Bédié et ses 52 milliards !

Gbagbo et ses 180 milliards !

Et Ouattara ?

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(L’éléphant Déchaîné, 21 – 23 mai 2013) – Bédié voulait offrir le bonheur à chacun et le progrès à tous. On a vu les résultats…

Gbagbo lui, voulait rendre les Ivoiriens riches, après que, selon ses propres mots, Houphouët ait rendu la Côte d’Ivoire, riche. Les résultats n’ont pas crevé les yeux. Quant à Ouattara, il veut accomplir un miracle. Faire de la Côte d’Ivoire, « un pays émergent en une décennie ». Rendez-vous d’abord en 2015, puis, en 2020, si, bien sûr, les Ivoiriens n’ont pas changé d’avis d’ici là…

En attendant, « L’Eléphant » s’est intéressé à la façon dont les deux premiers se sont comportés avec l’argent public, durant leur mandat. Attention, ça tape très fort, mais n’allez pas imaginer quoi que ce soit !

OUATTARA, ON LE SAURA UN JOUR

Combien le nouveau chef de l’Etat (deux ans de pouvoir au compteur), dépense-t-il chaque jour sur la cagnotte qui est mise à sa disposition par le contribuable ivoirien chaque année ?

Pour le moment, nul ne peut répondre à cette question. Surtout que la Cour des comptes, chargée de rendre compte chaque année de la façon dont l’argent public est géré, ne remet ses rapports quand il le peut, qu’au chef de l’Etat et que personne d’autre n’y a accès.

Ainsi, dans un souci de transparence totale, les Ivoiriens ne sont pas tenus informés de ce qui est fait avec leur argent. Même quand le chef de l’Etat dit avoir déclaré ses biens à la Cour des comptes dans un souci de transparence, cette déclaration comportant (on l’espère) tous les détails sur ses biens, n’est pas publiée, comme cela se fait ailleurs, dans le journal officiel. Pour que chacun sache de quoi il retourne.

Le budget de souveraineté qui, selon Bohoun Bouabré (admirez la définition) est un «budget utilisé pour beaucoup de choses dans les Etats démocratiques…», est lourd, dans notre pays, bon an, mal an, de plusieurs dizaines de milliards de FCFA. Argent de poche pour notre chef de l’Etat et dont l’utilisation ne fait l’objet d’aucun contrôle de la part de quelque organe étatique que ce soit. « on ne devrait même pas évoquer ce à quoi sert le budget de souveraineté », disait, en recourant à un large sourire, Laurent Gbagbo, le 29 octobre 2010, lors de son passage à l’émission « Face aux électeurs ». Quel est le budget de Souveraineté de notre président Alassane Ouattara ? « La Lettre du Continent », dans son édition datée du 3 mai 2012, lui avait attribué le montant faramineux de 300 milliards de FCFA, comme budget de souveraineté.

La présidence de la République, sans doute par excès de modestie, n’a publié aucun communiqué pour démentir l’information. Les journaux proches de notre président n’ont pas jugé nécessaire eux aussi, de s’étendre sur la question. Certains, comme « L’Expression », ont tenté de contre-attaquer, mais ils n’ont produit aucun chiffre.

On reste donc, en attendant, sur le montant de 300 milliards avancé par « La lettre du Continent».

Combien le nouveau président dépense-t-il par jour ? Pour le moment, « L’Eléphant » n’a pu obtenir d’informations étayées de documents qui puissent lui permettre d’avancer un chiffre. Mais ça viendra…avec tous les efforts qui sont fournis au château.

Seule information livrée par une tête d’huile du palais, c’est le coût journalier du déplacement du chef de l’Etat, de son domicile à Cocody, à son bureau du château, au Plateau. «Il coûte trois millions de FCFA par jour. Cet argent sert à payer les primes des agents placés à certains endroits et autres carrefours, sur le long du trajet du président ». Eh ben dis donc ! Et combien coûtent les milliers de kilomètres qu’il avale chaque mois à bord de son avion « Air Ouattara One » ?

Combien les services financiers de la présidence retirent dans le mois, sur le compte de la présidence de la république logé à l’agence centrale de la BCEAO à Abidjan? « Je ne peux vous communiquer aucun chiffre pour l’instant. C’est des choses sur lesquelles on ne peut s’exprimer que si le locataire du palais change. Vous n’obtiendrez aucun document dessus tant que le président n’a pas changé. Et la BCEAO, en raison du secret bancaire, ne vous produira aucun document si vous les interrogez. Même la cour des comptes n’en sait rien. Sur ce compte, le rythme de retrait varie d’un régime à un autre et ce rythme est fonction des besoins du président… » Ajoute notre source.

