(TAFNEWS) – M. Anaky Kobéna, président du Mouvement des Forces d’Avenir(MFA), s’est ouvert à TAFNEWS pour parler de son parti qui prépare sa rentrée politique, mais aussi pour dire des vérités crues sur l’actualité politique nationale. Interview.
M. Le Président, nous apprenons que ce samedi 31 août 2013, votre parti, le Mouvement des Forces d’Avenir (MFA), fait sa rentrée politique à l’hotel Pullman au Plateau, sur le thème : « Côte d’ivoire aujourd’hui ; les vrais enjeux », pourquoi cette manifestation en ce moment précis, et surtout que vise ce thème ?
Anaky Kobéna : On peut dire que depuis Novembre 2010, date de la dernière présidentielle, et surtout depuis le 11 avril 2011 qui a vu l’arrestation de Gbagbo et de sa suite rapprochée, nous sommes à presque 3 ans, sinon à presque 30 mois du pouvoir effectif de ALASSANE Ouattara, Président de la République. Il est partout de coutume, en politique, qu’à mi-mandat, on fasse un état des lieux, voir ce qui a été réalisé, et ce qui n’a pas pu l’être ou, qui reste encore à faire.
Il est donc normal que le MFA, parti signataire de l’accord constitutif du RHDP, se prononce sur toutes ces questions, d’autant plus que l’annonce par le Chef de l’Etat lui-même, ALASSANE Ouattara, de sa candidature aux Présidentielles de 2015 pour un second mandat, interpelle forcement toute la classe politique Ivoirienne, la société Civile et toute la population. Et je ne crois pas me tromper en pensant que la zone de turbulence que traverse en ce moment le PDCI-RDA, le principale allié du RDR au RHDP, est grandement tributaire de cette annonce de candidature bien avant l’heure.
Depuis la constitution des divers gouvernements sous Alassane Ouattara, il est flagrant que votre parti, le MFA, est officiellement tenu à l’écart, y compris vous-même monsieur ANAKY, président du Parti et une des fortes voix du RHDP depuis sa constitution en 2005 ; On vous voyait nommer à une présidence d’Institution, mais vous n’avez été annoncé à ce jour nulle part. Que se passe-t-il ? Qu’est ce qui est reproché au MFA ou à ANAKY ?
Tout ce que vous venez de dire est exact, aussi incroyable que cela puisse paraitre, et le nier serait vain – mais si la Côte d’ivoire veut comprendre, le MFA et ANAKY lui-même peuvent dire aux ivoiriens qu’à ce jour, aucune raison ne leur a été donnée concernant ce traitement discriminatoire et fondamentalement injuste ; Bien au contraire, toutes les fois qu’ALASSANE Ouattara et KONAN Bédié, Président du RHDP et “caution morale” du régime, ont été approchés à ce sujet, ils ont juré avec la main sur le cœur, que c’était une situation anormale qui serait corrigée dans les plus brefs délais – ALASSANE Ouattara lui-même s’est fendu du même couplet en direct à la télévision, lors de l’escale de Koun-Fao de sa tournée dans le Zanzan le jeudi 29 novembre 2012. Mais en fait, au niveau du bureau politique du MFA, dès que nous avons été mis à l’écart dès la constitution du 1er Gouvernement, nous avons compris que la rupture était nette et définitive pour Bédié et Ouattara. Notre seul regret à été et demeure qu’on n’ait pas daigné, ou eu le courage, de nous dire exactement où se trouvait le problème. Nous visons volontairement le tandem Ouattara-Bédié ou Bédié-Ouattara car il nous semble évident que Bédié est forcément partant ou partie prenante en cette affaire – Les récentes révélations de Djédjé Mady quant à son sort – assez similaire – le confirment.
Dans ces conditions, le MFA peut-il être considéré comme membre de l’Alliance politique RHDP au pouvoir ou comme parti d’opposition ?
