A mon avis, la stratégie de défense des avocats de Blé Goudé qui consiste à présenter ce dernier comme un « point insignifiant » de la nébuleuse patriotique cuvée 2002, sera difficilement tenable, d’autant qu’elle contient les termes de sa propre contradiction. Je m’explique.
Quand Me Kaufman dit : « Nous démontrerons que Charles Blé Goudé n’est pas le chef de cette galaxie patriotique. Il n’est qu’un point insignifiant et nous renverrons l’accusation dans le trou noir de l’histoire », Me N’Dri dit: ‘’Si la Côte d’Ivoire a accepté Guillaume Soro, le rebelle, comme Premier ministre c’est grâce à un homme. Charles Blé Goudé. Il a entamé une caravane de la paix à travers le pays pour désarmer les cœurs et demander aux Ivoiriens d’accepter Soro dans ses nouvelles fonctions’’.
Le mérite du « premier avocat ivoirien » (l’expression est de lui-même) de l’ex-Général de la rue (cette expression n’est pas de moi), est sans doute de vouloir présenter Blé Goudé comme un homme de paix. Seulement question : un homme qui entame une caravane pour que les Ivoiriens acceptent un rebelle, est-il « un point insignifiant » ? La défense chercherait à donner des arguments à l’accusation, pour convaincre les juges que si Blé Goudé n’est pas le chef de la nébuleuse patriotique, au moins, il en est l’un des leaders ; qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. Et comme devant la CPI, la responsabilité est individuelle, que les autres leaders patriotiques soient en liberté ou que leurs alter-ego de l’ex-rébellion bénéficient du même air de liberté, cela ne change rien à la condition actuelle de « Zouzou wôwô » (un surnom qu’il affectionne bien).
Pour la procureure, ce sera donc comme dans un jeu d’awalé, qui consiste à jouer le plus, pour gagner le moins, en utilisant le propre jeu de l’adversaire. L’objectif restant le même: confirmer les charges contre Blé Goudé, puisqu’à cette étape de la procédure, point besoin de grand déballage, juste montrer que Blé Goudé a joué un rôle plus ou moins important dans le système Gbagbo.
Je pense et je peux me tromper, qu’à cette audience de confirmation des charges, si la défense cherche à démontrer que Blé Goudé est « un point insignifiant » (je suis sûr que même à Blé Goudé, cet incroyable déni, fait marrer), c’est bien parce qu’elle a compris que c’est la nébuleuse patriotique qui est en procès. Si vous voulez, c’est comme si on prend un mafioso et que son conseil essaye de démontrer qu’il n’est qu’un petit « antichambriste » (expression de la Fesci qui désigne un petit exécutant), parce qu’il a compris qu’au-delà du mafioso, c’est la mafia elle-même qui est en procès. Certes, et je l’admets, cette petite comparaison-digression est douteuse, du fait de mon histoire personnelle avec Blé Goudé, un homme avec lequel j’ai entretenu des rapports souvent tendus depuis notre débat télévisé après la signature de l’accord de Ouaga. Bref…
J’avais critiqué la méthode gagne-temps de Me Altit et le temps est en train de me donner raison. Aujourd’hui encore, je critique la stratégie de défense de Me Kaufman, qui détient certainement des réponses sur les photos éventées dans la presse de Blé Goudé; lesquelles photos ont précipité le départ à La Haye, de celui-ci… Je maintiens ma position que s’il n’y avait pas eu de photos, Blé Goudé, comme Simone Gbagbo, serait sans doute encore en Côte d’Ivoire. Mais avec des « si », on referait le monde, vous en convenez…Qui vivra verra !
Source: Connectionivoirienne.net