Le Front populaire ivoirien (Fpi) de l’ancien président Laurent Gbagbo, serait-il devenu un géant aux pieds d’argile dans le microcosme politique ivoirien? Tout porte à le croire depuis le 11 avril 2011, date à laquelle tout s’est effondré pour cette formation politique, avec la perte du pouvoir et surtout l’arrestation de son chef historique. Après une première traversée du désert avec l’incarcération de ses dirigeants, le parti à la rose, bien qu’ayant retrouvé son monde au niveau de la direction, dont son président Pascal Affi N’guessan, se fragilise de plus en plus. Nonobstant les annonces et déclarations toujours musclées de son comité central, de sa jeunesse et de ses femmes, contre le pouvoir en place, le Fpi se désagrège chaque jour un peu plus. Cela est d’autant vrai qu’en son sein, l’unité semble avoir foutu le camp pour faire place à la suspicion, au dénigrement et à des querelles de chapelle. Au niveau
des cadres du parti socialiste, après le départ de Mamadou Koulibaly (ex-N°2) qui a fondé Lider, pour cause de divergence d’option avec ses ex-camarades, les voix sont de plus en plus discordantes. Des personnalités comme l’ex-ministre Lazarre Koffi Koffi et d’autres cadres du Fpi en exil, ne cachent plus leur désamour à l’endroit d’Affi N’guessan et de ses collaborateurs dans la conduite actuelle des affaires du parti dont le siège provisoire se trouve à Cocody-Riviera-Attoban. C’est presque constamment que Lazarre Koffi, par exemple, s’attaque ouvertement aux prises de position de la direction du Fpi, à travers des déclarations dans la presse depuis le Ghana. Sur place en Côte d’Ivoire, des personnalités du Fpi rentrées d’exil, ne sont plus en odeur de sainteté avec les dirigeants actuels de leur formation politique. Elles sont l’objet de méfiance ou sont considérées comme des traîtres, pour avoir rencontré les autorités du pays, mais surtout, pour avoir annoncé qu’elles se rendent disponibles pour prendre une part active dans le processus de réconciliation. On peut citer entre autres, l’ex-directeur général du Port autonome d’Abidjan, Marcel Gossio, l’ancien ministre de la culture et de la francophonie, Koumoué Kouadio, et l’Ambassadeur et ex-directeur du Protocole de Laurent Gbagbo, Allou Eugène. Au niveau des jeunes du parti à la rose, tout n’est pas rose. En effet, Koua Justin, qui assurait l’intérim du secrétariat national à la jeunesse du Fpi, est ouvertement contesté à l’intérieur du parti par Serges Arnaud Dégré et ses camarades, qui ont créé un courant dénommé ”Fpi nouvelle vision”. Par ailleurs, avec le retour d’exil du secrétaire national à la jeunesse du Fpi (Jfpi), Konaté Navigué, des bruits de couloir entre celui-ci et l’intérimaire Koua Justin, se font entendre. En dehors de l’ex-parti présidentiel, des jeunes et des cadres proches de l’ex-président Laurent Gbagbo, qui sympathisaient avec le Fpi, ont pris leur distance de la direction de ce parti.
Les reproches
Parmi eux, les ex-ministres Mel Eg Théodore, Kabran Appia, et des jeunes comme Blé Sépé du Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (Cojep), et Zadi Djédjé de la coalition des jeunes patriotes pour la réconciliation (Cjppr). Le dernière cité est en passe de créer un parti politique qui n’est pas loin de narguer le Fpi. Ce parti devrait s’appeler le Front populaire uni (Fpu). En ce qui concerne la gent féminine du parti à la rose, son discours tranche quelquefois avec celui de la direction du parti. On se rappelle de la récente Assemblée générale de l’organisation des Femmes du Fpi (Offpi) à la résidence de l’ex-première Dame Simone Gbagbo, à Bonoua. La présidente de cette organisation et ses collaboratrices, s’étaient proposées de faire bouger le processus de réconciliation nationale malgré le fait que le comité central du Fpi s’en était ouvertement retiré après avoir cloué au pilori le président de la Commission dialogue, vérité, réconciliation (Cdvr). A tout cela, il faut ajouter, le bras de fer qui oppose le Fpi aux partis de l’opposition qui siègent au Cadre permanent de dialogue (Cpd, cadre de discussion gouvernement-opposition). Dans ce combat de leadership, le Fpi a initié la création de l’Alliance des Forces démocratiques avec d’autres formations politiques de l’opposition. Tous les opposants actuels à Affi N’guessan, susmentionnés, ont un dénominateur commun : Ils s’opposent au discours ”acerbe” et à la démarche du président du Fpi et ses hommes. Relativement à la démarche, certains leur reprochent de jouer leurs propres cartes dans la perspective des élections de 2015 tandis que d’autres estiment qu’ils bloquent le bon fonctionnement du Fpi avec des préalables notamment ”la libération de Laurent Gbagbo” détenu par la Cour pénale internationale (Cpi) à La Haye. A quelque 18 mois de la prochaine présidentielle, on peut affirmer que le parti de Laurent Gbagbo ne se porte pas bien.
BAMBA Idrissa
Source: Soir Info, du samedi 19 au lundi 21 avril 2014