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Le responsable en charge de la commercialisation intérieure au sein du Conseil fait le point sur les stratégies et réformes ayant permis de revenir à la qualité en deux ans. 

Ismael Bamba

Ismaël Bamba, directeur des opérations techniques du Conseil café-cacao

Le Conseil café-cacao a été créé au cours de l’année 2011. Nous sommes donc à notre deuxième année de campagne. Avant que nous ne mettions en place le Conseil dans sa nouvelle mouture, il existait des dysfonctionnements dans la filière. Notamment des problèmes au niveau de la qualité, en termes de prix d’achat, et de manière générale dans le système de commercialisation.

Depuis deux ans, le Président de la République, conscient des difficultés des producteurs, a décidé de revenir à la stabilisation comme système de commercialisation et de fixation de prix aux producteurs. Avec un système aussi rigoureux et la sensibilisation bord champ menée par nos agents qui font des contrôles hermétiques au niveau des usines. Les premiers résultats sont très encourageants dans la mesure où nous avons reçu les félicitations du gouvernement.

Pour être plus précis avec des chiffres, je pourrais dire que quand nous prenions la filière sous la coupe du directeur général, Mme Touré Massandjé-Litse, le cacao ivoirien avait mauvaise réputation. Le taux de sous-grade qui était à 36 %, certains parlaient même de 50%, a été ramené très rapidement à 19%. Tandis que le taux d’humidité qui était de 12% est revenu à 8,2%, alors que la norme à l’export est de 8%. Nous avons d’ailleurs reçu les félicitations des exportateurs.

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Le taux de sous-grade qui était à 36 %, certains  parlaient même de 50%, a été ramené très rapidement à 19%. Tandis que le taux d’humidité qui était de 12% est revenu à 8,2%, alors que la norme à l’export est de 8%. Nous avons d’ailleurs reçu les félicitations des exportateurs.

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Le premier producteur mondial de cacao qu’est la Côte d’Ivoire n’avait-elle pas une production de qualité ?

Nous sommes leader mondial en cacao, mais nous ne sommes pas leader mondial en bonne qualité et le Président nous a donné instruction de reconquérir cette place de leader en qualité. Aujourd’hui, nous sommes heureux de dire que les objectifs que nous avions ont été atteints pour la deuxième année de la campagne café-cacao. Je peux affirmer, aujourd’hui, avec certitude, que le cacao ivoirien est d’une très bonne qualité parce que les éléments vérificateurs existent. Les exportateurs ne sont plus obligés de sécher le produit, alors qu’ils avaient tous fait des investissements importants pour acquérir des séchoirs pour pouvoir sécher le cacao. Parce que malgré tout ce qui était fait sur le terrain, le produit arrivait humide si bien qu’ils étaient obligés de le sécher à nouveau. Ils n’ont plus besoin de sécher les produits car avec la rigueur requise sur le terrain et l’implication des collaborateurs, nous sommes à 13% de mauvaise qualité. C’est dire que la progression est continue, que la qualité du cacao ivoirien est véritablement très appréciée. Nous avons eu les retours positifs des chocolatiers, car ils nous ont interrogés pour savoir les raisons des changements. Parce que habituellement, quand ils recevaient cinq chargements de cacao venant de la Côte d’Ivoire, quatre n’étaient pas de bonne qualité, contrairement aux déclarations de terrain. Désormais, les cinq chargements reçus sont bons. Ce qui veut dire que le cacao ivoirien est de bonne qualité et cette qualité est stable, même durant l’exportation.

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Aujourd’hui, nous sommes 11e producteur mondial. Vu l’importance du café et les perspectives heureuses qui s’annoncent, le Conseil a décidé de relancer la production. Àcet effet, un projet a été initié, cette année, pour que nous retrouvions notre place de premier producteur de café.

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Quels ont été les dispositifs et les stratégies mis en œuvre sur le terrain ?

Le premier élément mis en place dans le cadre de la réforme, c’est d’abord la stabilisation. La stabilisation a entraîné un respect du prix bord champ, le prix minimum garanti. Permettant aux paysans de ne pas se précipiter dans la collecte et la commercialisation de leurs produits. Parce que d’un jour à l’autre, d’un mois à l’autre, il sait que le prix va être compétitif, et qu’il peut y avoir de meilleurs prix. La stabilisation a permis cette tranquillité et cette sérénité dans le monde agricole.

Au-delà, c’est surtout le système organisationnel qui a abouti à la bonne qualité du cacao ivoirien en moins d’une campagne. Nous avons adopté une série de mesures. D’abord, nous avons embauché énormément de personnes que nous avons installées à l’intérieur du pays. Ce qui fait qu’aujourd’hui, nous avons 13 délégations régionales dans toutes les zones de production de café-cacao, et nous avons plus de 400 agents à l’intérieur. Tous équipés de véhicules et de motos, chargés de contrôler la commercialisation bord champ. Ils sont chargés de contrôler le prix et la qualité, ils sont proches des producteurs et des opérateurs pour sensibiliser à la qualité et les bonnes pratiques, pour s’assurer que les prix sont véritablement respectés, que les opérateurs, les acheteurs et les coopératives achètent les produits aux producteurs et émettent des reçus qu’ils contrôlent. Tel est le premier point du mécanisme qui est extrêmement important.

