LE MONSTRE TRIBAL EN EMBUSCADE… 

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Laurent Gbagbo qui, depuis La Haye, dans une lettre supposée écrite par lui, accuse clairement Affi N’Guessan de vouloir jeter le FPI dans les bras de Ouattara et réussit l’exploit de brouiller l’image de rassembleur qu’il a voulu montrer au monde.

Affi N’Guessan qui ne démord pas, ne croyait pas un seul instant que tout ce qui est produit comme provenant de Gbagbo ait été vraiment écrit par lui et qui réalise qu’en réalité, Gbagbo a tout orchestré depuis sa cellule mais qui ne renonce pas et entend saisir les tribunaux ivoiriens pour invalider la candidature de ce dernier…alors que le parti s’incline vers l’Ouest.

Les militants qui, déroutés par ce spectacle ne savent plus à quels refondateurs se vouer, restent, profondément, divisés.

On croyait les dirigeants du FPI murs démocratiquement, on les découvre comme étant en réalité de petits calculateurs égoïstes qui ne se préoccupent guère du sort des Ivoiriens et de l’avenir de la Côte d’Ivoire.

Affi N’guessan clame qu’il veut continuer à diriger le FPI pour obtenir la libération de Gbagbo. Et Gbagbo qui donne l’impression d’avoir oublié qu’il est en prison, veut diriger le FPI pour le libérer de la soumission au RDR. Deux discours anachroniques qui, dans quelques jours, vont faire imploser ce parti qui pèse à lui seul 46% de l’électorat… mais qui a renoncé à tout.

L’ORIGINE D’UN SOUPÇON !

A sa libération de prison le 5 août 2013, à la surprise générale de ses camarades non emprisonnés et gérant les affaires courantes jusque-là, et après avoir récupéré son fauteuil de président du FPI des mains de Miaka Oureto le 7 septembre 2013, Affi N’Guessan, au motif qu’il voulait remobiliser les bases du parti, a entamé une tournée en commençant par sa région de naissance. Où, au cours d’un meeting à M’Batto, un chef de village, Nanan Koua, s’adressant à lui, sortira cette phrase : «Affi, tu seras président de la République… »

Ce bout de phrase, sur lequel Affi n’est pas revenu au cours de son intervention ne serait-ce que pour recadrer les choses et dissiper quelques doutes dans l’esprit de certains de ses camarades de la direction qui l’accompagnaient, a été le lit à partir duquel sont nés tous les soupçons. D’autant plus que pendant cette tournée, Affi N’Guessan, au grand dam de ses camarades et de nombreux militants, n’a pas beaucoup cité le nom de Laurent Gbagbo. Il s’est contenté, comme un opposant à la recherche du pouvoir, d’allumer le pouvoir en place et de parler même de « deux Côte d’Ivoire ».

Dans la presse, le lendemain, le discours d’Affi N’Guessan à M’Batto est passé presqu’inaperçu. En revanche, à la « Une » de plusieurs journaux proches de Gbagbo et notamment « Notre Voie », les propos du chef Nanan Koua, créent l’évènement. Dans les jours qui suivent, un débat malsain est savamment orchestré dans la même presse et sur les sites Internet pro-Gbagbo.

Certains camarades et non des moindres, soupçonnent Affi N’Guessan de vouloir tourner la page Laurent Gbagbo.

Réagissant à ces rumeurs, Affi N’Guessan, au cours d’un autre meeting, tente de préciser sa pensée : « La Côte d’Ivoire est enceinte de tous les prisonniers à commencer par le Président Laurent Gbagbo. Sa libération est incontournable. Donc je suis serein. Je voudrais rassurer les Ivoiriens et les militants du FPI que nous sommes mobilisés pour la libération du Président Laurent Gbagbo et de tous les prisonniers. Partout où nous allons nous retrouver avec le gouvernement, nous allons exiger la libération du Président Laurent Gbagbo ».

Mais cette précision ne suffira pas à mettre fin aux soupçons qui enflaient. Au cours de sa tournée dans la région de Gbagbo, Affi N’Guessan constate que ses discours qui ne sont pas truffés du nom de Laurent Gbagbo, n’enflamment pas les foules. Il se confie alors à l’un de ses camarades originaires de Gagnoa. Lequel lui donne le conseil suivant : « Nous sommes dans la région de Gbagbo. Si tu veux que les gens t’acclament, il faut modifier tes discours. Il faut les axer uniquement sur la libération de Laurent Gbagbo, parler de lui à chaque phrase, parler de son combat, dire de lui tout le bien qu’ils veulent entendre… » Conseils bien saisis.

