La sculpture de l’artiste allemand Ottar Hšrl représentant le logo de l’euro est photographiée devant l’ancien siège de la Banque centrale européenne (BCE) à Francfort/Main, en Allemagne, le 15 février 2017.

Par Jean-Collins OYONO-ENGUELE, Leader politique, Président de la Renaissance Pour le Développement du Cameroun / Tel : 656 64 65 32/ 651 97 30 05

Elle fait frissonner toutes les Banques Centrales de la planète . Elle pulvérise tout sur son passage . Elle est , aujourd’hui , le pire des cauchemars de l’Union Européenne . Elle , c’est l’inflation , de sinistre réputation , la génitrice , depuis la nuit des temps , de toutes les crises financières du monde .

” L’horizon économique s’assombrit , dans la zone euro” , tel est le cri de détresse lancé par Christine Lagarde , Présidente de la Banque Centrale Européenne . Depuis l’éclatement du conflit entre la Russie et l’Ukraine , l’Europe traverse un épisode chaotique susceptible de la conduire à une situation des plus catastrophiques . L’Europe est en train de vivre une crise , comme elle n’en avait pas connue , après la crise des dettes souveraines de 2010 .

Lorsqu’on évoque la situation économique mondiale actuelle , le mot qui hante les esprits , le plus prononcé , le plus recherché de tous les opérateurs de marchés , c’est probablement le vocable ” INFLATION” , avec toutes les conséquences qui peuvent en découler . Qu’est-ce que ça change , par rapport aux conditions dans lesquelles ces économies ont toujours évolué , depuis des décennies ? Qu’est-ce que c’est que l’inflation ? Cette inflation est-elle structurelle , comme lors de la terrible crise des années 1930 , ou conjoncturelle ? Cette question , depuis quelques mois , est devenue la ritournelle des communicateurs des diverses Banques Centrales du monde entier .

Le vœu le plus cher de ces Institutions d’émission de la monnaie était que cette inflation ne fût que conjoncturelle . Malheureusement , le choc du confinement , subséquent au COVID-19 , combiné avec celui provoqué par la guerre en Ukraine ont engendré des désordres dans l’économie mondiale , notamment des bouleversements dans les marchés , comme celui de l’énergie , entraînant une effroyable flambée des prix . D’où cette autre question qui est au cœur de tous les débats : cette immaîtrisable et insaisissable hausse des prix est-elle un corollaire de l’inflation ou une funeste conséquence de la pénurie ?

L’inflation est le résultat du décalage entre la masse monétaire et la réalité de la richesse échangée . En d’autres termes , il y a inflation , lorsque , dans une économie , il y a trop de monnaie , par rapport à la création des richesses : l’inflation , tel un serpent venimeux , tue le pouvoir d’achat de la monnaie .

La richesse , que produit une économie , doit nécessairement être échangée . Si un pays produit un bien déterminé , sa valeur se crée , dès lors que ce bien est échangé ; cette transaction implique un phénomène monétaire . Il est clair que la monnaie n’est rien moins que la reconnaissance d’une dette . Pendant la terrifiante crise financière mondiale , qui , tel un coup de tonnerre ,

avait foudroyé l’emblématique Banque d’investissement Lehman Brothers , le 15 Septembre 2008 , l’émission de la dette de la planète entière était trop élevée , en comparaison de toute la richesse du monde . Autrement dit , la dette , estimée à 140 000 milliards , excédait largement le Produit Intérieur Brut du monde qui se chiffrait à 80 000 milliards .

Qu’est-ce qui , aujourd’hui , fait autant trembler les marchés financiers ? Eu égard aux rouages de cette crise financière , aux effets ravageurs ,

la Banque Centrale Américaine pourrait , dans les mois à venir , accroître ses taux d’intérêt de 100 points de base , c’est-à-dire de 1% ; une résolution inédite lourde de conséquences pour l’ensemble de l’économie mondiale , puisque le dollar , à lui seul , représente 60% des réserves de la plupart des Banques Centrales , devant l’Euro qui pèse 20% . Toutes les autres monnaies , y compris le rouble russe , se  contentent des 20% restants . De son côté , la Banque Centrale Canadienne , pour la première fois , depuis 1998 , vient de réviser ses taux directeurs de 100 points de base . Jamais cette Banque n’a autant accru ses taux d’intérêt , au cours des 24 dernières années . Depuis 2022 , plusieurs autres pays , en Afrique et en Amérique Latine , à cause de cette inflation , qui tire ses origines de la guerre en Ukraine , ont emboîté le pas au Canada .

