Au moment de reprendre son fauteuil de président du FPI, Pascal Affi Nguessan a donné son point de vue sur l’évolution de notre pays. Il a notamment dit qu’il ne reconnaissait plus la Côte d’Ivoire. Il faut dire qu’Affi venait de passer quelques deux ans en détention dans le nord de la Côte d’Ivoire. L’image qu’il avait de la Côte d’Ivoire était celle qu’il avait lorsqu’on l’appréhendait à la fin de notre crise électorale. Et nous ne pouvons que comprendre Affi N’guessan et lui donner raison lorsqu’il dit qu’il ne reconnait plus son pays après deux ans. Quelle Côte d’Ivoire avait-il laissée avant son incarcération ? Une Côte d’Ivoire où chacun cherchait à découper son voisin, où la vie humaine n’avait aucune valeur, où les ordures s’étalaient partout, où toutes les rues étaient impraticables, où le carrefour de l’Indénié était inondé à moindre ondée, où la lagune Ebrié était en train de pourrir dans l’indifférence totale des autorités. Prenons le Plateau, le quartier des affaires de notre capitale économique. En plein centre de ce quartier que l’on voulait de luxe, des jeunes désœuvrés avaient créé ce qu’ils appelaient la Sorbonne qui n’était rien d’autre qu’une école de la haine, du vice et de tous les trafics. On y trouvait des personnes qui venaient inciter les Ivoiriens à se détester les uns les autres, et surtout à détester tous ceux qui étaient considérés comme des étrangers. On y trouvait aussi des vendeurs de médicaments qui envoyaient plus sûrement leurs consommateurs à la morgue que des poisons, des films pornographiques étalés aux yeux de tout le monde, et surtout des mineurs, des CD piratés. Lorsque cet endroit a été fermé, on a même trouvé des corps enfouis dans le sol. Il est normal qu’Affi ne se retrouve plus lorsqu’il se rend au Plateau.
Il ne peut pas non plus reconnaître Abidjan puisque lorsqu’il partait pour le nord, il n’y avait pas ces échangeurs sur le boulevard Giscard d’Estaing et à la Riviera 2, et il n’y avait pas ce pont qui s’avance majestueusement sur la lagune. Lorsqu’ils étaient au pouvoir, ils avaient abandonné la construction de ce troisième pont pour nous en proposer un quatrième qui devait voir le jour avant le troisième. Souvenez-vous. Laurent Gbagbo nous avait présenté la maquette de que lui-même avait appelé le quatrième pont, qui devait relier l’île Boulay à Yopougon, qui devait porter son nom, et qui est resté à l’état virtuel. C’est après avoir présenté la maquette de ce quatrième pont qu’il a donné des instructions pour que l’on cherche les moyens de construire le troisième. Plus tard, il a déclaré qu’il n’en voyait plus l’utilité de ce pont. Ce fameux troisième pont est en construction. Normal qu’Affi ne se retrouve plus dans Abidjan. Tout comme il ne saurait reconnaître l’université de Cocody, puisqu’en leur temps, elle était le repère des bandits de grands chemins que l’on appelait les Féscistes, qui y assassinaient et violaient leurs camarades d’université. On a rénové cette université, ainsi que celles d’Abobo-Adjamé, de Bouaké, de Korhogo, de Daloa.
Affi N’guessan ne saurait reconnaître la Côte d’Ivoire. Parce qu’elle est au travail depuis deux ans. Et c’est à ce travail que nous vous invitons, M. Affi. La Côte d’Ivoire ne saurait s’éterniser dans les accusations réciproques, dans les anathèmes et dans les haines. Tournons la page, M. Affi, et regardons ensemble l’avenir. Lui seul compte. Pour notre pays, pour nos enfants. De nombreux chantiers sont ouverts, dans lesquels vous et vos amis avez votre place. Beaucoup de choses ont été faites en deux ans, mais il en reste encore plus à faire. Nous avons à mettre notre jeunesse au travail, à lui inculquer de nouvelles valeurs, notamment le goût de l’effort, à la faire rêver de nouveau, à lui apprendre à aimer son pays et son prochain. Nous avons beaucoup de travail à faire, M. Affi. Travail qui vous incombe aussi, vous, en tant qu’Ivoirien, et en tant qu’homme politique. Les Ivoiriens sont fatigués des guerres, des querelles, de la violence sous toutes ses formes, des hommes politiques qui se regardent en ennemis. Chacun des trois grands partis politiques qui occupent la scène nationale que sont le PDCI, le RDR et le FPI a eu son temps de grâce et son temps de disgrâce. Chacun à son tour a régné, a perdu le pouvoir, a connu la prison, l’exil, la souffrance. Disons-nous que le cycle est bouclé. Faisons tout pour que le cycle soit définitivement bouclé, et qu’ensemble, nous nous donnions la main pour reconstruire notre pays.
Venance Konan
Pascal Affi Nguessan, président du FPI a raison
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