« Le RHDP est une idéologie qui lutte, de façon constante, pour améliorer les conditions de vie des populations. Une idéologie qui accepte la transparence, la bonne gestion des ressources publiques. »

Honorable Konaté Vassiriki, député de Séguélon / Photo ◎ Roger Kassi

Situé à 900 km d’Abidjan, le district du Denguélé compte deux régions, le Folon et le Kabadougou. À ce jour, ces collectivités font face à des défis divers, en matière de développement. Dans un entretien accordé à notre rédaction, le jeudi 8 juin 2023, à Abidjan, Cocody, l’honorable Konaté Vassiriki dévoile les facteurs à l’origine du retard constaté. Il met surtout l’accent sur les dispositions qui s’imposent, dans la perspective des élections municipales et régionales du 2 septembre 2023.    

Bonjour honorable ! C’est un honneur pour nous de nous entretenir avec vous. Mais avant tout, que pouvons-nous retenir de vous à l’état civil ?

Bonjour ! Je suis l’honorable Konaté Vassiriki, député de la nation, précisément de Séguélon. Secrétaire de la Commission des Affaires économiques et financières.

Honorable, nous sommes là pour chercher à comprendre les réalités du district du Denguélé. Mais avant, pouvons-nous en avoir un aperçu, en termes de présentation ?

Le district comprend deux régions. Celle du Folon, qui a deux départements, Minignan et Kaniasso, avec 88 villages. Il y a aussi la région du Kabadougou, divisée en cinq départements, Gbéléban, Madinani, Odienné, Samatiguila et Séguélon, avec 235 villages.

Acquis à 99 % au RHDP, le Denguélé se sent un peu frustré, parce que depuis l’arrivée du président de la République, toutes les régions sont pratiquement en chantier, sauf celles de notre district. Nous avons un leader politique, qui n’est plus d’actualité, mais qui s’accroche.

Honorable, à l’heure actuelle, quelles sont les réalités que vit le district, en termes de développement ?

J’avoue que le Denguélé accuse un très grand retard par rapport à l’ensemble du pays. En termes d’infrastructures, nous devions avoir une université, mais qui est en chantier. Il y a aussi un certain nombre de travaux inscrits dans le PND, mais qui n’ont pas encore démarré. Franchement, au niveau des routes, c’est catastrophique. Les centres de santé laissent à désirer. Il n’y a pas suffisamment d’écoles.

C’est pourtant un peuple qui se trouve dans une position assez critique. Le Denguélé fait frontière avec le Mali et la Guinée, deux pays qui ne sont pas stables. Les populations sont dans une paupérisation quasi-totale, puisque le coton n’a pas donné les résultats escomptés. L’anacarde, l’une des cultures de rentes, reste invendu à ce jour.

Que devraient être les rôles des premières autorités locales ?

Moi-même, je me suis posé un certain nombre de questions. J’ai vu que le Denguélé était vraiment en retard. J’ai donc cherché à comprendre quelle en était la raison. J’ai entrepris un contrôle citoyen. C’est-à-dire que j’ai publié tous les budgets, de 2013 à 2023, de chacune des communes, des régions, avec tous les détails des projets qui y étaient inscrits.

La région du Folon, c’est environ 14 milliards 500 millions de F CFA de budget alloué. Dans le Kabadougou, c’est à peu près 15 milliards de F CFA.

Mais à notre grande surprise, nous avons constaté que bon nombre de projets financés n’existent même pas sur le terrain. Il est vrai que l’Etat n’a pas encore donné le coup de pouce nécessaire. Mais les dirigeants politiques actuels du Denguélé, notamment celles des collectivités territoriales, sont beaucoup responsables du retard. Les ressources que l’Etat a affectées, pour améliorer les conditions de vie des populations, ne sont pas arrivées.

Face à ces situations, quelles sont les actions à entreprendre ?

Nous pensons qu’il est bon de changer ces gérants des collectivités. Il convient de penser à d’autres personnes, plus ambitieuses et amoureuses véritablement de nos régions. Mais à notre grande surprise, malgré tous ces dérapages financiers, ces gens ont été systématiquement reconduits par le RHDP. Nous avons dit que certes ils ont été désignés par le parti, mais ils n’en font pas partie.

En effet, le RHDP est une idéologie qui lutte, de façon constante, pour améliorer les conditions de vie des populations. Une idéologie qui accepte la transparence, la bonne gestion des ressources publiques. Mais des gens qui font des détournements tout azimut, des dénis d’initié, les reconduire n’est pas acceptable. Les populations, dans leur grande majorité, vont se prononcer. Le parti comprendra alors qu’il y aura des candidats qui seront élus, mais pas ceux qu’ils ont désignés.

Parlant du développement du district, quelles sont les actions prioritaires ?

Au niveau du PND, il y a des projets qui n’ont pas été achevés. Il faut que l’État fasse sa part. Les PND sont des projets structurants, qui interviennent dans plusieurs domaines en même temps. Quand ils sont exécutés, il est plus facile de faire avancer nos régions.

