Il est prompt à voler au secours de celui qui est en souffrance ou en détresse. S’il fallait lui trouver une devise, ce serait celle-ci : « Soutenir quiconque est en difficulté. » C’est pour soutenir Martial Ahipeaud et ses camarades de la FESCI qu’il prit la tête d’une marche pacifique en 1990. Il voulait que ces étudiants sortent de prison. Il fera de même pour les étudiants tabassés et violés par un groupe de militaires à la cité universitaire de Yopougon en mai 1991. Pendant la campagne électorale pour la présidentielle de 2000, il promit aux planteurs ivoiriens d‘augmenter le prix d’achat du cacao et du café s’il était élu. C’était sa manière à lui de se solidariser avec eux. En 2003, il apporta son soutien à l’Angola menacé par la famine en y envoyant des vêtements et de la nourriture. En septembre 2009, il décaissa 500 millions de F CFA en faveur du Burkina Faso pour réconforter les victimes des inondations. Ces exemples et d’autres montrent que, pour Laurent Gbagbo, défendre la cause des autres (les petits, les faibles, les spoliés et les persécutés) a toujours été une priorité. Mais cette sensibilité aux déboires d’autrui ne relève pas du hasard, tant s’en faut, car, en dida comme en bheté, le nom que lui donna son père à sa naissance signifiait déjà cela. On peut donc dire que ce nom était prémonitoire. De fait (et ici je parle sous le contrôle de Pascal Kokora, Zacharie Tchagbalé et d’autres enseignants dont je suivis le cours de linguistique africaine à l’Institut de linguistique appliquée d’Abidjan), le nom « Gbagbo » doit être compris de la manière suivante : « Gba (na) gbo = fais mon palabre / parle pour moi/défends ma cause ou bien « Gba (agna) gbo » = fais notre palabre/parle pour nous/ défends notre cause. Paul Koudou désirait-il que son fils prenne fait et cause pour les opprimés et défavorisés, qu’il se batte pour eux ? Il n’est pas sûr qu’il puisse nous répondre, de l’endroit où il se trouve à présent. Une chose est certaine, c’est que, si Laurent Gbagbo avait arrêté de se soucier des autres et de faire leur palabre, il serait allé tranquillement en exil avec sa famille au lieu de subir les bombardements de la coalition franco-onusienne en avril 2011. Cet homme, qui a toujours relégué ses intérêts au second plan, la France a voulu le faire passer pour un criminel. Le non-lieu qui a été prononcé en sa faveur ne pouvait donc pas lui plaire. Jusqu’au bout, elle lui aura fait boire le calice du non-sens et de l’injustice car n’est-il pas injuste et absurde de maintenir en prison une personne déjà acquittée ? Je comprends parfaitement la déception et la colère des Ivoiriens mais qu’est-ce que deux semaines supplémentaires pour un homme qui a déjà passé 7 ans en prison ? Contre mauvaise fortune, faisons donc bon cœur. Ne laissons pas les esclavagistes modernes gâcher notre joie de voir nos deux frères acquittés!
Jean-Claude DJEREKE