Chacun d’eux dormait tranquillement dans son petit feuillage politique quand, comme un grand coup de tonnerre, un très puissant tsunami est venu les surprendre pour les plonger les uns et les autres dans un désarroi indescriptible. Très violente, l’onde de choc n’a épargné personne dans le microcosme politique ivoirien qui sortait ainsi de sa léthargie. La surprise, la stupeur et même la peur se sont alors mêlées aux interrogations, aux doutes et aux spéculations.
Affi chez Bédié? Pourquoi? Pourquoi? Bédié et le PDCI nous appartiennent, ont hurlé Ouattara et le RDR, effrayés à l’idée de voir leur otage leur échapper et dévoiler aux yeux des Ivoiriens et du monde entier qu’ils sont très minoritaires sur l’échiquier politique en Côte D’Ivoire, qu’en réalité ils n’ont jamais gagné les élections de 2010 et que s’ils sont aujourd’hui au pouvoir, c’est parce qu’ils ont volé la place à Bédié et au PDCI pour être au second tour.
Affi chez Bédié? Mais que diantre est-il allé chercher là-bas? A-t-il oublié que Bédié a soutenu Ouattara pour nous renverser par les armes et envoyer Gbagbo à la CPI? Se sont emportés de leur côté les GOR. Certains d’entre eux ont même ironisé en des termes moqueurs : « Affi a toujours été un militant du PDCI, il retourne en famille ». D’autres ont extrapolé: « Affi était une taupe du PDCI au FPI. C’est un grand tourneur de pages, il avait pour mission de tourner la page de Gbagbo et du FPI, maintenant il s’allie à Bédié pour tourner la page de Ouattara et du RDR ».
Finalement, comme on le voit, si Ouattara et le RDR ont des raisons bien évidentes de regarder d’un très mauvais œil le rapprochement qui s’opère entre Affi et Bédié, il est vraiment curieux par contre que Sangaré et ses GOR qui s’énorgueillent d’avoir avec eux des agrégés en tous genres et même de prétendus experts en linguistique, stylistique, sémiologie et sémantique, n’aient pas compris la démarche politiquement réaliste du président Affi. Il vient en fait de montrer qu’il est le meilleur disciple de Laurent Gbagbo. Il est le seul à avoir bien compris les deux importants messages que Laurent Gbagbo a transmis au FPI par l’intermédiaire de Méambly il y a peu. En effet, de tous les visiteurs qui sont allés défiler et parader à la Haye, Évariste Méambly a été le seul avec qui Laurent Gbagbo semble avoir véritablement parlé de la situation socio-politique nationale et de l’avenir de la lutte.
Dans son premier message, Gbagbo a dit qu’il n’était candidat à rien, même pas au poste de chef de village de Mama. Évariste Méambly a fidèlement rapporté cela sans que Sangaré et les GOR ne changent d’un iota leur décision de le couronner comme président-fondateur du FPI et candidat naturel voire permanent du parti aux élections présidentielles. Les choses sont ce qu’elles sont et, sous les injures, les menaces et les disqualifications, Méambly disparaîtra de la scène. Il aura cependant eu le temps de délivrer le second message de Laurent Gbagbo au FPI. Dans ce message, Gbagbo dira qu’il est prêt à se rendre sur la tombe d’Houphouët-Boigny. Il s’agissait en réalité d’un message codé qu’il envoyait indirectement au FPI pour dire qu’il fallait approcher Bédié et s’allier avec lui pour reconquérir le pouvoir afin de construire la paix et la réconciliation. Après avoir mûrement réfléchi dans sa prison, il reconnaît ainsi que le PDCI est actuellement incontournable pour tout parti qui aspire à gouverner la Côte D’Ivoire.
C’est dire que Gbagbo voulait non seulement l’unité au sein du FPI mais également et surtout la paix à l’extérieur du parti avec les formations politiques nationalistes, en particulier le PDCI. Mais par leur rêve de chaos, d’anarchie, de rancune, leur soif de vengeance, les GOR ont aussi déchiré ce deuxième message de la même manière que le premier et tué dans l’œuf toute idée de paix avec Affi comme avec Bédié. Fanatisés et totalement réfractaires à la réconciliation et à l’unité, voilà Hubert Oulaye qui cherche un bouc-émissaire partout pour l’accabler et lui faire endosser la responsabilité de sa triste condamnation à 20 ans de prison. Voilà aussi l’inévitable Marie-Odette Lorougnon qui refuse de serrer la main à Affi et aux membres de sa délégation lors d’une messe de levée de corps d’une grande militante du parti. Voilà également Laurent Akoun, le Lucky Luke du FPI qui, en tournée au pays des cow-boys, parle du propriétaire du Logo du FPI alors que ce qui vraiment importe aujourd’hui aux militants et aux démocrates ivoiriens, c’est la réconciliation, l’unité et non que ce Logo appartienne à Abel ou à Caïn.
Et ils sont tous comme ça. Je soupçonne même leur Gourou, le vieux Sangaré, d’être capable de démissionner du FPI si Gbagbo venait à le désapprouver. Un fanatique va toujours jusqu’au bout, même dans la bêtise et dans la folie. Ne soyons donc pas surpris si demain, malgré la généreuse offre d’Affi d’investir tous les candidats du parti sans distinction aucune, les GOR rejetaient que leurs candidats aux municipales et aux régionales se présentent sous la bannière de l’EDS avec le soutien financier de Ouattara et du RDR au lieu de le faire sous celle du FPI. Les vrais traîtres sont toujours les loups qui portent des peaux de brebis. L’histoire mettra chacun à la place qui lui convient.
Charles Sinclair Zézé, Ottawa, Ontario, Canada