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Le général Poncet, ex-commandant de la Force Licorne

(Notre Voie, 29 octobre 2013) – Le dossier intitulé « Et si Gbagbo était libéré» de Jeune Afrique de la semaine en cours a ceci d’intéressant qu’il met totalement et définitivement à nu le complot politique diligenté par la France droitière dont Gbagbo est victime. En principe, après les aveux des généraux français, le président Gbagbo doit immédiatement être libéré. 

«Je pense qu’il y avait un projet politique qui était celui de mettre Ouattara en place et de dégommer Gbagbo, qui est un homme intelligent, cultivé, fin, qui a traversé beaucoup de crises et qui, au fond de lui-même, aime la France. Je suis convaincu que Gbagbo n’a pas voulu tuer des soldats français et que quelqu’un de son entourage a pris cette décision sans le dire à Gbagbo… Je pense que la mouvance Gbagbo est tombée dans un piège». Celui qui s’exprime ainsi n’est pas un Ivoirien, encore moins un pro-Gbagbo. C’est un général de l’armée française. Et pas n’importe lequel, il était l’adjoint du général Poncet, qui, lui, était le patron de l’Onuci. Il s’agit du général Renaud Alziari de Malaussène. Ce général français était surtout le commandant de la force Licorne. Il a tenu ces propos rapportés par Jeune Afrique dans le cadre d’une enquête ouverte par la juge Sabine Kheris du tribunal des grandes instances de Paris sur le prétendu bombardement du camp militaire français dénommé «Descartes» de Bouaké en 2004 par l’armée ivoirienne.

Pour mémoire, après deux ans passé à parcourir le monde à la recherche d’une sortie pacifique de la crise et face au refus manifeste de la rébellion d’entrer dans cette voie malgré une loi d’amnistie prise en sa faveur pour la rassurer, l’Etat de Côte d’ivoire décide de libérer la partie de son territoire occupée dans le cadre de ce qu’on a appelé «l’Opération Dignité». Et ce, après en avoir informé le président français d’alors, Jacques Chirac, et obtenu son accord. En moins de 48 h, l’aviation ivoirienne avait pratiquement décimé la rébellion et il ne restait plus qu’à envoyer les troupes terrestres pour faire le ratissage quand, le 6 novembre, face à la déroute de ses filleuls de rebelles, et prétextant d’un bombardement d’une base militaire française à Bouaké qui aurait occasionné la mort de 9 militaires français et un civil américain, Chirac ordonne la destruction de la flotte aérienne ivoirienne pourtant au sol à Yamoussoukro et à Abidjan. Le même jour, et alors même que le peuple ivoirien était sous le choc, une colonne de plus de 50 chars français est surprise faisant mouvement vers la résidence officielle du chef de l’Etat à Cocody. Alerté par leur leader Charles Blé Goudé, les jeunes patriotes ont dû spontanément constituer un bouclier humain autour de la résidence du président Gbagbo, contraignant les chars français à se cantonner à l’Hôtel Ivoire. La suite, on la connait. Les militaires français ont ouvert le feu sur les jeunes aux mains nues, faisant plusieurs morts et un nombre impressionnant de blessés.

Aujourd’hui, 9 ans après, le général français qui dirigeait à cette époque la force Licorne de l’armée française stationnée en Côte d’Ivoire affirme que la prétendue attaque du camp militaire de Bouaké n’était en réalité qu’un complot contre Gbagbo, dans la cadre d’un «projet politique qui était celui de mettre Ouattara en place et de dégommer Gbagbo…».

En réalité, rien ne nous surprend. Car le complot est la thèse que nous avons défendue depuis toujours. Mais tant que c’était nous qui le disions, on pouvait nous taxer de pro-Gbagbo et en douter. Mais quand c’est un des généraux français chargé d’exécuter le complot qui le dit, il n’y a plus de place au moindre doute. Pour accréditer la thèse du complot, le général Renaud Alziari se demande pourquoi les pilotes des Sukhoï qui étaient censés avoir bombardé le camp français avaient été remis en liberté alors qu’ils avaient été arrêtés à Lomé, au Togo. Ces pilotes biolorusses avaient été libérés à la demande de la ministre Michèle Alliot-Marie, à l’époque ministre française de la Défense.

Autre fait important constitutif du complot politique, le général Bentegéat, chef d’Etat major des armées françaises de l’époque, déclare n’avoir pas été associé au conseil restreint de l’Elysée qui a décidé de la destruction de la flotte militaire ivoirienne. Et pourtant, indique le général Emmanuel Beth, qui a été lui aussi commandant de la force Licorne après le général Renaud Alziari, la Constitution prescrit qu’en «cas de crise, le chef d’Etat-major participe au conseil restreint pour répondre aux questions relatives à la sécurité ». Pourquoi donc Chirac et Alliot-Marie ont-ils écarté le chef d’Etat-major pour la tenue du conseil restreint ? L’absence de ce dernier à ce conseil accrédite une fois de plus la thèse du complot politique.

Maintenant que la France elle-même reconnaît avoir fait un coup d’Etat contre Gbagbo, et étant entendu que la crise postélectorale n’est que l’aboutissement de ce complot politique, le président Gbagbo doit être immédiatement remis en liberté. Si la Cpi ne remet pas aussitôt le président en liberté, c’est qu’elle se fait complice de ce complot honteux de la France droitière.

On se souvient que c’est le président burkinabè Blaise Compaoré qui a dit le premier, en 2004, que le président ivoirien irait à la Cpi. A sa suite, Jacques Chirac avait, la même année, proféré les mêmes menaces à l’endroit de Laurent Gbagbo.

Qui ne se souvient enfin des menaces intempestives de Sarkozy contre le couple Gbagbo pendant la crise postélectorale ? Lui qui disait : «Gbagbo a trois jours pour quitter le pouvoir. Sinon sa femme et lui iront à la Cpi». Que dire alors des bombardements de la résidence du président Gbagbo pendant la crise postélectorale par l’aviation de l’armée française ? Tous ces faits corroborent la thèse du complot dans le cadre de ce qui était «un projet pour mettre Ouattara en place et dégommer Gbagbo» et qui est devenu réalité le 11 avril 2011, ce qui a été dénoncé par le général Renaud Alziari.

Boga Sivori

bogasivo@yahoo.fr