Le président de la CDVR a accordé une audience à la confrérie dozo le 14 mars dernier. Au cours de cette audience, Banny a nié ses propres propos tenus le 10 février et dans lesquels, il qualifiait ces chasseurs traditionnels de « confrèries tribales ».
Plusieurs fois épinglée par les organisations de droits de l’Homme, la confrérie dozo n’a cure des lamentations des populations victimes de leurs exactions. Le président de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation, Charles Konan Banny en cautionnant des dozos a attisé la colère des wê, victimes de ces chasseurs traditionnels. Les wê n’ont pas apprécié le double langage de Charles Konan Banny qui s’est dédit devant les dozos, récusant ses propos tenus le lundi 10 février dans une interview qu’il a accordée à l’agence France presse. Dans cette interview, le premier responsable de la réconciliation nationale a affirmé que « les dozos, dans une République ; ça n’existe pas ! Si chacun doit faire appel à ses confrèries tribales, où allons-nous ? » En passant la pommade aux dozos, l’ancien Premier ministre de Gbagbo donne un blanc-seing à toutes les tueries de cette confrèrie dans les zones CNO. Celui qui a pour rôle d’apaiser le cœur meurtri des Ivoiriens qui ont payé un lourd tribut à cette crise dans le Guemon et le Cavally ne doit pas avoir de parti pris et doit être par conséquent impartial. Or, disent les wê, Banny en dédouanant les dozos montre « de réels doutes sur sa capacité à faire face aux défis que lui impose sa responsabilité dans la conduite du processus ». La conduite du processus pour les victimes wê suppose la condamnation par la CDVR des flagrantes violations des droits de l’Homme commises par les chasseurs traditionnels plutôt que de les innocenter.
Banny en se comportant ainsi compromet la suite de sa mission qui consiste à rechercher la vérité sur les évènements survenus en Côte d’Ivoire depuis 2002. En déculpabilisant les auteurs des massacres massifs à l’ouest alors qu’ils ont été épinglés à plusieurs reprises par les organisations telles que l’ONU et Amnesty International. Que recherche Banny ? C’est la question qui court sur toutes les lèvres des wê, martyrs de cette rébellion. De l’attitude du président de la CDVR à la protection de criminels de guerre, il n’y a qu’un pas que les wê dans leur ensemble n’ont pas hésité à franchir. Charles Konan Banny n’a pas le droit de se moquer de la douleur des victimes pour protéger ses prébendes. Les faits sont encore frais dans les mémoires pour qu’on se permette de les tronquer. Les dozos sans être une force régalienne, sont aujourd’hui regroupés et organisés au sein d’une compagnie avec à leur tête un commandant. Ces chasseurs traditionnels qui ont abandonné leurs mousquets au profit d’armes de guerre sophistiquées représentent un os dans la gorge des autorités gouvernementales. Depuis plus d’une dizaine d’années, cette confrérie est au centre d’une controverse, principalement en raison de sa reconversion informelle dans le domaine de la sécurité des biens et des personnes, très souvent avec la caution des pouvoirs publics. La présence de ces chasseurs comme supplétifs de nos forces de l’ordre a été exacerbée pendant la crise politico-militaire qu’a traversée la Côte d’Ivoire. Au lendemain de la chute du pouvoir Gbagbo, les dozos se sont substitués à la police et à la gendarmerie dans plusieurs localités du pays. Un rapport a même présenté les conclusions d’enquêtes réalisées par la Division des Droits de l’Homme (DDH) de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) concernant les manquements des dozos relatifs aux droits de l’Homme entre mars 2009 et mai 2013. Parmi ces droits de l’Homme régulièrement violés, on peut citer pêle-mêle les atteintes au droit à la vie, à l’intégrité physique, à la liberté et à la sécurité de la personne et au droit de propriété. Les hommes de M. Dosso Sory (président de la fédération nationale des confréries Dozos de Côte d’Ivoire), Moussa Touré (président de la confrérie des Dozos en Côte d’Ivoire) à Abidjan, et Bamba Mamoudou (président de l’association des Dozos dénommée – Mandé Mory) ne sont donc pas à protéger, disent les Wê. Les victimes wê au vu de tous ces faits exigent purement et simplement la démission du président de la CDVR.
Roger Konan
Source: Révélation N°43 du jeudi 20 mars 2014