Le ministère du Plan a fait les pôles économiques compétitifs, pour voir dans chaque région son potentiel en matière de développement. Les activités ont été clairement identifiées, dans les régions du Folon et du Kabadougou, pour permettre aux populations de sortir de cette pauvreté qui devient suicidaire.

Il y a un certain nombre de voies qui doivent être bitumées. La route précède le développement, dit-on. Ensuite, il conviendra d’amorcer une stratégie économique, qui permette au Denguélé de pérenniser ses acquis. Dans ce contexte, il serait intéressant de s’appuyer sur l’agriculture et l’élevage, qui sont des éléments essentiels. Si nous arrivons à transformer nos matières premières, comme indiqué dans le plan du président de la République, cela permettra au district d’enregistrer une avancée significative.

Le drame agricole auquel nous sommes aujourd’hui confrontés sur l’anacarde et le coton résulte du fait qu’on ne transforme rien dans le Denguélé. Si on les transformait en produits finis, ça serait une très bonne chose. Le développement en question doit se baser sur l’agro-industrie, l’agriculture, pour avoir une base solide et permettre au Denguélé d’avancer.

Face à ces difficultés, les jeunes sont-ils de fois tentés d’aller à l’aventure vers d’autres régions ?

C’est une réalité que la Côte d’Ivoire vit depuis bien avant les indépendances. Il y a ce flux migratoire qui part du Nord vers le Sud. Aujourd’hui, les gens du Nord ont une culture de rente, l’anacarde, qui permet de retenir les populations sur place, s’intéresser aux vivriers. Le Denguélé n’est pas une zone de savane. On y enregistre la même pluviométrie qu’à Daloa. C’est une région très riche, avec des cours d’eau un peu partout.

Ce potentiel doit être exploité, pour permettre aux jeunes de rester, moderniser l’agriculture. Mais si la pauvreté s’accentue, le niveau de vie ne s’améliore pas, les ressources destinées à améliorer les conditions de vie, en termes de santé, d’éducation n’existent pas, les gens iront là où ils se sentent bien.

Au niveau des femmes, dans ce projet d’émergence, qu’est-ce qui doit être fait ?

Traditionnellement, les femmes sont les plus vaillantes de nos communautés. Non seulement, elles s’intéressent aux cultures vivrières, pour nourrir l’ensemble des populations. Elles sont essentielles à nos sociétés, même dans la transformation de l’anacarde.

Si l’on veut leur octroyer des fonds, pour soutenir leur autonomisation, il va falloir les former, ne serait-ce que sur les fondamentaux de la gestion des ressources. Les amener à savoir qu’il y a des risques dans l’octroi des fonds, être capables de rembourser.

Revenons à votre parcours politique. Comment s’est faite votre entrée sur la scène ?

Ce n’était pas ma vocation. Je ne pensais même pas un jour faire de la politique.  Mais j’y ai été contraint. Ma dignité était mise à rude épreuve. Il me fallait relever ce défi. J’ai été candidat indépendant en 2016, dans ma circonscription. En 2021, le RHDP a souhaité que je défende ses couleurs.

Dites-nous un peu plus sur cette affaire ! Quel a été le secret de votre victoire ?

La politique, c’est une construction rationnelle. Il faut savoir ce qu’on veut. Quand j’étais dans les banque et assurance, je pensais à ma communauté. Je faisais ce que je pouvais, sans arrière-pensée. Mais je n’étais pas intéressé par la politique.   Jusqu’à ce qu’on m’invite à être suppléant d’un candidat RHDP. A la dernière minute, on me retire de la liste, sous prétexte que je ne remplissais pas les conditions. On m’a qualifié de tout, sauf de ce que je suis. Ma dignité étant ainsi en jeu. Il fallait la défendre, avec le soutien des parents. J’ai finalement battu le candidat du RHDP, qui n’a même pas obtenu 25 % des voix.

Quand vous êtes député, porte-parole d’un peuple, vous devez critiquer les dysfonctionnements, éveiller les populations, attirer leurs attentions sur les dangers qui les guettent. Vous devez, en un mot, être un avant-gardiste, pour les protéger.

Honorable, les élections municipales et régionales sont prévues pour le 2 septembre 2023. Dans ce projet d’émergence du Denguélé, que doit être le profil idéal du candidat qu’il faut ?

Pour faire la politique dans une région, il faut avoir les moyens. Le candidat ne doit pas être dans le besoin, pour être tenté de ne penser qu’à remplir ses poches. Il faut donner cette chance à ceux qui ont un peu de moyens, pour aider les populations. Il ne faut plus aujourd’hui confier la politique, le destin des peuples à n’importe qui. On n’a déjà vécu une expérience catastrophique. Comment comprendre que des gens décaissent de l’argent, pour construire un centre de santé, acquérir des matériels pour ledit centre, mais en fin de compte, ni le centre de santé, ni les matériels n’existent.

