Gbagbo_Laurent

L’ex président Laurent Gbagbo serait-il devenu un fonds de commerce politique pour certains candidats déclarés à l’élection présidentielle d’octobre 2015 ? Tout porte à le croire, tant des déclarations publiques et des faits de Konan Kouadio Bertin (Kkb), Essy Amara et Charles Konan Banny, tous des candidats déclarés à la reine des élections en Côte d’Ivoire s’apparentent à une opération de charme visant à récolter des dividendes.

C’est le député Konan Kouadio Bertin dit «Kkb» qui a annoncé, subtilement, les couleurs lors de sa conférence de presse en 2014, en déclarant sa candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2015. «Je ne suis candidat contre personne. Je suis candidat contre la division des Ivoiriens. Je suis candidat contre le chômage massif des jeunes de ce pays. Je suis candidat contre la misère et la pauvreté qui n’ont plus de nom. Je suis candidat pour faire appliquer, intégralement, la Constitution de mon pays ; notamment, dans ses dispositions qui veulent qu’aucun Ivoirien ne soit contraint de vivre en exil …», a-t-il lâché notamment. Un appel de pied, serait-on tenté de dire, à tous les partisans de Laurent Gbagbo qui n’espèrent plus le revoir dans le jeu politique ivoirien. Depuis l’annonce officielle de cette ambition, somme toute légitime, de briguer la magistrature suprême, les actes en faveur du président déchu ne manquent pas. La dernière en date, une autre visite annoncée au célèbre prisonnier de Scheveningen au Pays-Bas. « Je me rendrai dans deux semaines à la prison de la Haye pour rencontrer l’ex-président Laurent Gbagbo qui y est détenu et échanger de la situation socio-politique du pays », a confié Konan Kouadio Bertin qui séjourne actuellement à Washington Dc, dans le cadre d’une rencontre sur l’évaluation des menaces spécifiques liées au processus électoral en Côte d’Ivoire. Déjà les 24 et 25 octobre 2014, Kkb rencontrait Laurent Gbagbo à la Haye pour apporter sa compassion suite au décès de sa génitrice, survenu le 15 octobre 2014. «Il (Ndlr ; Gbagbo) m’a confié que j’étais le seul ivoirien à venir lui rendre visite, et a promis qu’il m’en sera durablement reconnaissant pour cet acte », avait confié à la presse, le député de Port-Bouët qui, in fine, semblait capitaliser ses contacts avec le Woody de Mama au moment de la présidentielle.

Essy Amara et les 47% de Gbagbo

Il n’y a pas que Konan Kouadio Bertin qui lorgne les voix de Laurent Gbagbo. L’ancien ministre des Affaires étrangère Essy Amara est, lui-aussi, dans le starting-block. Ces déclarations publiques à l’endroit de Laurent Gbagbo ne cachent guère ses intentions de parvenir à un report de voix pendant la présidentielle dont il est un candidat potentiel. Bien entendu, au cas où certains caciques du Front populaire Ivoirien (Fpi) qui se sont accrochés à un hypothétique retour de leur mentor n’ont pas de plan B devant leur permettre de présenter un autre candidat à cette échéance électorale. Tout en reconnaissant que Gbagbo a fait 47 % lors de la dernière présidentielle, celui-ci se convainc de ce qu’on ne doit pas ignorer un tel leader dans le jeu politique ivoirien. Pour tout dire, il faut aller à la conquête de ces 47% d’électeurs que le leader des frontistes laisse derrière lui. « Il faut trouver une solution pour monsieur Gbagbo je suis un militant pour sa libération. Il y a eu des enquêtes préliminaires, il va être jugé et après, on verra ce qu’on peut faire… », A indiqué le diplomate qui note que ce n’est pas une gloire de savoir qu’un Chef d’Etat africain est détenu à la Cour pénal internationale (Cpi). Comme Kkb et Essy Amara, l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny a vu dans les obsèques de la mère de Laurent Gbagbo, certes une occasion de solidarité et d’éthique, mais aussi une tribune pour marquer des points au plan politique. C’est pourquoi, il a fait le déplacement à la cathédrale Sainte Anne de Gagnoa lors de la levée de corps de Margueritte Gado.

Le soutien de Banny aux parents

Pourquoi, le candidat déclaré à la présidentielle d’octobre 2015 était-il présent aux côtés des parents de Laurent Gbagbo ? Charles Konan Banny sait, mieux que quiconque, qu’en Afrique, ce sont dans les moments difficiles qu’on reconnait ses vrais amis. Aussi, a-t-il trouvé une meilleure occasion qui est les festivités funéraires de la mère du célèbre prisonnier de La Haye pour marquer sa solidarité aux parents affligés. « Nous sommes venus pour Laurent Gbagbo à qui vont nos pensées, comme l’a dit le porte-parole de la famille. Je le dis souvent, on n’a qu’une mère. Et perdre sa mère, c’est la plus grande douleur ; et ne pas être en situation de l’enterrer, c’est encore plus douloureux. Par delà la douleur que nous ressentons tous, surtout ceux qui ont ressenti pareille situation, comme c’est mon cas, nous pensons à lui», a-t-il indiqué. Soulignant que c’est tout à fait normal qu’il soit venu par compassion, par solidarité pour partager la douleur de la famille ; mais surtout, prier pour que celle qui vient de partir repose en paix. Bref, pour les observateurs de la vie publique, il y a lieu de s’interroger sur cette ‘’idylle subite’’ avec un homme qui a été, de tout temps, ‘’l’opposant’’ historique’’ au président Félix Houphouët- Boigny dont ils se réclament tous. Mais, le premier président de la République de Côte d’Ivoire ne croyait pas si bien dire que la politique est la saine appréciation de la réalité du moment ?

G. DE GNAMIEN

Source: Le Sursaut, mercredi 11 mars 2015