Quand Alassane Ouattara annonça, le 5 mars 2020 à Yamoussoukro, qu’il ne briguerait pas un 3e mandat, certaines personnes prirent d’assaut maquis et bars, le soir, pour fêter cela. D’autres comme Adama Bictogo comparèrent Ouattara à Nelson Mandela. Or tout le monde sait que le premier président noir de l’Afrique du Sud, en plus d’avoir toujours assumé ses actes, s’abstint de persécuter et de jeter en prison ses adversaires blancs.
D’autres encore félicitèrent le président reconnu par la communauté internationale pour cette “décision courageuse et salutaire” (Simone Ehivet Gbagbo), pour cet “acte fort” (Pascal Affi N’Guessan), etc.
Et pourtant, il y a une différence entre “annoncer” et “décider”. Si l’on se rappelle que M. Ouattara n’écoute et ne respecte que les Blancs, ce qui est révélateur d’un gros complexe d’infériorité de sa part, on peut légitimement penser que c’est Macron qui a décidé qu’il n’avait plus le droit de se représenter après ses deux frauduleux mandats. Ce qui le prouve, c’est la célérité avec laquelle le président français a réagi au discours de M. Ouattara (le même jour) et les mots qu’il a utilisés pour le faire (“décision historique”, “homme de parole et homme d’État”). Pour moi, Ouattara n’a fait qu’annoncer une décision prise par ceux qui l’ont installé dans le fauteuil présidentiel en avril 2011 et qu’ils devaient récompenser en retour en leur attribuant les plus gros marchés du pays. C’est la première remarque que je voulais faire.
Deuxièmement, l’annonce faite par Ouattara est un non-événement. Elle n’est ni historique ni extraordinaire. Car, avant lui, c’est-à-dire en 2011, 2017 et 2019, le président nigérien, Mahamadou Issoufou, avait fait part de son intention de respecter scrupuleusement la Constitution du Niger qui n’autorise pas plus de deux mandats (10 ans) à la tête du pays.
Accorder une grande importance à un non-événement, célébrer un individu qui a pris un pays en otage depuis 1999, ne pas percevoir qu’il “part’ pour se faire remplacer par une personne à travers laquelle il continuera à faire ce que bon lui semble dans et contre le pays, lui tresser des lauriers alors qu’il garde injustement en prison et en exil des milliers d’Ivoiriens, c’est à la fois faire montre de naïveté et donner raison au Tchèque Milan Kundera dont un roman s’appelle “L’insoutenable légèreté de l’être”. Et notre légèreté ne date pas d’aujourd’hui si l’on se souvient de deux faits : 1) Le PDCI répondant au FPI en 1990 que Ouattara est Ivoirien avant de lancer un mandat d’arrêt international contre lui en 1999 pour faux et usage de faux sur la nationalité ivoirienne ; 2) Le fameux “On voit le dos du nageur” des Refondateurs. Non seulement le nageur ne fut pas inquiété mais c’est lui qui, une fois sorti de l’eau, frappa mortellement la personne qui avait vu son dos.
Légèreté et naïveté : Si nous n’avions pas été nourris à ces deux mamelles, nous aurions compris que, en démocratie, le pouvoir n’est pas transféré par un criminel à un autre criminel mais qu’il est délégué pendant un temps limité (4, 5 ou 7 ans) par le peuple à celui ou à celle dont le projet de société a été le plus convaincant lors de la campagne électorale. Ce peuple, s’il est digne et sérieux, n’applaudit pas le criminel qui part avec les poches pleines mais trouve les voies et moyens de lui faire payer, tôt ou tard, ses crimes et forfaits.
Jean-Claude DJEREKE