Comment comprendre que des gens font des hangars de 4 m² et disent que ça fait 27 millions de F CFA. Comment comprendre que trois salles de classes, avec un bureau, font 24 millions de F CFA. Comment comprendre que des gens disent qu’ils ont construit des logements sociaux qui n’existent pas ? Comment comprendre qu’ils disent avoir fait des routes qui n’existent pas ? Comment comprendre qu’ils prétendent avoir construit des maternités qui n’existent pas ? Comment comprendre qu’ils soutiennent avoir réalisé des centres de dialyse qui n’existent pas ? Alors que ces réalisations sont censées aider à améliorer les conditions de vie des populations.

Même les écoles, qui sont fondamentales dans l’éducation des populations, leur donner des connaissances, on détourne les fonds destinés à leur réalisation. Comment comprendre que les gens détournent les fonds destinés à réaliser des dispensaires, des maternités dans les quartiers, pour soutenir l’épanouissement des femmes, faciliter leurs accouchements ?

Vous vous souciez du destin des populations. Elles comptent sur vous. Donc par rapport à ces élections, peut-on savoir si vous serez candidat ?

Je veux qu’il y ait des groupes, des gens avec qui s’asseoir, pour s’entendre, afin de dégager le meilleur profil. Moi, je joue actuellement mon rôle de député. Celui d’éveiller les consciences, de s’opposer. Même s’il s’agit de mon parti, le RHDP, qui fait un choix hasardeux, à risque, avec des éléments toxiques, je vais les combattre.

D’ailleurs, le RHDP, c’est pour le bien-être des populations. Et celui qui fait le malheur des populations, hors RHDP, ou qui ne suit pas la doctrine que le président Alassane Ouattara nous a enseignée, je le combattrai. Maintenant, si au cours de ce cheminement, je suis sollicité, pour défendre les couleurs, je porterai bien sûr le maillot, pour protéger les intérêts des parents, qui sont très utiles pour moi.

Dans ce combat que vous projetez, avez-vous des actions concrètes en perspective ?

Ah ! Oui ! J’anticipe toujours. Le problème central des gens, c’est qu’ils veulent quelque chose. Mais ils ne savent pas ce qu’ils vont en faire, une fois qu’ils l’ont obtenu. La plupart des échecs vient de là. Moi, si je suis candidat au Conseil régional, par exemple, voire à une mairie quelconque, j’aurai besoin d’un programme structurant que je vais déployer, pour le bien-être des populations.

Ça ne sera pas quelqu’un qui va venir se chercher et partir. Il faut plutôt un candidat qui a un projet clair, bancable, capable de mobiliser des financements extérieurs, pour apporter aux parents. Si je suis candidat, c’est que j’ai la solution.

Parlant des problèmes urgents auxquels il faut faire face, qu’est-ce qui est prévu au niveau de la jeunesse ?

La jeunesse a une place significative. La jeunesse du Denguélé est en difficultés. Il faut donc faire très attention à ce sujet. J’ai dit tantôt que nous faisons frontière avec le Mali et la Guinée, deux pays instables, où le djihadisme prospère. Nous partageons même une bonne partie de notre frontière avec le Mali. Si on n’y prend garde, je ne le souhaite pas, demain, personne ne pourra y avoir accès. Si la jeunesse est désœuvrée, à la portée des hommes politiques dont nous parlons, nous sommes tous en danger.

Nous devons nous donner la chance d’aller au village quand nous voulons, en toute sérénité. Il ne faudrait pas que nous ayons à traverser des barrières, avec gilets par balles, pour avoir accès à nos villages. La jeunesse peut dans ce cas devenir une bombe. Mais si nous l’utilisons dans le bon sens, elle représente une force.

Honorable, nous sommes à la fin de notre entretien. Avez-vous un message à faire passer à l’endroit des populations ?

Bien sûr ! Je veux dire aux populations du Denguélé, celles du Folon et du Kabadougou, que nous sommes tous RHDP. Elles doivent choisir les personnes capables de mener à bien leur destinée. Ce n’est pas forcément celui qui est certes du parti, mais qui ne vit pas avec nous. Nous qui y vivons, nous savons ce qui est bon pour nous. Donc on ne peut pas nous imposer des choix hasardeux.

Si après dix ans, on n’a pu faire quelque chose, ce n’est plus la peine. Avec tous ces milliards, on ne peut même pas voir un édifice significatif du Conseil régional. Ni dans le Folon ni dans le Kabadougou. C’est inadmissible ! il faut donc les changer !

Si le RHDP nous impose ces mêmes personnes, nous allons corriger sa feuille pour la lui ramener. Nous choisirons, pour notre parti, le militant convaincu, qui veut lutter, aider les populations, prêt à accepter la doctrine du président de la République. Un candidat capable de nous l’enseigner, pour que nous puissions la transmettre aux générations futures. Nous serons au contrôle.

Roger Kassi (Correspondant)