Dans un contexte où la Côte d’Ivoire connaît une croissance économique fulgurante et un développement infrastructurel sans précédent, certaines failles dans la planification des projets d’envergure commencent à susciter des interrogations. Jean Bonin Kouadio, juriste et président de FIER, s’interroge sur l’absence de voies d’accès adaptées au Parc des Expositions d’Abidjan, mettant en lumière l’impact de cette lacune sur la fluidité du trafic, notamment pour les usagers de l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny. Avec une analyse précise et des propositions concrètes, il appelle à une meilleure coordination des projets d’infrastructure pour éviter que les erreurs de conception ne pénalisent les citoyens. (La Rédaction)

Le Parc des Expositions d’Abidjan / Photo © CICG-Côte d’Ivoire

JE NE COMPRENDS PAS…

Par Jean Bonin KOUADIO
Juriste
Président de FIER

Avant tous propos, je voudrais féliciter les artistes Fally Ipupa et Himra pour la remarquable performance qu’ils ont tout récemment accomplie au parc des expositions d’Abidjan. Quelle belle mobilisation de leurs fans !

Je voudrais associer à ces félicitations l’architecte Pierre Fakhoury pour la beauté architecturale de l’ouvrage d’art qu’il a conçu et qui nous tous rend fier. Pour autant…

Je ne comprends pas qu’avec tous les ingénieurs des TP, ainsi que les nombreux bureaux d’études que compte le pays, dont le BNETD, personne n’ait songé à construire des voies d’accès privilégiées pour permettre aux personnes de se rendre au parc des expositions et en sortir sans que cela ne perturbe l’accès à l’aéroport international FHB d’Abidjan.

Nous avons lu dans la presse un communiqué de la société AERIA, repris par la police, qui demande aux voyageurs de prendre toutes dispositions utiles pour se rendre beaucoup plus tôt à l’aéroport en raison de perturbations prévisibles qu’occasionneraient les concerts précités.

Dans tous les pays du monde que j’ai eu à visiter, les voies principales d’accès et de sortie des aéroports sont des parcours hautement stratégiques que rien ne doit entraver. C’est ce qu’on peut observer notamment à l’aéroport Blaise Diagne de Dakar, à Orly et Roissy Charles de Gaulle en France.

Pour s’assurer de l’effectivité de la fluidité de ces voies d’accès stratégiques, bien souvent, les concepteurs des ouvrages prévoient notamment des bretelles ou des échangeurs.

Pourquoi cela n’a-t-il pas été prévu par les concepteurs du parc des expositions d’Abidjan, alors qu’avec la forte croissance de notre economie, il est prévisible que cette infrastructure montera progressivement en puissance et drainera, au fil des ans, de plus en plus de spectacles, d’expositions et d’événements de toutes natures ?

Pourquoi ce sont les voyageurs, à l’arrivée ou au départ de l’aéroport qui devront payer le prix fort pour les « erreurs » de conception de ce parc des expositions qui en arrive à paralyser la capitale économique du pays pour le moindre concert d’envergure qui s’y tient ?

Pourquoi les véhicules doivent-ils se rendre jusqu’au carrefour du GATL en vue de faire un demi-tour afin de pouvoir accéder à la voie qui mène au parc des expositions ? Qu’est devenu le projet Aérocité qui devrait initialement intégrer le développement harmonieux de l’aéroport ?

Pour avoir fait le BNETD, ce qui me saute tout de suite aux yeux, c’est que sur ce projet du parc des expositions (et probablement sur bien d’autres), il y a eu une absence de coordination.

À une certaine époque (ou j’y étais Conseiller juridique et fiscal), le BNETD, qui a été à cet effet par FHB, depuis le temps de A. Cesario, jouait pour le compte du gouvernement ce rôle de planification et de programmation inhérent et nécessaire à la mise en œuvre de tous grands projets d’infrastructures. Est-ce toujours le cas ? Rien n’est moins sûr.

Devant ce fait accompli, est ce que des solutions existent pour régler le problème ? Bien sûr que si. J’en propose au moins 3 :

1 – élargir la voie principale d’accès à l’aéroport en 2 x 4 voies au lieu des 2 x 2 voies actuelles en prévoyant, au niveau de l’entrée du parc des expositions, un ouvrage d’art pour y accéder.

2 – prolonger la Y4 jusqu’au parc des expositions, à partir d’Abata.

3 – à partir de l’échangeur Akwaba, construire une contre-allée en double sens sur la partie gauche de la voie qui mène à l’aéroport. L’inconvénient de cette solution, la moins coûteuse, c’est qu’il sera nécessaire d’exproprier les entreprises qui commencent à s’installer en grand nombre sur ce tronçon.

Dans tous les cas, compte tenu du nombre impressionnant de projets d’infrastructures qui fleurit chaque année à Abidjan, il est important qu’un organe soit désigné pour assurer la coordination de ces projets.

Cette absence évidente de coordination sera de toutes façons, tôt ou tard, préjudiciable à l’Etat de Côte d’Ivoire et aux populations qui devront, d’une manière ou d’une autre, en payer le prix fort. C’est le cas notamment de la réalisation du projet du métro d’Abidjan. J’y reviendrai.

Jean Bonin KOUADIO
Juriste
Président de FIER

© Abidjan.net Par Franck N’guessan

Encadré

Les trois solutions proposées pour désenclaver le Parc des Expositions d’Abidjan

La situation actuelle autour du Parc des Expositions d’Abidjan met en lumière l’importance d’une coordination efficace dans la conception et la réalisation des infrastructures. Les difficultés rencontrées par les usagers de l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny, aggravées par des choix de conception discutables, rappellent la nécessité d’une approche intégrée et stratégique dans les projets d’envergure.

Il est impératif que les autorités ivoiriennes adoptent une vision à long terme, qui intègre la planification et l’exécution de manière cohérente, pour éviter de telles déconvenues à l’avenir. Des mesures concrètes, telles que l’élargissement des voies d’accès et la création de bretelles stratégiques, doivent être envisagées pour garantir la fluidité du trafic, la satisfaction des citoyens et l’attractivité de la capitale économique.

Jean Bonin Kouadio propose trois solutions pragmatiques pour désenclaver le parc des expositions tout en maintenant la desserte de l’aéroport international FHB :

  1. Élargissement de la voie principale : Transformer la route d’accès actuelle en une voie 2×4, avec la construction d’un ouvrage d’art pour permettre un accès direct au parc des expositions.
  2. Prolongement de la Y4 : Étendre cette voie depuis Abata afin de relier directement le parc des expositions, créant ainsi une alternative de circulation.
  3. Construction d’une contre-allée : Depuis l’échangeur Akwaba, aménager une contre-allée en double sens sur la partie gauche de la route menant à l’aéroport, bien que cela nécessite des expropriations.

Ces propositions visent à remédier aux lacunes actuelles, en réduisant les perturbations pour les voyageurs et en évitant que les infrastructures stratégiques d’Abidjan ne soient paralysées lors de grands événements.

Une coordination accrue et un véritable effort de planification permettront à la Côte d’Ivoire d’assurer un développement harmonieux et durable pour sa capitale économique et ses citoyens.

Simplice ONGUI