Blé Goudé, le sacrifié des pro-Gbagbo

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(Le Point d’Abidjan – Jeudi 03 Avril 2014) – Le dernier Comité de contrôle du Fpi livre ses secrets. La direction de ce parti veut contraindre le gouvernement à réviser ses positions, sur des sujets qui fâchent. Entre autres le probable transfèrement de l’ex-première Dame à la Cpi. Tout cela, au détriment du tout nouveau pensionnaire de la prison de Scheveningen. Realpolitik oblige !

Ils avancent, le visage masqué. La montée d’adrénaline, sur le front politique ces derniers jours révèlent leurs secrets. Les frontistes entretiennent savamment la psychose, pour atteindre des buts inavoués. Face à la célérité avec laquelle le sort de Charles Blé Goudé a été scellé, Affi N’Guessan et ses camarades redoutent le cas Simone

Ehivet Gbagbo, en résidence surveillée à Odienné. Elle aussi, est sous mandat d’arrêt de la Cpi. Et si le Fpi a été pris de court, lorsque le gouvernement a décidé de livrer l’ancien harangueur des foules du régime Gbagbo, il veut se prémunir contre une quelconque surprise, s’agissant de l’ex première Dame. Aussi, les instances de décision de l’ancien parti au pouvoir monte-telles les enchères. Le communiqué élaboré à l’issu de la réunion du Comité central du 29 mars dernier, en dit long sur les visées frontistes. «Le Comité Central constate que par ‘’a justice à sens unique’’, ‘’la justice des vainqueurs’’ le pouvoir Ouattara poursuit sa sale guerre contre les patriotes et démocrates ivoiriens en se déployant au niveau international à travers la CPI. Ceux qui prônent la transition pacifique à la démocratie et qui ont pour slogan ‘’asseyons-nous et discutons’’ sont arrêtés, torturés, déportés à la CPI, pendant que ceux qui ont pris les armes contre la mère-patrie, commis les pires violations des droits de humains, endeuillé et divisé la nation, sont promus et célébrés », critique le Fpi. Certes le prétexte pour dénoncer les transfèrements à la Cpi, découle du départ de Blé Goudé à la Haye.

Blé Goudé sacrifié…

Mais à y voir de près, analysent de fins connaisseurs, il s’agit ici, de protéger Simone Gbagbo. Il n’empêche, un petit passage est réservé au fondateur du Cojep. «Le Comité Central considère le transfèrement du Ministre Charles Blé Goudé à la CPI, comme un acte supplémentaire de persécution des pro-Gbagbo, d’amplification des rancœurs accumulées, d’approfondissement de la fracture sociale, un coup de massue au processus de réconciliation nationale », souligne tout de même le Fpi. Mais vraisemblablement, Blé Goudé est sacrifié sur l’autel de la realpolitik frontiste. De fait, l’actuelle direction du Fpi craint d’être affaiblie, face aux militants, si la vice-présidente de leur parti venait à être livrée à son tour à la procureure Fatou Bensouda. Il faut donc aller vite, et les mises en garde et les accusations portées contre le gouvernement semblent la stratégie toute trouvée. Affi met ses troupes en ordre de bataille, pour contraindre le pouvoir à reconsidérer certaines de ses positions. Il est vrai, le ministre de la Justice, Gnénéma Coulibaly n’en finit pas de rassurer que Simone Gbagbo sera jugée par les juridictions nationales. Mais cela avait été dit aussi, pour Blé Goudé «un cas spécial» qui, sous la pression de l’Onu, est désormais détenu à la prison de Scheveningen. La hiérarchie du Fpi fait donc sien, l’adage qui veut que ‘’mieux vaut prévenir que guérir’’. Le parti de Gbagbo passe alors à la vitesse supérieure. Elle «appelle les populations ivoiriennes à la mobilisation et au sens républicain pour faire aboutir la lutte pour les libertés, la justice, la réconciliation et la paix ; engage instamment le Secrétariat Général à prendre toutes les dispositions en vue d’organiser dans les meilleurs délais et dans une logique de ripostes graduées, les grandes actions de masse; demande aux militants et sympathisants du FPI de rester vigilants et mobilisés, à l’écoute des mots d’ordre de la Direction du Parti pour des actions d’envergure futures ». L’ex parti présidentiel qui fait feu de tout bois dans son communiqué, prétend en outre que l’exécutif plombe le dialogue politique, en maintenant toujours « le gel des avoirs et des comptes bancaires des responsables de l’opposition, etc. »

La riposte du gouvernement

Là-dessus, l’exécutif prend le contre-pied des frontistes. Ce mercredi 2 avril, le gouvernement a confondu le Fpi, en proclamant publiquement le dégel des avoirs de nombreux pro Gbagbo. Une démarche qui met à mal les manœuvres de Pascal Affi N’Guessan, qui  a opté pour la politique de la chaise vide, à la table de négociations. Au sortir du Cadre permanent du dialogue avec l’ancien Premier ministre, Ahoussou Jeannot, avant-hier, Gervais Coulibaly s’est ainsi satisfait : «nous avons eu aussi un autre point qui nous a été fait par le ministre de la sécurité, relativement à toutes les questions de libération de prisonniers, de dégel des comptes dont on nous a appris que heureusement dans les jours à venir il y a des comptes qui seront dégelés. On nous a dit quels sont les critères qui avaient été retenus ». De larges concessions sont aussi faites, sur des questions qui divisent pouvoir et opposition. Il en va ainsi du financement des partis politiques, de la réforme de la Cei, et la liste électorale. De quoi doucher le Fpi, dont une très grande partie des exigences sont satisfaites, lui enlevant du coup, des motifs de protestations publiques. Reste que le destin de Simone Gbagbo passe par les actions annoncées…?

Guillaume Kouassi