C’est beau l’argent public !

GBAGBO ET SES 500 MILLIONS DE FCFA PAR JOUR.

Laurent Gbagbo

Gbagbo et ses 180 milliards !

Petite anecdote. Un matin de l’année 2006, un Français qui travaille au palais présidentiel sous le règne de l’intrépide Gbagbo, rentre dans le bureau de Jacques Anouma, directeur des services financiers de la Présidence. Dans ses mains, plusieurs documents liés aux retraits quotidiens effectués sur le compte de la Présidence logé à la BCEAO. Le Français présente les documents à Jacques Anouma et sollicite son avis. Réaction de ce dernier, après avoir parcouru quelques pièces : «Tu veux que j’ai une crise cardiaque ?» Il exagérait, bien sûr ! Sinon Jacques Anouma savait bien que l’argent qui était mis à sa disposition chaque semaine pour payer les « honoraires » des champions de la galaxie patriotique, provenait bien de quelque part, en dehors des « comptes ordinaires de la présidence », pour utiliser sa célèbre expression sortie devant le Doyen des juges d’instruction, Gnakadé Ladji Joachim.

Le compte de la présidence logé à la BCEAO est un compte spécial sur lequel seul un homme en qui le président a entièrement confiance (un Français sous Gbagbo), peut faire des opérations. Ainsi, de 2004 à 2010, ce compte a connu une intense activité. Chaque jour ouvrable, ce Français partait à l’agence centrale de la BCEAO à bord d’un véhicule qu’il changeait d’un jour à un autre (jamais le même véhicule pour deux retraits), et faisait l’opération. Un retrait de 500 millions de FCFA.

A quoi servait tout cet argent ? « Eh bien à faire face aux besoins de la présidence et notamment pour financer les activités des jeunes patriotes. Blé Goudé par exemple, recevait tous les mardis, des mains de Jacques Anouma, la somme de 7 millions de FCFA, en espèce. Serges Kassi lui, recevait tous les jeudis, la somme de 4 millions de FCFA». Et d’où provenait cet argent ? Du budget de souveraineté du président Gbagbo ? Pas du tout ! Ce budget ne pouvait supporter un tel rythme de retrait et ce budget n’a jamais été logé à la BCEAO.

Ce budget de souveraineté a d’ailleurs connu une évolution constante. Dans un pamphlet publié dans les colonnes de « Fraternité Matin » en 2007, Mamadou Koulibaly, alors président de l’Assemblée nationale, avait donné une idée de l’évolution fulgurante du montant de l’argent de poche de l’ancien président.

Selon Mamadou Koulibaly, cet argent de poche est passé de 15,5 milliards en 2000 à 19,2 milliards en 2001, puis 22,6 milliards en 2002 ; 28,05 milliards en 2003 ; 39,05 milliards en 2004 ; 36,62 milliards en 2005 ; 36,29 milliards en 2006 ; 36,56 milliards en 2007, ouf !

Pendant la campagne électorale pour la funeste présidentielle de 2010, le président Gbagbo avait annoncé lors de son passage à l’émission « Face aux électeurs » (29 octobre 2010), que son budget de souveraineté était de 56 milliards en 2008 à 76 milliards en 2009. A quoi pouvait bien servir tout cet argent ? « on ne doit même pas s’exprimer sur ce qu’on fait avec le budget de souveraineté », avait répondu Laurent Gbagbo. On ne doit pas s’exprimer aussi sur les 500 millions retirés par jour sur le compte logé à la BCEAO ?

Et dire que pour un budget de souveraineté de 15 milliards de FCFA que Bédié s’était offert, Laurent Gbagbo avait hurlé au gaspillage de l’argent public à travers toute la Côte d’Ivoire, prétendant qu’avec un budget de 5 milliards, le chef de l’Etat pouvait travailler au bonheur de ses concitoyens.

L’argent public, nos dirigeants en disposent, en vivent et en meurent depuis près d’un siècle, sans rendre de compte à qui que ce soit.

Bref, si le quadrupède a obtenu des témoignages de sources qui ont travaillé au service financier de la Présidence sous Gbagbo, ces témoignages n’ont pu, en raison du pillage que le Palais présidentiel et la résidence présidentielle ont subi pendant la crise post-électorales, être étayés par des documents écrits.

