Dr Gnamien Yao, ancien ministre de Laurent Gbagbo, a plaidé, mercredi 29 juillet 2015, dans un grand hôtel au Plateau, dans le cadre de la conférence trimestrielle de la Coalition ivoirienne pour la Cour pénale internationale (Ci-Cpi), l’appropriation, par les dirigeants africains, du statut de Rome qui instaure la Cpi. Autour du thème central : « l’avenir politique et judiciaire de la Cour pénale internationale », le président de l’Institut Africain de développement et de Stratégies (Iads), qui planchait sur la thématique « le défi de la perception de la Cpi en Afrique », voit, dans l’appropriation du statut de Rome, aujourd’hui, une ultime opportunité pour les Africains de ne plus envoyer leurs ressortissants à la Cpi. Pour des cas qui sont pendants devant la Cpi relativement à la crise post-électorale de 2010, « il faut un règlement politique. Car, si on veut juger tout le monde, il faut construire des prisons de la taille du stade Félix Houphouët-Boigny. Non ! Il ne faut pas que les pro-Ouattara soient transférés à la Cpi. Je ne veux pas que la Côte d’Ivoire ait une mauvaise réputation. Que Laurent Gbagbo et Blé Goudé reviennent pour être jugés en Côte d’Ivoire, et qu’il n’y ait plus de départ vers la Cpi ». Il a estimé que les Africains doivent faire du statut de Rome, un outil de gouvernance. «Les dirigeants, les ministres, les militaires doivent le traduire dans nos droits internes pour juger tous les crimes en Afrique. C’est alors que notre objectif « zéro africain devant la Cpi sera atteint », a-t-il affirmé. Gnamien Yao soutient qu’avoir « un ressortissant à la Cpi est une mauvaise publicité pour un pays ». « Si on s’approprie le statut de Rome, qu’on connaît les règles de fonctionnement, on peut juger les Africains en Afrique. C’est la solution aux conflits en Afrique ». Pour lui, « le statut de Rome doit être transformé en un outil de gouvernance ». L’objectif « zéro africain devant la Cpi » selon lui, n’induit pas un retrait des pays africains de la Cpi. Il ne nie pas le regard paradoxal, voire mitigé des africains sur la Cpi. Lorsque certains la voue aux gémonies parce qu’elle serait un instrument de recolonisation, d’autres pensent au contraire qu’elle est venue sauver les africains. Entre ces deux perceptions, l’Ambassadeur Gnamien Yao, adopte plutôt, une posture médiane, appelant les uns et les autres à sortir de l’émotion. Aujourd’hui, « on est dans un ordre mondial nouveau » dans lequel « la justice des vainqueurs n’est plus privilégiée », soutient-il. Eugène Nindorera, chef de la division des droits de l’Homme de l’Onuci, Clément Capo-Chichi, coordonnateur Afrique de Ci-Cpi , ont, quant à eux, traité « les défis de la Cpi et le nécessaire dialogue direct avec l’Union africaine (Ua) ; « le rôle de la société civile africaine pour une justice aux victimes et une paix durable en Afrique ». Le président de la Ci-Cpi, Ali Ouattara, pour ce qui le concerne, s’est élevé contre une mesure de l’Ua qui stipule que « les chefs d’Etat et autres hauts représentants du gouvernement seraient exemptés de poursuites durant leur mandat ». En plaidant pour un dialogue direct entre la Cpi et l’Ua, en vue d’une coopération entre les deux institutions pour « éviter de donner un permis de tuer à des dirigeants », il a fait valoir que « l’immunité est synonyme d’impunité ». Dès lors, Ali Ouattara a invité le gouvernement ivoirien à accélérer le processus de reforme du code pénale et de procédure pénal pour le rendre conforme au statut de Rome afin de permettre à la Côte d’Ivoire d’avoir la souveraineté judiciaire et la capacité juridique pour juger son notre territoire.
Armand B. DEPEYLA
Source : Soirinfo 6246 du samedi 1er & dimanche 02 Août 2015