“Comment Gbagbo a piégé ses adversaires”
« En l’état actuel des textes, l’actuel Président de la République, Alassane Ouattara et le Président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), pourraient, à l’évidence être déclarés inéligibles par le Conseil Constitutionnel s’ils faisaient acte de candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2015 ».
Ces propos sont de l’ex-Conseiller spécial de l’ex-Président de la République, Henri Konan Bédié, chargé des Affaires juridiques institutionnelles, Me Faustin Kouamé. Il les a tenus hier, jeudi 31 juillet 2014, au cours d’une conférence de presse qu’il a animée à l’Hôtel Pullman, au Plateau, en prélude à la sortie de son livre ”Élections du Président de la République en Côte d’Ivoire 1993-2010-Espoirs, dérives, droit et antidroit”. Un ouvrage de 423 pages qui paraîtra aux éditions Omci le lundi 11 août 2014, et qui traite de la vie politique ivoirienne d’un point de vue institutionnel en partant de la mort du ”père de nation” Houphouet-Boigny, à l’accession au pouvoir du Président Ouattara en passant par le coup d’Etat de 1999 et l’insurrection armée de 2002.
L’auteur, avocat-consultant institutionnel, connu comme un homme d’expérience, justifie cette publication par le souci de contribuer à la cohésion dans son pays à travers des suggestions de solutions consensuelles pour la stabilité des Institutions, de la paix sociale voire du développement. Revenant sur les raisons qui pourraient barrer la route à une candidature du Président Ouattara à la prochaine joute présidentielle, Me Faustin Kouamé a expliqué que pour l’actuel de Chef de l’Etat, la question de l’exigence de la nationalité ivoirienne cumulative et ascendante (alinéa 2 de l’article 35) se pose.
Quant au second cas, celui du Président du Pdci, il a évoqué la limite d’âge (75 ans alinéa 1 de l’article 35). « (…) Plusieurs présidentiables virtuels se voient privés d’une possibilité de candidature, due au report de cinq ans de l’élection présidentielle d’octobre 2005 à 2010, soit la durée d’un mandat », s’est-il inquiété, non sans souhaiter que les choses soient corrigées.
Aussi, Me Faustin Kouamé a-t-il démontré que la décision présidentielle N°2005-01/PR du 5 mai 2005, relative à la désignation à titre exceptionnel des candidats à l’élection présidentielle d’octobre 2005, n’est pas en harmonie avec l’article 35 de la constitution. Cette disharmonie découlerait, à l’en croire, tant du point de vue de la possibilité pour tout candidat élu Président de la République de briguer un second mandat que de la limitation de l’âge du candidat qui devrait plutôt céder le pas à la compatibilité de son état de santé avec l’exercice des fonctions de Président de la République. « (…) L’article 235 de la Constitution dispose clairement que le candidat élu Président de la République est rééligible une fois, la décision du 5 mai 2005, contrairement à l’esprit de Pretoria qui entendait régler les obstacles à l’éligibilité présidentielle de façon durable et en harmonie avec l’article 35 de la Constitution par l’adverbe ”uniquement”, exclut le bénéfice de ses dispositions dérogatoires pour le second mandat éventuel des ”Marcoussistes” qui en ont bénéficié à l’occasion de la présidentielle d’octobre 2010 », a-t-il été clair, avant de confier que l’ex-Chef de l’Etat, Laurent Gbagbo aurait manœuvré pour que cet adverbe soit introduit subtilement dans les dispositions. Une sorte de piège, selon lui, ”concocté” par le ”Woody de Mama” pour coincer à l’usure, ses adversaires.
Le diplômé en droit institutionnel et techniques de rédaction des constitutions du High School of Law de Tulane University de la Nouvelle Orléans, n’a pas occulté de faire des recommandations dans cet ouvrage dont la révision de la Constitution et des lois organiques relatives au référendum et au Conseil Constitutionnel. Bien avant, Me Faustin Kouamé a battu en brèche les stéréotypes qui lui sont collés notamment en ce qui concerne l’ivoirité. « Je n’ai jamais été artisan de l’ivoirité », a-t-il coupé court, avant d’insister : « je ne négocie pas d’un millimètre mon sacerdoce ».
DIARRA Tiémoko
Source: Soir Info, vendredi 1er août 2014