ON DETRUIT LE PARTI OU ON DETRUIT LE PARTI ?

A Gagnoa, ville natale de Laurent Gbagbo, Affi N’Guessan fait un discours uniquement axé sur l’intrépide Gbagbo. La foule se déchaîne, à sa grande surprise. Il est fortement acclamé. Vive Gbagbo !

Mais d’autres déclarations d’Affi N’Guessan, après des rencontres avec des émissaires du pouvoir, vont réveiller les mêmes soupçons. Une situation qui va amener Damana Pikas qui n’est plus à présenter, agissant au nom d’une obscure structure appelée « Coalition des Patriotes Ivoiriens en Exil (COPIE) », à produire une déclaration pour dénoncer les attaques contre Affi N’Guessan : « (…) La COPIE observe depuis quelques semaines qu’une vaste et violente campagne de dénigrement aux desseins inavoués est savamment orchestrée dans la presse, à travers certains journaux, mais aussi sur les réseaux sociaux contre le FPI et son Président Pascal AFFI N’Guessan. La COPIE s’interroge sur les réelles motivations de ces personnes et comprend difficilement de tels actes alors même que le Président Pascal AFFI N’Guessan a entrepris une tournée de remobilisation qui suscite espoir auprès des militants et des populations ivoiriennes. La COPIE note que deux groupes s’illustrent dans cette voie, dans l’intention de fragiliser la dynamique du combat telle qu’enclenchée par le Président du FPI. Ces critiques sont de façon constante et récurrente le fait de personnes connues, se réclamant des Pro-Gbagbo et plus gravement parfois issus du FPI. Sur les ambitions prêtées au Président Pascal AFFI N’Guessan, la COPIE note qu’à aucun moment, depuis sa sortie de prison, le Président du FPI n’a ténu de tels propos ou laisser transparaitre dans ses actes une telle volonté. Au contraire le Président Pascal AFFI N’Guessan ne cesse de répéter partout où il se trouve que la réconciliation nationale est intimement liée à la libération du Président Laurent Gbagbo, détenu injustement à La Haye… »

Sauf que cette déclaration ne changera rien. Bien au contraire, depuis son lieu d’exil, Lazare Koffi Koffi, un dur parmi les durs de la refondation, ancien ministre, dans des textes pour la plupart à caractère poétique, va dénoncer sans gants, les « accointances » d’Affi N’Guessan avec le régime en place et le soupçonner de vouloir tourner la page Gbagbo : « (…) Depuis la libération du président Affi et de plusieurs camarades de la direction du parti, je n’ai eu de cesse d’attirer l’attention de tous sur la nécessité de mettre le président Laurent Gbagbo au centre du débat politique. Pour moi, le FPI peut entrer dans un processus de dialogue politique avec les tenants du pouvoir actuel, mais sur la question de la réconciliation nationale, (à ne pas confondre avec le dialogue politique), j’estime que le FPI doit poser comme préalable la libération inconditionnelle du président Laurent Gbagbo (…) Nulle part, il n’a été mentionné le nom du président Laurent Gbagbo ni fait référence à son incarcération (…) Donc qu’on me réponde : la direction du FPI a-t-elle un problème avec le président Laurent Gbagbo ? En d’autres termes, la question du Président Laurent Gbagbo est-elle « un sujet qui fâche » dont il faut éviter de parler comme l’avait dit en son temps Mamadou Koulibaly? ». S’interroge-t-il.

Et quand Affi N’Guessan décide de réaménager la direction du parti en écartant quelques caciques dont Akoun Laurent, il achève de convaincre ses camarades de sa volonté supposée de tourner la page Gbagbo.

Dans la foulée, Alphonse Douati, Akoun et autres organisent une conférence de presse au cours de laquelle ils laissent transparaître clairement leur volonté de tout mettre en œuvre pour bouter Affi N’Guessan hors de la tête du parti. La suite, elle se passe sous les yeux ahuris des Ivoiriens depuis quelques mois.

« IL FAUT REMETTRE LE PARTI A LAURENT GBAGBO»

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Le 4 octobre 2014, depuis le village de Laurent Gbagbo et alors qu’au sein de la direction du parti la fracture s’est installée entre Affi N’Guessan et ses camarades, un étrange appel visant à faire de Laurent Gbagbo le président du parti en remplacement d’Affi N’Guessan lors du prochain congrès, est lancé. Par un groupe de secrétaires généraux conduit par un certain Soro Kélofohoua.