Le deuxième niveau du mécanisme visant à améliorer la qualité a été de mettre deux agents du conseil café-cacao au niveau des zones portuaires, au niveau des usines de conditionnement. Dans chaque ville, aujourd’hui, vous avez un agent du Conseil café-cacao qui assiste à la pesée, aux conditionnements et à tout le chargement qui arrive au niveau des zones portuaires. Parallèlement, nous avons institué un contrôle qualité au niveau des usines par délégation. Nous avons pris des concessionnaires qualité qui réceptionnent tous les camions et nous avons fixé les normes d’humidité à 9%. Ce qui fait qu’aujourd’hui, si vous amenez un camion qui est au-delà de 9%, il est systématiquement refoulé. Nous avons également fixé un taux de matière étrangère limité à 2%, et tout camion qui excède ces normes de qualité est refoulé.

Le système informatique est le troisième niveau de réforme. Nous avons un contrôle général de tout ce qui se passe comme activité à tout moment. Si bien que nous sommes à mesure de vous dire le nombre d’opérateurs, la quantité que ces opérateurs achètent et à qui ces opérateurs livrent ces produits. Nous avons une bonne maîtrise du système de commercialisation, parce que nous avons développé un logiciel informatique qui permet de capter ces informations. Ce qui fait qu’il n’est plus possible à un tiers de livrer du cacao s’il n’est agréé. Il n’est plus possible de livrer de la mauvaise qualité au-delà des normes que nous avons fixées parce que le système est bloquant. Tous ces éléments mis ensemble ont permis d’arriver très rapidement à l’amélioration de la qualité et au nettoyage de la filière en extirpant tous ceux qui travaillaient de manière frauduleuse. Nous sommes arrivés à une stabilisation des prix et à une stabilisation du système de commercialisation intérieur.

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Nous avons un fonds spécial appelé Fonds d’investissement en milieu rural (Fimr) pour lequel, chaque année, nous disposons d’un budget de 19 milliards FCfa pour améliorer le cadre de vie du monde paysan.

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Dans cette réforme, qu’en est-il du café dont la production est en nette régression?

La Côte d’Ivoire était le premier producteur de café il y a de cela de nombreuses années. Pour des raisons circonstancielles, liées, entre autres, à la baisse du prix, il y a eu un désintérêt vis-à-vis de ce produit. Aujourd’hui, nous sommes 11ème producteur mondial. Vu l’importance du café et les perspectives heureuses qui s’annoncent, le Conseil a décidé de relancer la production. A cet effet, un projet a été initié cette année pour que nous retrouvions notre place de premier producteur de café. C’est un objectif qui est largement à notre portée, parce qu’il s’avère que nos producteurs sont très demandeurs. Et depuis deux ans, avec le prix de la stabilisation, les prix du café sont à un niveau élevé qui est de 625 F Cfa/kg. Le café est un produit que nous lançons, et que nous comptons véritablement développer.

Au-delà des prix garantis, avez-vous élaboré des stratégies pour inciter le producteur à maintenir la qualité ?

Le Conseil accorde une attention particulière aux producteurs. C’est pour cela que toute la politique que nous développons est tournée vers le producteur. La priorité de la politique, c’est de rémunérer correctement le producteur, c’est pour cela que le Président de la République a instauré le principe de la stabilité qui permet d’assurer un prix rémunérateur garanti.

En termes agricole, nous apportons des sacs pour sa production afin de lui permettre de faire un bon écoulement. Nous lui offrons aussi de bonnes semences pour un meilleur rendement, notamment des semences ‘’Mercedes’’ qui, à deux ans déjà, entrent en production. Ce sont des semences qui permettent d’avoir 1,5 à 2 tonnes à l’hectare, alors que la production moyenne est aujourd’hui à 500 kg. En sommes, nous assistons le paysan au niveau de la production, et quand ces semences entrent en production, nous leur apportons tout le soutien en termes de pesticides et de produits phytosanitaires pour l’entretien des plantations. Chaque année, nous décaissons pour tous ces programmes, huit (8) milliards FCfa.

Qu’en est-il des coopératives qui jouent un rôle majeur dans le circuit de commercialisation des produits ?

Les coopératives sont des opérateurs très importants aujourd’hui. Nous leur assurons la formation sur la qualité et les sensibilisons aux bonnes pratiques. Ce qui fait qu’aujourd’hui, sur les 1,4 millions de tonnes que nous produisons, les coopératives produisent 54%.

J’ajoute, concernant le paysan, qu’en plus de l’appui agricole, pour qu’il continue de produire, il faut qu’il ait un meilleur cadre de vie. Pour ce faire, nous avons un fonds spécial appelé Fonds d’investissement en milieu rural (Fimr), pour lequel, chaque année, nous disposons d’un budget de 19 milliards FCfa pour améliorer le cadre de vie du monde paysan. A travers la construction de routes pour faire sortir la production, la construction des écoles, des centres de santé, des maternités, des forages. L’expérience a montré que les producteurs savent faire de la qualité. Nous pensons que nous pouvons développer différentes politiques pour les amener à améliorer la qualité et à arriver à un taux de sous-garde beaucoup plus bas.

Interview réalisée par NDRI CÉLESTIN

Source: Fraternité Matin, samedi 19 – dimanche 20 – lundi 21 avril 2014