Afin de contrer la menace d’une épidémie de coronavirus, des experts indépendants de l’ONU ont demandé lundi la libération de migrants des centres de détention à haut risque aux États-Unis.
« Le gouvernement américain doit de toute urgence utiliser des alternatives facilement disponibles à la détention pour les migrants détenus dans des centres administratifs surpeuplés et insalubres afin de contrer le risque d’une épidémie de Covid-19 », a plaidé ce lundi à Genève un groupe d’experts indépendants des droits de l’homme de l’ONU.
« Aucun de ces migrants n’est détenu pour des infractions pénales, mais attendent simplement que des décisions soient prises sur leurs demandes d’immigration », a noté le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des migrants, Felipe González Morales. Les experts indépendants onusiens indiquent avoir reçu plusieurs rapports sur les conditions d’insalubrité et le manque de soins de santé appropriés pour les 1.500 détenus du Centre de traitement du Nord-Ouest, situé à Tacoma, dans l’État de Washington. Ce centre est géré par une société privée, le groupe GEO, pour le compte de l’Agence américaine de l’immigration et des douanes.
« Nous avons entendu dire qu’il y a un manque de mesures de protection pour les détenus, qu’il est impossible de garder la distance physique recommandée et que les nouveaux arrivants ne sont pas mis en isolement pour observation médicale », a ajouté M. González Morales.
Pour l’expert indépendant onusien, cela soulève de graves inquiétudes quant à la possibilité que le coronavirus se propage dans le centre. Cet établissement a fait état de problèmes liés à la fourniture de soins de santé inadéquats et de conditions insalubres. De plus, « il est très difficile de maintenir la distance physique nécessaire dans des centres de détention surpeuplés ».
« Réduire de manière significative le nombre de migrants détenus en les relâchant dans d’autres lieux peut facilement résoudre ce problème », a insisté le Rapporteur spécial.
Le défi de la distanciation physique dans des centres de détention surpeuplés
Face à telles conditions, M. González Morales a demandé à l’administration américaine et au groupe GEO de garantir l’accès aux soins de santé, à des installations d’eau et d’assainissement adéquates, et de renforcer les mesures visant à prévenir l’apparition et la propagation du Covid-19 dans l’établissement.
Plus largement, le Rapporteur spécial a indiqué que la détention administrative des immigrants ne devrait être utilisée qu’en dernier recours.
Il plaide pour des mesures alternatives, qui sont essentiellement non privatives de liberté, des solutions d’hébergement et de soins de proximité moins restrictives, visant à respecter les droits de l’homme des migrants et à limiter le recours à la détention d’immigrants.
Il s’agit d’élaborer un ensemble de critères pour identifier les personnes en détention administrative qui pourraient être immédiatement libérées « pour des placements alternatifs ». « Les mesures alternatives à la détention généralisée des immigrants aux États-Unis permettraient également de garantir que les migrants ne soient pas détenus arbitrairement », a souligné le Rapporteur spécial. A noter que cette déclaration de M. González Morales a été également avalisée par le Groupe de travail sur droits de l’homme et sociétés transnationales ; le Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires ; Dainius Pūras, Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à la santé ; Nils Melzer, Rapporteur spécial sur la torture ; et Léo Heller, Rapporteur spécial sur le droit à l’eau potable.
NOTE :
Les Rapporteurs spéciaux font partie de ce que l’on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Les procédures spéciales, le plus grand organe d’experts indépendants du système des droits de l’homme des Nations unies, est le nom général des mécanismes indépendants d’enquête et de surveillance du Conseil qui s’occupent soit de situations de pays spécifiques soit de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire ; ils ne font pas partie du personnel des Nations unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et travaillent à titre individuel.