Cet appel à la candidature de Laurent Gbagbo qui était en réalité un acte savamment muri et exécuté par des membres de la direction du parti, va semer une confusion générale dans les rangs et dans la presse pro-Gbagbo. Alors que « Notre Voie » tente de démontrer dans ses colonnes que les initiateurs de cet appel se sont trompés en comparant la situation de Gbagbo à celle de Nelson Mandela et que la candidature de Laurent Gbagbo à la présidence du parti serait une source de division, dans d’autres journaux « bleus » et notamment « Le Temps », l’appel est célébré. On y écrit même que la quasi-totalité des fédéraux du parti sont pour la candidature de Laurent Gbagbo.

Et que dit Laurent Gbagbo lui-même devant cette situation ? Alors qu’Affi N’Guessan et ses partisans pensent qu’il ne s’agit que d’une manipulation et d’une tentative maladroite d’utiliser le nom de Gbagbo pour l’empêcher de travailler, il découvre, à son grand étonnement, que Laurent Gbagbo est lui-même, depuis La Haye où manifestement il n’a aucun souci, l’organisateur en chef de toute cette opération.

En effet, d’abord le 31 octobre, c’est Michel Gbagbo, le fils de son père qui, lui-même, dépose la candidature de ce dernier. Ensuite, par la voix de son avocat, Me Altit, le 4 novembre, Laurent Gbagbo dit « oui » à la proposition de sa candidature à la tête du parti. «L’initiative d’un groupe de militants de proposer le président Gbagbo comme candidat à la tête de son parti ne saurait être brandie comme une preuve de l’existence d’un réseau terroriste à sa disposition pour maintenir l’ancien président en détention. Au contraire, en mettant le parti sous sa coupole, les militants du FPI donnent la preuve que le président Gbagbo est toujours soutenu dans son parti, qu’il jouit encore d’une légitimité dans son parti et qu’il reste populaire dans son pays… » Déclare l’avocat. Ses propos sonnent comme une réponse directe de Laurent Gbagbo à Affi N’guessan qui, quelques jours plus tôt, avait estimé que mettre Laurent Gbagbo au centre du débat au FPI était le prétexte utilisé par la CPI pour refuser de lui accorder la liberté provisoire.

Croyant avoir coupé l’herbe sous les pieds d’Affi N’Guessan par le dépôt de la candidature de Gbagbo, ceux que les partisans d’Affi appellent « les Gbagbo ou rien », ricanent et se disent que jamais Affi N’Guessan n’osera affronter Laurent Gbagbo pour le contrôle du FPI. « Il faut remettre le FPI à son fondateur et si Affi ose affronter Gbagbo, il commettra un parricide», déclarent-ils.

Mais le 10 novembre, accompagné de quelques rares membres de la direction qui lui sont restés « fidèles » (du moins en apparence), Affi N’Guessan se rend au QG du parti et dépose sa candidature. La guerre est alors ouvertement déclarée entre les deux hommes.

Après le dépôt de sa candidature, Affi N’Guessan tente de faire invalider celle de Gbagbo en soulevant des arguments juridiques et en criant à la violation des textes qui régissent le parti. Mais l’ensemble de ses arguments sont repoussés du revers de la main par la commission chargée de recevoir les candidatures. Depuis, il menace de traduire cette commission devant les juridictions ivoiriennes.

C’est qu’Affi N’ guessan vient de réaliser qu’en réalité, Gbagbo ne lui a confié la direction du FPI que pour des raisons de géopolitique. Et qu’en réalité, jamais il n’a été le vrai président de ce parti. Et la candidature de Laurent Gbagbo qu’on croyait trop mûr politiquement pour se rabaisser dans une bataille de contrôle d’un parti politique après avoir été président de la République pendant 10 ans, pousse certains, dont des diplomates, à penser qu’en réalité, la crise qui secoue en ce moment ce parti, au-delà des soupçons qui pèsent sur Affi N’guessan, a une cause plutôt tribale qu’idéologique.

COMMENT GBAGBO BROUILLE SON IMAGE !

