(L’éléphant Déchaîné, 21 – 23 mai 2013) – Vite, tous ensemble, hourra, hourra ! Enfin, notre président, après son dernier séjour dans l’Ouest du pays, a pris une décision percutante. Il a ordonné l’arrestation du chef des miliciens burkinabé, grand copain des ex-rebelles de Soro Guillaume, Amadé Ouérémi.
Interrogé sur les exploits de ce chef de guerre dans la forêt du Mont Péko lors de sa conférence de presse bilan, le chef de l’Etat avait pourtant servi aux journalistes, une réponse pour le moins foncière : « Ce sont des dossiers qui sont en cours de traitement. Il n’aura pas d’impunité. Le ministre de la Défense a eu les instructions nécessaires et je ne connais pas les détails du dossier avec le ministre de la Sécurité. Ce point a été porté à ma connaissance en Conseil national de la sécurité et ça va être réglé. Il n’est pas question d’impunité et l’impunité n’est pas acceptable mais le problème du foncier est réel.» Avait-il dit.
Douze jours seulement après ces propos de notre président, voilà Amadé Ouérémi dans les filets du commandant Losseni, celui-là même sous les ordres de qui, il a mené la bataille dans l’ouest du pays. Comme quoi, la vie réserve souvent des surprises.
Bref, Amadé Ouérémi a été arrêté dans des conditions que l’on ne maîtrise pas encore totalement certes, mais comme l’on nous apprend que les populations de Duékoué, zone de confiance dans laquelle il régnait, sont contentes, on ne peut donc que saluer la réussite de l’opération. Quand un travail est bien fait, il faut le saluer. Et l’irrévérencieux quadrupède dont chacun connait les mauvais penchants dans ce pays, sait parfois apprécier le travail bien fait, eh oui !
Saluons donc les autorités militaires pour avoir réussi, après plus de deux ans d’humiliations, à arrêter, sans trop de dégâts, le grand serviteur de l’ex-rébellion armée de Soro Guillaume.
L’infernal quadrupède l’a toujours écrit, la présence de cet individu, qui a même fait une fois la “UNE” du quotidien gouvernemental “Fraternité Matin”, dans cette forêt, était un outrage à toute la République.
Nos autorités militaires, on le sait, ont toujours eu beaucoup de scrupule, en raison du statut particulier d’Amadé Ouérémi, à mettre fin à sa défiance vis-à-vis de l’Etat.
Amadé Ouérémi est un chef milicien et il a combattu avec ses éléments qu’il a massivement importés de son Burkina natal, aux côtés des ex-forces nouvelles de Soro Guillaume pendant leur brûlante conquête des territoires qu’elles entendaient occuper, afin de conduire le peuple ivoirien à l’apothéose de la démocratie, de la béatitude et des droits de l’homme.
Et c’est cette participation aux côtés des ex-forces nouvelles qui lui a permis de passer du statut de réparateur de vélos, à celui d’abord d’héritier de son paternel qui louait quelque lopin de terre dans l’ouest du pays, puis de maître incontesté de cette forêt classée du Mont Péko, située dans la zone de confiance et sous influence des ex-chefs de guerre, de 2002 à maintenant.
Grace à son activité débordante, à sa capacité à chasser les propriétaires terriens de cette zone et son expertise en matière de trafics en tous genres, il a réussi, en quelques années, depuis un patrimoine national (la forêt classée du Mont Péko), à faire du Burkina, un pays exportateur de cacao et de diamant.
Selon plusieurs rapports d’organisations de défense des droits humains, Amadé Ouérémi a pris une part particulièrement décisive dans la bataille de Duékoué, notamment au Carrefour Duékoué, pendant la progression des ex-forces nouvelles, transformées entre-temps en forces républicaines par notre président.
Ces ONG lui attribuent la paternité des massacres qui ont été commis à ce carrefour où près de 300 personnes, selon le rapport de l’Onuci, ont été massacrées en raison de leur supposé soutien à l’ancien président, l’intrépide Gbagbo, expédié à La Haye, depuis novembre 2011.
Mais comme chacun le sait, imputer ces massacres à Amadé Ouérémi, c’est l’imputer aux Frci, sous les ordres desquelles, il combattait. Est-ce cela qui inhibait la volonté des autorités à le mettre aux arrêts? Il en savait trop?
Bref, son arrestation est à saluer à sa juste valeur. C’est déjà un soulagement pour toutes les personnes qui auraient été victimes de ses actes. Mais le plus important, à présent, c’est ce que les autorités vont faire de lui. Va-t-il être jugé par notre justice pour tous les crimes qu’il est supposé avoir commis ? Ou bien nos dirigeants vont-ils, en raison de son statut et surtout pour éviter des révélations gênantes, le remettre aux autorités de son pays, le Burkina, ce pays à qui il a rendu tant de services, pour qu’elles se chargent de le juger?
C’est à ce niveau que se trouve aujourd’hui, le vrai débat, passé les hourras exécutés après son arrestation…
On est donc bien curieux de savoir ce que fera le Burkina Faso pour son « producteur » de cacao, et de diamants aussi, Amadé Ouérémi…
Assalé TIEMOKO