Le Front populaire ivoirien (FPI) est en train de renaître de ses cendres. Le parti de l’ancien Premier ministre Pascal Affi N’Guessan a fait une percée fulgurante lors de l’installation des Commissions électorales indépendantes locales (CEL) sur toute l’étendue du territoire national au mois d’octobre dernier. Même si ce scrutin particulier a été dominé par le parti présidentiel, le Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), qui est arrivé en tête de tous les suffrages, le Front populaire ivoirien (FPI) n’a pas du tout été ridicule.
Selon les résultats du 17 octobre 2022 de l’installation des CEL, reçus de la Commission électorale indépendante (CEI), le RHDP a 88,88 % des postes de présidents des 585 CEL, l’Alliance des forces démocratiques (AFD), avec le FPI, arrive en seconde position avec 2,05 %. Le PDCI occupe la 3ème place avec 1,37 %.
Mais contre toute attente, le FPI et ses alliés de l’AFD ont remporté 45,64 % des postes de vice-présidents des CEL. Le PDCI, avec 7,52 % des postes, arrive en seconde position et le RHDP, 3ème, avec 4,10 %. Mieux, le FPI et ses alliés de l’AFP ont conforté leur présence dans ces commissions électorales indépendantes locales par 16,13 % d’élus après le RHDP qui en a 30,88 %. Le PDCI se frotte les mains avec seulement 3,35 % des élus des CEL.
Ces résultats, on ne peut plus flatteurs pour le Front populaire ivoirien, à en croire son président Pascal Affi N’Guessan, n’est pas tombé du ciel. Il est le fruit d’une alliance politique. Lors des dernières élections législatives de 2018, son parti politique n’avait pu avoir qu’un seul élu à l’Assemblée nationale. « Aujourd’hui, c’est dans une alliance avec le RHDP que nous sommes. Ce n’est pas encore concrétisé mais je dois vous dire que c’est par là que nous pouvons passer pour espérer gagner les élections en 2025 ou être dans le pouvoir en 2025. Ce n’est pas une question d’émotion mais c’est une question de réalisme politique », a-t-il déclaré, le jeudi 11 novembre 2022, au siège du parti à Abidjan, au cours de l’audience qu’il a accordée à l’auteur de l’Appel de Mama, Soro Kéléfowa, et à sa délégation.
Il y a un mois, jour pour, Pascal Affi N’Guessan insistait à Man sur l’importance des alliances politiques dans les élections générales en Côte d’Ivoire. C’était à l’occasion d’une rencontre avec les responsables politiques de la Maison bleu et blanc de la région du Tonkpi, dans l’Ouest montagneux ivoirien. « Donc, nous aussi, nous allons chercher des alliés si nous voulons gagner une élection en Côte d’Ivoire », avait-il justifié.
L’histoire récente de la Côte d’Ivoire enseigne, en effet, qu’au premier tour de l’élection présidentielle de 2010, Laurent Gbagbo est arrivé en tête du scrutin avec 38% des suffrages. Et qu’au second tour, alors que son adversaire immédiat, Alassane Ouattara, signe avec Henri Konan Bédié du PDCI-RDA une alliance politique, le président sortant part, seul, à la conquête des voix des Ivoiriens. La suite sera problématique. Malgré l’élimination des résultats dans 7 départements pour fraude, Laurent Gbagbo va se retrouver avec 51% des suffrages. Les contestations de l’opposition et de la communauté internationale se terminent dans une crise qui fait plusieurs milliers de morts en Côte d’Ivoire.
C’est donc l’importance des alliances qui, selon certains observateurs de la vie politique ivoirienne, qui fait précipiter Henri Konan Bédié à Bruxelles pour y rencontrer Laurent Gbagbo lorsqu’il quitte Alassane Ouattara.
Ils expliquent que le président du PDCI-RDA, qui est convaincu qu’on ne peut pas gagner une élection en Côte d’Ivoire sans aucune alliance, veut trouver en Laurent Gbagbo un allié suffisamment fort pour lui garantir la victoire lors des élections locales et régionales de 2023 et la présidentielle de 2025.
C’est également ainsi qu’il faut comprendre les raisons qui ont récemment poussé le président Alassane Ouattara à faire des mains et des pieds pour obtenir le retour de Mabri Toikeusse au RHDP et qu’il reste, aujourd’hui encore, ouvert à faire alliance avec le Front populaire ivoirien. Il sait plus que quiconque que l’électorat est, pour l’instant, divisé et éparpillé en Côte d’Ivoire.
Robert Krassault
ciurbaine@yahoo.fr