La campagne de Laurent Gbagbo pour la présidence du FPI a été lancée ce samedi 6 décembre. On sait désormais la composition de son équipe de campagne. Elle sera menée par quatre directeurs nationaux de campagne que sont Assoa Adou, Douati Alphonse, Akoun Laurent et Koua Justin. Lesquels auront pour conseillers politiques, Sangaré Aboudramane et autres Miaka Oureto, Kodjo Richard, Gnaoulé Oupoh, Dedy Seri. En fait, l’ensemble de tous ceux qui n’ont jamais accepté Affi N’guessan comme président du FPI depuis son imposition à ce poste, pour des raisons de géopolitique, par Laurent Gbagbo.

Au cours de la cérémonie, une lettre datée du 25 novembre et paraît-il, écrite par Laurent Gbagbo pour expliquer les raisons pour lesquelles il a accepté d’être candidat, a été lue par Koua Justin. Mais cette lettre contient une référence particulièrement douteuse. L’auteur qui serait Laurent Gbagbo, y fait allusion au combat du PDCI-RDA en 1945 et 1951. Pourtant, durant toute sa carrière politique, jamais Laurent Gbagbo n’a fait allusion à ce combat, ayant toujours considéré l’indépendance de la Côte d’Ivoire comme un cadeau fait par le colon français. Prendre subitement aujourd’hui cet exemple pour expliquer sa propre attitude ne peut que pousser à l’interrogation quant à l’authenticité de ce document. A moins que son incarcération à la CPI lui ait désormais permis de mieux comprendre l’époque d’Houphouët-Boigny et de ses camarades de lutte ?

Allez, parcourons quelques lignes de cette lettre : « (…) pourquoi après avoir quitté la direction du parti en 2001 et avoir proposé la candidature d’Affi N’Guessan, je reviens treize (ans) après ? » Et dire qu’on croyait que ce sont les autres qui lui ont demandé de revenir diriger le parti ! Mais poursuivons : « C’est là une véritable interrogation et c’est là-dessus que doivent porter toutes les analyses et toutes les réflexions. Il y a aujourd’hui au moins deux (2) lignes.

1-plusieurs centaines de personnes sont emprisonnées à l’étranger et en Côte d’Ivoire. Les maisons et plantations de certaines personnes sont confisquées par des dirigeants du RDR et des hommes en arme. Des comptes en banque sont gelés. Certaines personnes sont interdites de sortir du territoire, beaucoup de nos compatriotes sont en exil… » Plusieurs centaines de personnes sont emprisonnées à l’extérieur? C’est bien la première fois qu’on apprend une telle chose.

Mais laissons Gbagbo ou l’auteur du document continuer à parler : « Devant un tel tableau, l’attitude du FPI doit être la lutte pacifique. Ce fut l’attitude du PDCI-RDA en 1945 et 1951, ce fut l’attitude du Fpi de 1982 à 2000.

2-l’autre ligne consiste à s’aplatir et à se soumettre sous prétexte que la soumission peut adoucir les cœurs de ceux qui sont en face. C’est se tromper que de penser que ce chemin-là peut amener la libération des prisonniers, le retour massif des exilés, la levée du gel des comptes bancaires, la restitution des maisons et des plantations à leurs propriétaires. Entre ces deux lignes, il faut choisir. Entre ces deux lignes, il faut choisir et la ligne de démarcation aujourd’hui au sein du FPI sépare ces deux lignes. Au lieu d’engager les débats sur cette question de fond, certains camarades et leurs alliés cherchent à nous distraire en évoquant des faits irréels et risibles… »

Evidemment, la première ligne est tenue par Gbagbo et la seconde, par Affi N’Guessan, le « traitre ».

« (…) d’autres questions ont été soulevées, mais, à mon âge et dans ma position, je ne répondrai pas à ces points-là. Camarades, prenons courage, gardons le regard rivé sur l’horizon… » Aurait écrit Laurent Gbagbo. On se demande bien pourquoi Gbagbo, prenant prétexte de son âge et de sa position, n’a pas souhaité répondre aux autres questions soulevées par ceux qu’il soupçonne de s’être aplatis. Justement, n’aurait-il pas mieux fait, à son âge et dans sa position, de mettre tout en oeuvre, puisque manifestement, depuis la CPI, il peut tout faire, pour rassembler les cadres de son parti autour d’un intérêt commun qui est la première ligne ? Quel est l’horizon qu’il invite ses camarades à scruter ? Le vide ? En quoi son élection à la tête du parti règlera les questions qui tiendraient à cœur les champions de la « ligne 1 » ? Son élection à la tête du parti fera rentrer immédiatement les milliers de ses partisans encore en exil ? C’est cela qui fera libérer les maisons encore occupées, c’est cela qui fera libérer ses partisans encore en prison ?