Pour nous, au MFA, qui revendiquons avoir été parmi les concepteurs du RHDP, nous pensons désormais qu’il y a certes le RHDP originel qui continue d’exister par son idéal et ses principes, mais qu’il y a à l’intérieur un RHDP de la mauvaise foi et de l’égoïsme politique, presque un RHDP de la sorcellerie noire qui s’est imposé dès la mise en place de ce pouvoir en Avril 2011. Ce RHDP est uniquement composé de Ouattara et Bédié, et peut être même pas forcement avec leurs partis politiques respectifs. Le MFA a eu même la chance d’être rejeté dès le départ par ce monstre à deux tête, et s’il demeure membre du RHDP, c’est en attendant qu’un jour, cette belle et unique alliance politique, qui devrait tracer les sillons de la Cote d’Ivoire nouvelle, en s’ouvrant d’ailleurs aux autres forces politiques et à la société Civile – se retrouve, reprenne son bâton de pèlerin et mène sa lutte politique qui ne se bornait pas – mais alors pas du tout – à l’éjection de Laurent Gbagbo du Pouvoir.
Le MFA et ANAKY sont-ils aujourd’hui du côté du pouvoir ou de l’opposition ?
Le MFA demeure membre du RHDP qu’il a contribué à créer, mais se démarque totalement du pouvoir actuel et de la Dyarchie Ado-Bédié. Nous ne pouvons pas être comptables d’une chose à laquelle nous ne sommes pas partie prenante. A la limite même, puisque nous avons affaire à un duo ADO-Bédié, je ne sais même pas si le PDCI et l’UDPCI, bien qu’y ayant des ministres, ne seraient pas en réalité des partis dans l’opposition qui l’ignorent ou ne l’ont pas encore réalisé. Les débats à l’Assemblée Nationale sur les sujets sensibles ne me donnent pas tort.
En juin 2013, à Paris, au sortir de la remise du Prix UNESCO-HB, vous avez déclaré à un confrère que Laurent Gbagbo allait s’en sortir – Qu’est ce qui fonde votre optimisme ?
On a beaucoup spéculé sur cette interview qu’en fait très peu de personnes ont lue ou visualisé. J’ai dit que je souhaitais à Laurent Gbagbo – qui est un frère ivoirien et un frère de lutte politique puisque nous étions ensemble au départ du FPI – qu’il garde courage et foi en son destin, puisque ce n’est pas la première épreuve ni la première prison qu’il connait. Là où il se trouve, spéculer ou ergoter sur sa décennie de pouvoir ou de gouvernance ne compte pas beaucoup, sinon pour les historiens ou pour l’édification de ceux qui auront à diriger ce pays. Ne retenons pour l’heure que l’homme, l’être humain, et que le Seigneur l’ait en miséricorde !
Le MFA est-il favorable à une candidature unique à la présidentielle pour le RHDP en 2015 ?
De quel RHDP pouvons-nous parler aujourd’hui ? De l’Alliance politique conclue en 2005 à Paris ou de l’hydre bicéphale ADO-Bédié d’aujourd’hui ? Je ne sais pas si nous pourrons retrouver le vrai RHDP – Houphouëtiste dans l’esprit et la vision – d’ici 2015 ; sinon, le MFA abordera les élections – présidentielles et générales – en allant vendre son projet de société aux ivoiriens, et en restant ouvert à toute entente avec des forces politiques partageant ses préoccupations pour la Cote d’ivoire et son peuple.
Monsieur le président, quel est votre avis sur les lois sur la Nationalité et le Foncier Rural adoptées la semaine dernière par les députés?
Une loi n’est pas un commandement qui tombe du ciel par une volonté divine, mais une décision prise à un moment donné par les représentants d’une population par rapport à une situation donnée. La Nationalité et le Foncier Rural, fondamentalement liés en Côte d’Ivoire en raison de la forte immigration Ouest africaine qui est majoritaire comme force de travail en zone rurale, sont des problèmes qu’il ne convenait pas d’aborder dans l’urgence de notre sortie de crise ivoirienne. Si cela a été adopté de toute évidence contre la majorité du PDCI, contre le FPI absent du parlement – par des Députés RDR qui n’ont pas eu le refuge du vote à bulletin secret, il y a lieu de se demander si, au lieu de résoudre un grand problème existant, l’on ne trace pas la voie à des situations conflictuelles apocalyptiques.
Réalisée par Charles TRA BI