En revanche, « L’Eléphant » a pu se procurer des documents sur les petites dépenses du palais sous Bédié, notamment les retraits sur le compte spécial logé à la BCEAO.

BEDIE NE SE CONTENTAIT PAS AUSSI DE SES 15 MILLIARDS

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Bédié et ses 52 milliards !

De 1995 à 1998, le budget de souveraineté mis à la disposition du président Bédié était officiellement, de 15 milliards de FCFA. Ce qui, évidemment, comme ce fut le cas sous Gbagbo, et comme c’est le cas aujourd’hui sous Ouattara, n’a absolument rien à voir avec le budget de fonctionnement (salaires et autres dépenses ordinaires…) de la présidence. Les 15 milliards, c’était l’argent de poche du président, ils lui permettaient de faire les dépenses qu’il voulait, sans rendre compte à qui que ce soit. C’était comme ça, hier, c’est comme ça, aujourd’hui.

Mais, en dehors de ce budget de souveraineté, la présidence, sous Bédié, mettait intensément et quotidiennement à contribution, le compte logé à la BCEAO.

« L’Eléphant » a pu retracer l’ensemble des retraits qui ont été effectués sur ce compte au cours de l’année 1999, année où les « jeunes gens » de Guéi Robert ont mis fin au règne du PDCI au sommet de l’Etat de Côte d’Ivoire. A quoi pouvait bien servir tout cet argent retiré presque quotidiennement ? « Aucune idée », répondent presqu’en chœur, toutes les personnes interrogées par le quadrupède.

Ainsi, en janvier 1999, trois milliards ont été retirés sur ce compte en six jours ; plus de huit milliards en huit jours en février 1999 ; près de cinq milliards en neuf jours en mars 1999 ; plus de trois milliards en quatre jours en avril 1999 ; près de sept milliards en une semaine en mai 1999 ; près de deux milliards en 4 jours en juin 1999 ; plus de quatre milliards en cinq jours en juillet 1999 ; plus de quatre milliards en une semaine en août 1999 ; plus de deux milliards en quatre jours en septembre 1999 ; plus de quatre milliards en dix jours en octobre 1999 ; près de sept milliards en une semaine en novembre 1999 ; près de cinq milliards en neuf jours en décembre 1999, le mois dans lequel le régime de Bédié a été renversé. (Voir tableaux récapitulatifs de ces retraits et les numéros des chèques utilisés).

Les retraits effectués sur ce compte au cours de cette année 1999 donnent un total de 52 milliards, 727 millions de FCFA. Ce qui, évidemment, n’a rien à voir avec le budget de souveraineté de 15 milliards de FCFA.

WENCESlAS ASSOHOU 

D’où provient cet argent ? 

BCEAO9Le service financier de la présidence sous Laurent Gbagbo, selon les sources interrogées par « L’éléphant » dans le cadre de ce dossier, retirait, à partir de 2004 jusqu’à la chute de Gbagbo, la somme de cinq cent millions de FCFA, sur ce compte spécial logé à la BCEAO. Soit, 15 milliards de FCFA par mois et 180 milliards dans l’année. Argent qui, bien sûr, n’avait rien à voir avec le budget de souveraineté placé sur les comptes ordinaires de la présidence, pour utiliser l’expression de Jacques Anouma.

Sous Bédié, selon les documents obtenus par « L’Eléphant », en tout cas pour l’année 1999, ce sont 52 milliards qui ont été retirés sur ce compte. Combien de milliards ont été retirés avant 1999 ? Impossible de répondre à cette question. Combien de milliards sont retirés aujourd’hui sur ce compte, sous Ouattara ? Impossible aussi de répondre à cette question, « mais le régime Ouattara a aussi beaucoup de dépenses privées », précise une source.

D’où provient l’argent qui alimente ce compte ? « on ne peut répondre clairement à cette question. Mais certaines sommes d’argent, provenant des recettes journalières de l’Etat y sont déposées. Et la présidence de la république y puise depuis des années, ce qu’elle veut. Je ne sais pas si cette pratique continue sous Ouattara…», explique une tête de pont du ministère de l’Economie. Mais non, ce genre de pratiques, disposer de l’argent public à un tel rythme, ne peut pas prospérer sous Ouattara…

Assalé TIEMOKO