« Pourtant, je lui disais que j’avais mal ! »
Le jeudi 22 mars, j’ai été pris à parti avec une force extrême par une horde de policier. J’ai préféré garder le silence vu la vive émotion que mon interpellation avait soulevé. En silence, j’ai écouté. J’ai écouté certains justifier l’acte des policiers.
Pourtant, je lui disais que j’avais mal !
J’ai entendu beaucoup de choses. Beaucoup d’énormités, de la part de certains confrères journalistes, blogueurs mêmes d’internautes. Les versions étaient les unes aussi abracadabrantes que les autres.
Pourtant, je lui disais que j’avais mal !
Il était donc important pour moi de reconstituer les faits. Ce matin-là, sur le coup de 8h, je passe comme d’habitude devant la CEI. Je suis impressionné par l’important dispositif sécuritaire de la police. Je rentre à la station Shell du carrefour Duncan. Je me gare tranquillement, histoire de comprendre la situation. Quelques heures plus tard, les choses ne vont pas tarder à se gâter.
Je sors, du store de Shell, je vois certains journalistes hésitants à sortir leurs appareils pour filmer. (Sûrement de peur qu’on leur casse le matos) Je sors mon téléphone, je lance un direct. J’explique le point de la situation aux internautes qui me suivent. La minute d’après, les policiers offusqués de se voir filmer, commence à repousser manifestants et journalistes jusqu’à devant la résidence du VP Kablan Duncan.
Attroupé là, je vois Agnès Monnet du FPI qui vient, elle aussi ! Elle a été repoussée par les flics. Je me dirige vers elle. J’engage l’interview avec elle. C’est pendant ce moment que le confrère de l’intelligent d’Abidjan est violemment arrêté. Je lance l’alerte sur Facebook en interpellant Alafe Wakili (je ne savais pas que mon tour arrivait.)
10 mn après Pascal Affi N’guessan fait son entrée par la rue des jardins. Je pars encore vers lui, j’engage l’interview en direct. On échange avec les autres confrères. Après son intervention. Je sais que j’ai tout dans la boîte (Affi ne va rien dire à sa sortie qui va changer de ce qu’il vient de dire)
Je décide d’aller à mon Rendez-vous. Je marche jusqu’au carrefour. Je commence à longer la voie côté Latrille évent. Je me lance pour traverser la chaussée afin de récupérer mon véhicule à la station. C’est là qu’un officier m’interpelle en ces termes.
– Toi là, tu es bête ou bien ? On ne vous a pas dit qu’on ne passe pas ici
Je lui fais savoir que son langage est grossier et manque de respect.
– Autorité, vous savez que vous pouvez me dire cela sans toutefois être discourtois à mon égard.
Il m’a fait savoir qu’il s’en fout un peu. Je lui rappelle que si lui n’est pas capable de m’accorder du respect, rien ne m’oblige à lui en donner poursuivant, je le ramène à sa missionnaire régalienne. Celui de protéger et servir dans le respect.
Il n’en fallait pas plus pour que Monsieur soit dans tous ses états. Monsieur est fâché ! Énervé qu’il est. Il lance une meute hurlante pour m’arrêter, je lui dis. Je peux vous suivre où vous
voulez mais veuillez ne pas me prendre par la ceinture. Je vais vous suivre. C’est le mot qu’il ne fallait pas dire. Je suis pris comme un voleur.
Pourtant, je lui disais que j’avais mal !
Pendant que le mec à ma gauche, cherchait à me faire tomber en marchant sur ma cheville, les autres me donnent des coups dans les côtes. Dans leurs volontés, manifeste de m’humilier en me faisant chuter, et face à ma résistance, l’un d’entre eux me donne un coup de matraque sur le genou gauche. Je tombe de douleur.
Je pensais qu’ils allaient avoir de la compassion pour moi. Que nenni. Je me tordais de douleur, ils me criaient tous dessus. Lève-toi, lève-toi. J’insistais pour dire que je ne pouvais pas, qu’ils m’accordent du temps pour que la douleur passe. Non, ils continuaient de plus belle à me battre comme un chien. Je suis traîné sur un mètre de long. Avant qu’ils ne me soulèvent sous injonction d’un autre officier qui leur disaient ne le frapper pas.
Pourtant, je lui disais que j’avais mal !
Ils m’ont battu jusqu’à la voiture. De la station Shell à leur cargo, c’est là que les policiers vont me montrer qu’ils ont un incroyable talent de voleur. Pendant que je me faisais traîner, certains me faisaient les poches. J’ai beau crier ne me voler pas, ils continuaient. Le premier avait réussi à s’éclipser avec mon téléphone et mon « Wifi Pocket ». J’ai dû crier voleur à un policier, pour que son collègue le rattrape pour ramener mes appareils. Qui était déjà loin devant la CEI (selon eux, c’était pour le garder)
Le temps que je reprenne mes esprits, je me rends compte que mon portefeuille contenant 40 000 et mes pièces ont disparus. Je le réclame. Personne ne l’a vu. Après que j’ai été relaxé, je cours au 12e porter plainte. L’officier de service m’a fait savoir clairement et je cite «. Je ne prendrai pas votre plainte. Si vous êtes trop fâché allez porter plainte chez le Procureur Adou.
Au-delà de la tortue physique et psychologique dont j’ai été victime. La loi, la justice de mon pays, elle sur qui je devrais compter me fait savoir que je peux aller me faire mettre. À quel saint vais-je me vouer. Sûrement à l’éternel des armées : la justice divine. Pendant ce moment de soupir, j’arrive à comprendre le sentiment qui pouvait animer tous ces gens qui brûlaient et s’attaquaient aux institutions de l’état.
Que Dieu nous éloigne de la colère, de la vengeance. Dans ce billet, je remercie tous les journalistes et blogueurs ainsi que les internautes pour vos sympathies durant cette épreuve. Mais il est aussi important pour moi de saluer et dire merci à Guillaume Gbato Secrétaire général du Syndicat National des Professionnels de la Presse de Côte d’Ivoire (SYNAPPCI), et à Vincent Duhem de jeune Afrique. Qui sont restés avec moi durant tout ce temps. Sans vous, les gars, je ne sais pas ce qui adviendrait de moi derrière la station.