(Le Patriote, 23 sptembre 2013) – Le président de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation était ce week-end l’invité du célèbre site « Abidjan.net ». L’ex-Premier ministre qui louvoyait depuis un certain moment, au sujet de ses ambitions présidentielles, a cette fois-ci mis le pied dans le plat. Nous vous proposons ici ses propos liminaires avant les échanges avec les internautes. Jugez-en vous-mêmes.
«Côte-d’Ivoire terre d’espérance», le thème de ce Kokoyalê me renvoie à mon histoire d’Ivoirien, une histoire de pluralisme, une histoire sentimentale. Je suis un Ivoirien qui a traversé le demi-siècle de notre construction démocratique. Un Ivoirien qui a œuvré dans l’administration et contribué à l’animation de l’économie agraire, sorte de locomotive des « trente glorieuses » de ce pays de forte tradition rurale.
Kokoyalê ? Partager notre Histoire ? Partager le récit de notre douleur ? Partager l’Histoire de notre infortune ? Partager nos souffrances ? Parler de nos problèmes n’a de sens qu’à condition de ne pas nous enfermer dans la complainte, de ne pas nous laisser inhiber par les reflets d’une Histoire pétrifiante. Nous devons réenchanter notre Histoire en aménageant une place de choix à l’espérance.
Né comme Félix Houphouët-Boigny dans une famille de planteur, je suis depuis longtemps conscient que la terre est une donnée fondamentale de notre Histoire. Une Histoire de spiritualité, une Histoire de piété filiale. La Côte-d’Ivoire est avant tout une géographie. Notre terre a porté les germes de l’émancipation des femmes et des hommes de ce pays à travers la question du bien-être paysan. C’est le Syndicat Agricole Africain, une coopérative paysanne qui a constitué la matrice du Rassemblement Démocratique Africain et enfanté du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire.
La terre porte les rêveries de la volonté ; la terre porte les rêveries du repos.
L’Abidjanaise, notre hymne national, réaffirme notre attachement à la terre-mère, la terre-nourricière, la terre-espérance. Il faut le mettre en œuvre. La terre est témoin des trois âges de Côte-d’Ivoire, des trois rêves de Côte-d’Ivoire. La sève de cette Histoire coule des cimes aux racines. C’est une histoire de continuité générationnelle.
La génération du «rêve côtivoirien» s’est illustrée par son caractère combattant. Elle a lutté au-delà des corporatismes pour la liberté et la dignité des Ivoiriens. La «génération du miracle économique» s’est trouvée investie de l’héritage de solides fondamentaux, en vue de les préserver, de les faire fructifier. Nous n’y sommes pas toujours parvenus. Avec nous, la « génération cabri-mort», «génération des sacrifiés», celle de la panne de notre modèle social républicain, celle de nos enfants dont l’avenir serait compromis si nous ne parvenons pas à retrouver le sens de valeurs positives, paie un lourd tribut aux errements et tourments d’une Histoire récente écrite en lettres de sang.
J’ai un rapport charnel à notre terre d’espérance, à son sol, à son climat, à ses paysages. Je suis passionné de Côte-d’Ivoire, parce que ce peuple fait partie de moi. Sa convivialité, son humour, son sens de la distinction qui l’entraîne parfois à d’inquiétant penchants messianistes. Notre peuple n’est pas seulement frondeur, il possède un génie pour l’innovation sociale. Le passé de la Côte d’Ivoire n’est pas passé, son Histoire continue. C’est pourquoi, Président de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation, j’ai tenu à raviver un certain nombre de symboles. Notre devise : «Parfaire la construction de la société ivoirienne», s’inspire de la vision du Président Houphouët-Boigny lequel anticipait sur ce que serait la tâche des Ivoiriens de ce siècle. L’hymne populaire : «le travail de mille générations… » que nous avons enrichi de couplets additionnels, indique la voie du succès. Je chéris fièrement les symboles de la nation. L’hymne, la devise, le drapeau, sont porteur de notre identité d’Ivoirien. Je les ai vus « naître ». Je suis également saisi par la fièvre des bâtisseurs. C’est pourquoi, je ne conçois pas qu’on puisse considérer, en dépit de mon expérience, qu’il me soit interdit d’avoir une ambition pour la Côte d’Ivoire. J’ai la passion d’agir.
Chacun connaît la maxime qu’on prête à John Fitzgerald Kennedy : «Ne vous demandez pas ce que votre pays a fait pour vous, mais demandez-vous plutôt ce que vous avez fait pour votre pays». «Ai-je fait, bien fait, tout ce que je pouvais pour le bien-être de mon pays ?», lui répondait en écho le Père-fondateur de la Côte-d’Ivoire moderne. Je suis un fier ivoirien. Je voudrais participer à rendre demain la Côte d’Ivoire plus juste, plus forte, plus prospère. J’ai du respect pour nos masques et n’en porte aucun. La Côte-d’Ivoire n’est pas une case sans clef. La clef de sa destinée est de lui insuffler le principe d’espérance. C’est le seul moyen de l’aider à se retrouver, à renouer tel un Sankofa avec son Histoire. La Côte-d’Ivoire a besoin de refleurir.
Je voudrais la Côte-d’Ivoire plus démocratique, en commençant par le PDCI, le parti qui a vocation à donner l’exemple. Un droit d’aînesse engage à des devoirs. Nous avons un rôle à jouer : rêvons utile pour notre pays. Je voudrais le PDCI plus conquérant parce qu’il ne peut pas se cantonner au rôle de « parti godillot », à la remorque de ceux qui l’on rejoint au moment où il donnait des signes d’essoufflement. Nous devons endosser la dette des générations.
