A tous ceux qui sont favorables à Laurent Gbagbo ;
A tous ceux qui sont pour la Justice ;
A tous ceux qui sont pour la paix en Côte d’Ivoire,
… il faut être rassuré que la cause a été entendue et comprise. Il y a à poursuivre inlassablement le travail d’explications. Et pour cela, il faudra constamment trouver les bons termes pour communiquer. Pour se ressourcer, il est souvent utile de comparer » les situations judiciaires dans l’affaire Laurent Gbagbo c le Procureur ».
Le 29 novembre 2011, c’est un homme déjà condamné qu’on transportait à La Haye comme un vulgaire malfrat. Aujourd’hui, il entre dans la conscience collective que ce même monsieur a été injustement malmené, diabolisé et lynché à dessein. Il commence à être ancré dans la conscience collective que ce monsieur peut et doit être libéré au vu du droit et des faits. C’est donc graduellement que les lignes bougent.
Le conformisme ambiant d’hier fait place aujourd’hui à un délitement du camp de ceux qui ont inconsciemment ou consciemment consenti à jouer le jeu de la falsification de l’Histoire récente de la Côte d’Ivoire. En effet, les faits et le temps ont contribué à changer la façon de voir de nombre d’observateurs. Même » le Nouveau Réveil » journal du PDCI (RHDP) dans son édition du mardi 29 octobre a titré « Gbagbo libéré aujourd’hui ? « . Il y a environ 2 ans, une telle situation était inenvisageable. Cela confirme que les lignes ont considérablement bougé et la tendance s’est irréversiblement inversée en faveur de Laurent Gbagbo. Il faut en savoir gré les mobilisations de toutes parts (actions des Résistants sous diverses formes, initiatives d’explications, … et bien sûr le professionnalisme d’une défense à la hauteur des enjeux). Quand « le Patriote » titre « Le dictateur face aux juges ou Gbagbo doit rester en prison pour qu’il y ait la paix », il faut tout simplement se rendre compte que ceux qui ont travaillé à propager la haine en Côte d’Ivoire, pleurnichent parce que l’histoire les rattrapera d’une façon ou d’une autre, un jour ou l’autre.
Dans un pays comme la Côte d’Ivoire, il est illusoire de penser que le tribalisme et l’agitation « du chiffon » de la peur peuvent être la base d’un mode de gouvernance. En revisitant le passé de ce pays, depuis peu avant et à l’aube des indépendances, on peut comprendre que les excès et les dérives du monopartisme ont forcément une certaine durée de vie. Cette durée peut être longue ou courte selon la nature de son support. Mais il faut intégrer que le faux finit inéluctablement par tomber, d’autant plus qu’inévitablement, la vérité triomphe au bout du compte sur les assauts des ténèbres. Même si la plutocratie obère la vie politique, il convient de se ressaisir pour épouser ne serait-ce qu’un brin de réalisme. Ceux qui sont au pouvoir en Côte d’Ivoire doivent comprendre que les crédules de leurs thèses insensées, ont déserté les rangs du cadre sectaire qu’ils ont cultivé. La procuration que les cadres du RDR – et ceux du RHDP qui les ont suivis par « instinct mangeocratique » – se sont octroyée, est illégitime. Car on ne peut pas diriger un pays entier en soutenant de travailler pour une partie de la population contre une autre. Les dirigeants d’un peuple doivent rassembler et travailler à la cohésion nationale. Ce qui est vrai à ce propos est que Laurent Gbagbo est ancré chez les Akan (Attié, Ebrié, Agni, Abbè, …), chez les Dan (Guéré, Yacouba, …) ; chez les Krou (Bété, Gagou, Gouro, …) ; chez les Tagbana et chez les Malinké ; … Ce Monsieur qui croit fermement en la démocratie a compris très tôt qu’on ne peut s’enfermer pas dans une seule ethnie (la Côte d’Ivoire en comptant plus d’une soixantaine). C’est cette façon démocratique de voir les choses qui vaut légitimement à Laurent Gbagbo sa popularité. Cette réalité prenante est un facteur déterminant qui ne saurait passer pour pertes et profits dans la résolution de la crise actuelle. Les tenants du pouvoir s’efforcent de montrer la crise comme un artifice alors que celle-ci reste profonde. Et nous continuons d’assister injustement en Côte d’Ivoire à la gouvernance – à tous les postes qu’ils soient institutionnels ou administratifs – des Ali, des Touré, des Moussa, des Sidibé, des Traoré …, des Ouattara ; ceci teinté de quelques Kouassi et Koffi pour tenter de diluer le choc provoqué par ce tribalisme exacerbé. Laurent Gbagbo est un démocrate; cela n’est pas un slogan ou le délire de fanatiques invertébrés. C’est tout simplement une réalité en Côte d’Ivoire.
