Chaque 1er novembre, les catholiques se souviennent des hommes et femmes qui ont incarné de manière intense et radicale telle ou telle béatitude. Ils sont considérés comme des témoins de l’Évangile.
Nous sommes encore en novembre et je pense particulièrement à deux grands témoins de notre continent, deux hommes qui ont marqué leur temps. Ils nous ont quittés respectivement le 12 novembre 2020 et le 15 novembre 1999.
Le Ghanéen Jerry John Rawlings et l’Ivoirien Jean-Marie Adiaffi ont laissé des paroles fortes qui peuvent être pour chacun de nous une source d’inspiration et de motivation.
Réécoutons Rawlings le jour de son procès : “Je suis là pour mettre en garde les officiers supérieurs, les politiciens, les hommes d’affaires et les criminels étrangers contre notre colère. Ils se sont servis de notre sang, de nos sueurs et de nos larmes, bref, de notre travail pour s’enrichir et se noyer dans le vin, dans le sexe. Pendant ce temps, vous, moi, la majorité, nous luttions quotidiennement pour survivre. Moi, je sais ce que c’est que d’aller au lit avec un mal de tête provoqué par un ventre vide. Je préviens ceux qui s’aviseraient d’aider les goinfres qui nous exploitent à fuir qu’ils paieront pour eux. Ils seront jugés, châtiés pour les privations qu’ils ont imposées au peuple. L’heure du jugement est arrivée. Et ce n’est nullement une question de militaires contre civils, d’Akans contre Ewés, ou de Gas contre nordistes, mais de ceux qui possèdent contre ceux qui n’ont rien. Vingt-deux ans après l’indépendance, vous et moi continuons à cogner nos têtes contre le sort, contre le sol, en croyant que Dieu viendra nous sauver de leurs griffes. Il ne viendra pas si vous ne prenez pas vous-mêmes en main votre propre destin ! La France a tiré son salut d’une révolution. Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Union soviétique, la Chine, l’Iran aussi ! Laissez-moi vous dire que Dieu n’aide pas les gens qui dorment. Ne comptez pas non plus sur les gros messieurs que vous voyez passer dans de belles voitures. Ils ne peuvent pas vous aider, parce que leur ventre est plein ; leurs enfants mangent à leur faim et ils ont les moyens d’aller et venir où ils veulent, comme ils veulent.”
Quant à Adiaffi, il faisait remarquer à juste titre que “l’intellectuel n’est rien s’il ne vit pas entièrement dévoué à la cause de son peuple, un peuple soumis, humilié, bafoué, exploité, asservi”.
Il disait aussi que, “si nous enterrons nos langues, nous enfouissons à jamais nos valeurs culturelles, d’autant que la langue reste l’unique archive”.
Jean-Claude DJEREKE