« On prenait Gbagbo pour un homme d’Etat, un rassembleur. On découvre qu’il se pose là en homme d’un clan, incapable de ramener l’ordre dans son parti autrement qu’en jouant sa propre carte. Ceux qu’il accuse d’être en train de vendre le parti au RDR, au pouvoir en place, une fois qu’il sera élu, il les videra du parti ? Son procès est prévu pour juillet 2015 et même si les choses se passent extrêmement rapidement, ce procès ne prendra pas fin avant au moins cinq ans. Que fera le FPI entretemps ? A attendre son retour ? On est sidéré nous, de voir qu’un parti à qui on attribue 46% de l’électorat ne soit pas capable de s’organiser, même en l’absence de son chef, pour défendre les intérêts des Ivoiriens face au régime en place et se contente de chanter le nom de Gbagbo. Ça vole vraiment trop bas comme stratégie politique. Tout ce qui compte pour Gbagbo et on est surpris de découvrir cela, c’est de tout mettre en oeuvre pour qu’il ne soit pas oublié. La Côte d’Ivoire peut cesser d’exister. Du moment qu’on chante son nom tous les jours, ça lui suffit ? Avec sa candidature qui accentue la crise dans son parti, il vient de brouiller son image dans l’esprit de ceux qui croyaient qu’ils avaient affaire à un homme capable de se mettre au-dessus de la mêlée, un homme d’Etat, un rassembleur. Mais on découvre un homme qui prend clairement position pour un camp dans une crise au sein de son parti. Il pousse son parti à abandonner l’opposition et à laisser le pouvoir faire tout ce qu’il veut. C’est incroyable, ce gâchis ». Explique un diplomate interrogé par « L’Eléphant » à Bassam, à l’occasion de la célébration du centenaire de cette ville devenue patrimoine universel de l’Unesco.

COMMENT AFFI N’GUESSAN HYPOTHEQUE SON AVENIR POLITIQUE

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A moins d’un miracle, Affi N’Guessan ne triomphera pas de Laurent Gbagbo au sortir du prochain Congrès. Et ce serait d’ailleurs pour lui, le moindre mal. Car, avec qui dirigera-t-il le parti s’il venait à gagner ? Quand on observe attentivement la liste des membres de l’équipe de campagne du candidat Gbagbo, on réalise que la quasi-totalité des cadres de ce parti a pris fait et cause pour Gbagbo et considèrent Affi N’Guessan comme un traitre. Et on imagine que jamais ils ne voudront travailler avec Affi N’Guessan et mettront tout en œuvre pour l’empêcher de gouverner le parti qui n’est plus d’ailleurs gouvernable en l’état actuel de la situation. Chacun sait aussi qu’une défaite de Gbagbo serait si désastreuse pour l’image de ce dernier que déjà, on peut imaginer ce qui va se passer. Gbagbo veut récupérer son parti et le diriger par procuration, il va récupérer son parti. Et après toutes les méchancetés qui lui ont été dites, on ne voit pas comment Affi N’Guessan pourrait lui-aussi, rester au FPI en cas de défaite. Considéré par Gbagbo lui-même, si on en s’en tient à la fameuse lettre qui a été lue par Koua Justin comme un traitre, que ferait-il encore dans ce parti ? Il ne lui restera plus qu’à partir et à créer probablement son parti à lui. Pour quel avenir politique ?

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si cela vaut vraiment la peine d’affronter Laurent Gbagbo qui veut récupérer son parti pour sa propre cause et qui, même étant en prison hors du pays, est prêt à tout pour atteindre cet objectif ? Car l’équation est simple. Gbagbo a choisi son camp. Il veut récupérer le parti, pas pour y ramener le calme, pas pour oeuvrer au rassemblement de tous autour de questions qui intéressent d’abord les militants en exil et en prison, et qui intéressent ensuite l’ensemble des Ivoiriens. Il veut juste récupérer le parti parce qu’il a choisi d’être avec ceux qui soupçonnent Affi et quelques autres d’avoir pactisé avec « le diable ». Quand un chef raisonne de cette manière, on peut être assuré qu’il est complètement déconnecté. «On détruit le parti ou on détruit le parti. » Voilà le slogan qui colle le mieux aujourd’hui au FPI. Quelle tragédie !

ALEX KASSY

Source: L’Eléphant déchaîné N°308 du mardi 9 au jeudi 11 décembre 2014