Ceux qui déversent la haine sur Laurent Gbagbo à commencer par ces « écrétins » qui écrivent et titrent avec du délire ahurissant dans « le Patriote », doivent tout simplement reconnaître que du temps de Gbagbo, les journalistes n’étaient pas pourchassés; du temps de Gbagbo, qui le veut, pouvait entrer et sortir de la Côte d’Ivoire; du temps de Gbagbo, les gens allaient s’amuser et pouvaient rentrer tard le soir de maquis ou de restaurants … Du temps de Gbagbo, les partis politiques recevaient leur financement public sans autre procès ; du temps de Gbagbo, la Constitution était respectée pour faire jouer la démocratie : « … Aucun Ivoirien ne doit être contraint à l’exil … ». Tout le cursus militant de Gbagbo met en avant le respect que cet homme a de l’autre même s’il ne partage pas les mêmes approches des questions sociétales. Ceux qui ont refusé de cultiver la raison pour se professionnaliser dans la semence de la haine et la propagation du faux, ne sauront éternellement prospérer sur l’ignorance de quelques partisans dont la plupart a commencé depuis à déchanter. Les élans fascistes et totalitaires du RDR ne conviennent pas à un pays comme la Côte d’Ivoire dont la cohésion doit se reconstruire absolument sur le socle du vivre ensemble. La structure sociologique de ce pays impose que la raison revienne chez les imposteurs. Nous devons retenir que tout le monde s’attend à ce que Laurent Gbagbo recouvre la liberté. Son camp n’est pas dans la haine. Son bord n’est pas dans un esprit de vengeance; son camp a l’habitude du débat public. Cela est tant au passif qu’à l’actif de Gbagbo. Il est incontestable que l’impunité, le sort des victimes ..., il faut en parler; mais cela doit se faire avec toute la sérénité qui convient. Agiter du « chiffon rouge » et semer le spectre de la peur à l’approche de chaque audience de Laurent Gbagbo est non seulement digne de procédé fascisant mais est indigne de personnes qui disent travailler pour la destinée d’un peuple. La réalité est que les violations constantes des droits de l’Homme par Ouattara lui ont fait perdre ses soutiens politiques. Ouattara est aujourd’hui plus qu’hier entre les mains d’affairistes qui comptent les profits en fermant les yeux sur la corruption. L’indignation face aux méthodes brutales qui ont traumatisé le peuple de Côte d’Ivoire était la racine d’une forte émotion. Nos pratiques dans l’explication doivent plus être aujourd’hui dans la persuasion de ceux qui se sont laissés manipulés par les campagnes éhontées et l’emballement médiatique. Nous devons rassurer politiques et affairistes d’une part et, attirer davantage l’attention des défenseurs des Droits de l’Homme sur la nécessité d’aller absolument vers la paix pour que ce pays se relève dans l’effectivité. Il est inadmissible que des filles et fils de ce pays soient tenus en exil malgré eux.
D’autre part, il importe de noter que dans la plupart des arrêts si ce n’est tous – directement ou implicitement –, la juge unique a abondé de façon récurrente dans le sens d’accabler Gbagbo sur sa popularité. Il est plutôt judicieux de tenir compte de cette popularité de Laurent Gbagbo pour aider à la paix. Sur cette ligne, il convient de souligner également qu’aucun dictateur, aucun criminel n’est populaire dans l’ère que nous vivons. Qui plus est, le délit de popularité n’est pas inscrit dans le code pénal. L’imposture qui est aujourd’hui patente crée un véritable malaise qu’il faudrait travailler à dissiper.
Le monde des affaires doit intégrer le fait qu’il aura plus intérêt à travailler dans un pays sécurisé et stable que dans un espace qui connaît des remous épisodiques. Nous pouvons comprendre la peur de Ouattara qui est allé trop loin dans l’horreur. C’est au nom de cette peur qu’il a créée qu’il doit résolument poser les jalons viables d’un climat de confiance. Ce qui est vrai et Ouattara est bien placé pour le savoir, c’est que Laurent Gbagbo n’est pas un rancunier.
Et puisque les mécontentements s’additionnent à cause des effets de la politique en place, nourrie d’une logique « de la fuite en avant », le pouvoir devrait gagner en sagesse. Car la tenue en haleine d’un peuple a ses limites. Il serait judicieux que Ouattara s’accorde avec la raison pour aller franchement à la paix au lieu de chercher à gagner du temps. A défaut de comprendre ce peuple dont la patience va arriver à bout, les Ivoiriens, ayant le sentiment qu’on ne leur donne pas d’autres choix, se résoudront à initialiser le compteur des semaines qu’il reste au pouvoir Ouattara de vivre. Pour l’intérêt du peuple, la posture politique doit guider instamment tous les pas des responsables – qu’ils soient politiques, associatifs ou syndicaux – dans l’espace public. Les effets d’un raz le bol étant souvent imprévisibles, il convient de sortir du jeu malsain qui empoisonne la vie du peuple de Côte d’Ivoire. Personne ne peut nier aujourd’hui que des millions d’Ivoiriens veulent la libération de Laurent Gbagbo, véritable gage pour le retour de la paix en Côte d’Ivoire. La libération de Laurent Gbagbo contribuera sans fard à la réconciliation nationale. Il faut adhérer à cette réalité incontournable.
Dr Claude Koudou, Analyste politique ; Membre de la Coordination des Intellectuels africains et des Diasporas africaines
Source : Connectionivoirienne.net