par le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et la Sécurité, Hamed Bakayoko, et le ministre auprès du Président de la République, chargé de la Défense, Paul Koffi Koffi, vise à mettre un peu d’ordre dans les casernes et les commissariats de police. La même mesure de contrôle des effectifs s’effectue en ce moment à la Fonction publique où 5929 fonctionnaires, qui ne sont pas notés par leurs supérieurs hiérarchiques, encourent une menace de suspension de salaire.
La hiérarchie militaire en son temps avait tenté de lutter de mai à juillet 2011 contre l’absentéisme dans ses rangs en procédant au paiement main-à-main. L’opération avait non seulement permis de voir les militaires, gendarmes et policiers répondre présents à leur poste. Mais surtout obligés tous ceux qui étaient au Ghana et dans d’autres pays voisins de revenir travailler. En dépit de toutes ces opérations, nombreux sont ceux qui au sein de la Grande muette, de la Maréchaussée et de la Police nationale sont encore aux abonnés au absent. Après pratiquement deux ans et demi de sensibilisation, le Gouvernement a donc décidé de frapper fort. A partir du 30 novembre prochain, tous les officiers, sous-officiers et soldats du rang qui ne répondront pas à l’appel, seront considérés comme démissionnaires et déserteurs. « A l’issue de la dernière réunion du Conseil National de Sécurité (CNS) du 18 septembre 2013, le Président de la République lance un dernier appel pour le retour des exilés militaires et paramilitaires, à compter du 1er octobre jusqu’au 30 novembre 2013, délai de rigueur. Passé ce délai, la désertion sera constatée et les mesures réglementaires appliquées, notamment la radiation des effectifs des Forces Républicaines de Côte d’Ivoire, de la Gendarmerie nationale, de la Police nationale et des forces paramilitaires », rapporte le communiqué signé des mains des ministres Hamed Bakayoko et Paul Koffi Koffi. Les candidats à la désertion et autres tireurs au flanc sont donc avertis.
Jean-Claude Coulibaly