Aujourd’hui dans notre pays, les poches de pauvreté sont bien trop nombreuses. Des chefs de famille doivent confronter la honte de ne pouvoir subvenir au besoin de leurs enfants, il faut les aider à reconquérir leur dignité. Les frustrations du quotidien peuvent constituer un ferment toxique, la honte et l’humiliation aussi. Un parti politique se doit d’apporter une compétence économique et sociale. L’urgence est d’adresser en priorité ces questions. Qu’est-ce que le PDCI propose aux Ivoiriens en matière de politique d’aide sociale ? Souvenons-nous que nous étions le parti du social hardi. Nous ne pouvons pas nous rendre complice de casse sociale. Payons vis-à-vis de nos cadets la dette des générations.
Depuis l’appel d’Houphouët-Boigny nous invitant en 1956 au Stade Géo André à ne pas nous battre « au chevet d’une mère malade », tous les cadres de ce pays ont contribué à la vie du PDCI au moins jusqu’en 1990. Nous avons droit d’inventaire. Je suis PDCI par culture politique, ce qui signifie que je porte une dévotion à notre mère-patrie. La vocation du PDCI est de défier les fatalités contingentes et non pas de renoncer.
En Argentine, quelqu’un affirmait : « tout le monde a été, est ou sera péroniste ». Laissez-moi dire qu’en Côte-d’Ivoire : « tout le monde a été, est ou sera houphouétiste ». Je me méfie des étiquettes qui peuvent-être trompeuses, je suis plus préoccupé du contenu. Quel projet allons-nous élaborer, susceptible d’enrichir la case que nous a laissé le Père-fondateur? Avec son sens de la gestion des contradictions, il se disait « bourgeois progressiste » considérant devoir léguer davantage que ce qu’il a reçu de ses devanciers aux générations qui suivent. Que laisserons-nous à ceux qui vont conserver notre legs ? Offrons-leur d’ores et déjà la possibilité de bâtir avec nous sur la parcelle commune en étant responsables, en étant aux responsabilités.
Président de la Commission Dialogue Vérité Réconciliation, j’ai fait mon tour de Côte-d’Ivoire. J’ai écouté avec compassion, battre le coeur de la Côte-d’Ivoire blessée. Je ne me la laisserais pas conter par tous ceux qui croient pouvoir parler en notre nom. Parler à notre place. Ma tournée de ses terroirs m’a révélé une Côte-d’Ivoire meurtrie, une Côte-d’Ivoire en suturation, une Côte-d’Ivoire en demande de restauration parce ce que son Histoire n’est pas close. Au contraire, elle continue.
Charles Konan BANNY
21 Septembre 2013
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Banny attaque et se propose candiddat
Du réconciliateur en chef suite à la crise postélectorale au challenger principal sous la bannière du PDCI du chef de l’Etat qui a déjà déclaré sa candidature aux échéances électorales de 2015, c’est une simple pirouette pour Banny. En effet, après avoir mis bas le masque concernant son statut de chef de la fronde contre le président du parti démocratique de Côte d’Ivoire(PDCI), Henri Konan Bédié, le président de la Commission Dialogue Vérité et Réconciliation se veut désormais un franc-tireur dans le jardin des alliés du parti doyen, notamment le Rassemblement des Républicains (RDR). Invité de l’émission Kokoyalê sur Abidjan.net, l’ex-Premier ministre n’a pas hésité à ouvrir le feu sur le sphinx de Daoukro et son allié, le président de la République, Alassane Ouattara. Dans son manteau anti-RHDP, l’ex-gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCAO) ne cache plus sa gêne de voir le vieux parti au sein du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Pour lui, cette alliance mise en place dans des circonstances exceptionnelles doit être brisée pour permettre au PDCI de voler de ses propres ailes et de reprendre le combat de la reconquête du pouvoir d’Etat. «Je voudrais la Côte d’Ivoire plus démocratique, en commençant par le PDCI, le parti qui a vocation à donner l’exemple. Un droit d’aînesse engage à des devoirs. Nous avons un rôle à jouer : rêvons utile pour notre pays. Je voudrais le PDCI plus conquérant parce qu’il ne peut pas se cantonner au rôle de « parti godillot », à la remorque de ceux qui l’ont rejoint au moment où il donnait des signes d’essoufflement», a-t-il martelé. Avant de se faire, selon lui, l’écho de la situation ‘’ de pauvreté’’ qui prévaut en Côte d’Ivoire. «Aujourd’hui dans notre pays, les poches de pauvreté sont bien trop nombreuses.
Des chefs de famille doivent confronter la honte de ne pouvoir subvenir aux besoinx de leurs enfants», a-t-il constaté. Tout en se proposant comme l’homme providentiel à même de sauver le navire ivoire qui est en train de chavirer à ses yeux. «Je suis un fier Ivoirien. Je voudrais participer à rendre demain la Côte d’Ivoire plus juste, plus forte, plus prospère. J’ai du respect pour nos masques et je n’en porte aucun. La Côte-d’Ivoire n’est pas une case sans clef. La clef de sa destinée est de lui insuffler le principe d’espérance. C’est le seul moyen de l’aider à se retrouver, à renouer tel un Sankofa avec son Histoire. La Côte-d’Ivoire a besoin de refleurir. Je chéris fièrement les symboles de la nation. L’hymne, la devise, le drapeau, sont porteurs de notre identité d’Ivoiriens. Je les ai vus « naître ». Je suis également saisi par la fièvre des bâtisseurs. C’est pourquoi, je ne conçois pas qu’on puisse considérer, en dépit de mon expérience, qu’il me soit interdit d’avoir une ambition pour la Côte-d’Ivoire. J’ai la passion d’agir», a-t-il clairement indiqué.
Lacina Ouattara