Le Professeur émérite F. WODIÉ, par probité intellectuelle, a pris soin de préciser ” Ecrivant les lignes qui suivent, c’est moins la raison que le cœur qui parle ! Et, moi, mon cœur saigne “.
Dès lors, il pouvait livrer son sentiment personnel, exprimer son incrédulité et son émotion, sans que cette subjectivité ne puisse lui être reprochée, quant à la recherche d’une opinion objective sur le dossier qui motive, sa prise de position publique (oublions son relatif devoir de réserve, en tant qu’ancien Président du Conseil Constitutionnel et la sélectivité de l’objet du propos: personne, époque.).
Cela a suffi à enflammer la toile et les médias, parce qu’elle exprimait les souhaits des uns et des autres, pour des raisons toutefois différentes. Le jugement d’autorité était trouvé, au regard de sa qualité. Donc, il pouvait être exploité diversement…
En effet, l’obligation d’impartialité et d’objectivité, aurait voulu que cette opinion, soit donnée après avoir énoncé des éléments précis, susceptibles de mettre en cause la décision de justice prétextée (violation du Droit, iniquité du Procès, atteinte aux droits de la défense ), et l’appareil judiciaire à qui est imputé la charge de conduire avec diligence, indépendance et compétence les procédures. En particulier celles relatives aux personnalités politiques. Or, il n’en est rien dans ses propos (dysfonctionnement grave dans l’administration de la justice). Il ne pouvait ni remettre en cause le Droit, notamment le Code Pénal (intime conviction des jurés dans les procès d’assises), ni la grande famille judiciaire à laquelle il appartient désormais.
Le Président de la République n’a pas pouvoir constitutionnel d’interférer dans le domaine du Pouvoir Judiciaire (séparation des pouvoirs) pour être comptable des décisions rendues par celui-ci. Il ne dispose que du pouvoir de grâce. In fine, c’est celui-ci que son propos vise au principal, en parlant de rassemblement et de réconciliation. Cependant, sa comparaison au passé pointe une constante qui peut inquiéter. Faudrait-il alors qu’il en dise plus, pour aider à redresser la situation, car la grâce présidentielle ne règle pas la question. Il existe une demande forte de justice de la part des justiciables ordinaires, et la Loi ne saurait distinguer deux catégories de citoyens (les forts, les puissants, les politiques et les autres les faibles, les anonymes), sans rompre le principe rigoureux et inflexible de l’égalité devant la Loi.
CONCLUSION :
La réconciliation et le rassemblement, oui. Mais attention à la façon dont on veut les faire. Sinon nous nous exposons à laisser se poursuivre dans notre société, certaines tares qu’il faut corriger (criminalité politique, atteinte à l’indépendance des juges, insuffisances de l’appareil judiciaire en ressources, non respect du Droit en fonction de nos affinités politiques et de nos relations personnelles). Lorsqu’on n’est pas d’accord avec une décision de justice, on use des voies légales de recours, plutôt que de jeter l’opprobre sur les institutions de la République. Par ailleurs, nous avons l’obligation citoyenne de la respecter, quelle que soit notre opinion personnelle. C’est un principe républicain qui participe de l’autorité de la Justice et de l’État. Corrigeons la, en dénonçant de manière motivée et constructive ses faiblesses, mais ne la bafouons pas. C’est une attitude contre-productive et dangereuse.