Passée l’euphorie qui a accompagné l’annonce du Chef de l’État de ne pas briquer un troisième mandat, il apparait nécessaire de comprendre que le projet de modification constitutionnelle comporte des incidences très fâcheuses sur l’avenir de notre pays. Fin mars, nous aurons une nouvelle constitution et un nouveau code électoral. Voilà pour ma part le véritable danger qui menace notre peuple.
Comme tous les Ivoiriens ont pu le constater, le dauphin constitutionnel du président de la République n’est désormais plus une personne élue mais une personne nommée. C’est la première fois dans l’histoire de la Côte d’Ivoire. En droit, le parallélisme des formes veut qu’une personne élue succède à une autre personne élue.
Mais si par exemple, le 31 Octobre, M. Amadou Gon est déclaré élu après un braquage électoral ; début Novembre il prête serment et il peut nommer légalement M. Ouattara comme vice-président. Et si quelques temps après son élection, le président de la République se trouve dans l’incapacité de continuer à exercer le pouvoir, le peuple se retrouvera à être dirigé par une personne qu’il n’a pas élue. Dans ce scenario, M. Ouattara redevient président de la République de Côte d’Ivoire légalement et termine donc le mandat du président démissionnaire et peut par la même occasion être candidat pour un premier mandat en 2025 et un second en 2030.
Ainsi donc, la propension de M. Ouattara à trafiquer la loi et à braquer les élections, conjugués à l’inertie de l’opposition empêtrée par des problématiques individuelles et personnelles, lui laissent la possibilité de s’offrir encore plusieurs mandats présidentiels.
Cette mise à l’écart du peuple est contradictoire avec tout esprit démocratique.
Plusieurs juristes de renommée mondiale ont perçu dans ce projet de modification constitutionnelle la volonté du Chef de l’État de maintenir l’hégémonie de son clan sur le pays et cela pendant plusieurs années en utilisant des artifices anti-démocratiques. L’opposition ivoirienne doit tirer toutes les conséquences de cette volonté en usant de tous les moyens légaux et démocratiques pour empêcher cette dictature rampante de s’installer. C’est à un sursaut national pour sauver notre pays et notre démocratie en péril que je nous appelle. Il est urgentissime d’exclure tous les petits calculs politiciens pour regarder à l’avenir de notre pays et celui de nos enfants. Parce que nous n’avons que la Côte d’Ivoire et qu’il est de notre devoir de nous battre pour la préserver.
C’est donc en connaissance de cause que nous devons, nous opposants, prendre nos responsabilités. Il nous faut nous surpasser, dépasser nos ambitions légitimes mais personnelles pour faire échouer cette entreprise funeste. À défaut d’empêcher la modification constitutionnelle en cours, nous devons user de tous les moyens démocratiques pour sortir le candidat de M. Ouattara dès le premier tour de la présidentielle de 2020.
Face aux dangers encourus par le pays, face au refus du pouvoir de respecter le peuple, face au manque de volonté de travailler à la réconciliation des Ivoiriens, nos ambitions et mêmes nos idéologies politiques respectives doivent passer en second plan c’est notre pays qui est menacé.
En France par exemple, toutes les fois que l’extrême droite s’est retrouvée au second tour de la présidentielle, les politiques ont su taire leurs divergences pour les empêcher d’accéder au pouvoir. La présidentielle de 2020 doit avoir pour unique objectif d’empêcher le clan de M. Ouattara de faire main basse sur le pays pour des décennies. Telle est notre responsabilité devant les Hommes et devant l’Histoire.
Stéphan Kipré,
Président de l’UNG