Dans cet environnement inflationniste , où la planète tout entière est confrontée à un effondrement économique , monétaire et civilisationnel , Philippe Dessertine , Directeur de l’Institut de la Haute Finance , en France , recommande à tous les décideurs du monde d’abandonner résolument les réflexes acquis et les expériences accumulées , jusqu’ici , filles d’une époque révolue . En ce qui concerne l’Europe , la plus grande victime de cette guerre , et surtout les 19 pays de la zone Euro , qui utilisent une monnaie commune , la hausse généralisée des prix , sur le vieux continent , nécessite que la Banque Centrale Européenne cesse immédiatement ses rachats d’actifs sur les marchés et augmente ses taux d’intérêt directeurs, de manière radicale , pour ralentir l’économie et tenter d’endiguer profondément l’inflation . Cela veut dire qu’il faut réduire , le plus rapidement possible , avant qu’il ne soit trop tard , la quantité  de monnaie en circulation, la liquidité , afin de donner un puissant coup de frein à la hausse des prix , car , aujourd’hui , il y a trop d’argent qui coure après trop peu de biens . Pourtant , Christine Lagarde , Présidente de la Banque Centrale Européenne et principale Architecte de la politique monétaire de la zone Euro , n’a pas forcément l’air pressée de vouloir prendre les mesures qui s’imposent . En réalité , cette ancienne General Manager of the International Monetary Fund dispose  d’une marge de manœuvre très réduite .

La Banque Centrale Européenne se trouve dans une situation épineuse , entre le marteau et l’enclume . En effet , la balance de paiements intra-européenne , principal instrument d’analyse des balances commerciales des pays de la zone Euro , révèle qu’un immense fossé s’est creusé , depuis plus de 10 ans , entre les pays du Nord et ceux du Sud .Les pays du Nord , à l’instar de l’Allemagne , de la Finlande , de la Hollande ou du Luxembourg , tels des rois auréolés de diadèmes , ont des balances commerciales excédentaires , c’est-à-dire que ces pays exportent plus qu’ils n’importent : ils s’enrichissent , car , ils gagnent plus que ce qu’ils ne dépensent . Quant aux pays du Sud , comme la France , l’Italie , l’Espagne ou la Grèce , leurs balances commerciales respectives sont déficitaires , parce qu’ils importent beaucoup plus qu’ils n’exportent . Ces pays s’appauvrissent , étant donné qu’ils dépensent plus que ce qu’ils ne gagnent . Évidemment , lorsqu’un pays dépense plus que ce qu’il ne gagne , il est englouti dans le cercle vicieux de l’endettement .

Aujourd’hui , le niveau d’endettement des pays européens , en fonction de leur Produit Intérieur Brut , distingue clairement deux groupes : d’un côté, les pays riches du Nord , qui savourent les délices de leur ardeur au travail , et , de l’autre côté , les pays du Sud dont la dette nationale , à cause de leurs propres turpitudes , est supérieure à 100% de leur Produit Intérieur Brut . C’est justement la gestion de cette contradiction qui donne des insomnies à la Présidente de la Banque Centrale Européenne , Christine Lagarde .

Les pays du Nord lui demandent , avec insistance , d’agir sur les taux d’intérêt et de ralentir , voire , d’arrêter le rachat d’actifs , sur le marché , afin de lutter contre cette inflation qui impacte négativement le riche retraité Allemand ou Hollandais qui , les yeux brouillés de larmes ,  voit son épargne fondre comme neige au soleil , puisque , plus l’écart entre le taux d’intérêt et l’inflation est grand , plus la dépréciation de la monnaie s’accélère . Par contre , les pays du Sud ont des préoccupations inverses : ces derniers , tels des élèves de la liste d’attente , supplient la Banque Centrale Européenne de maintenir , par tous les moyens , les taux d’intérêt les plus bas possible , car , compte tenu de leurs niveaux d’endettement respectifs , une remontée de ces taux , même de quelques points seulement , les asphyxieraient . Si on considère , par exemple , le cas de la France , qui croule sous le fardeau d’une dette de 3000 milliards d’euros , si ces taux passaient de 0 à 3 % , ce qui ne serait même pas suffisant , avec l’inflation actuelle , la France devrait alors  payer 90 milliards d’euros supplémentaires , par an . Bien entendu , ce remboursement ne se ferait pas dans l’immédiat , car , cela nécessiterait un temps , pour que la dette en cours vienne à l’échéance et qu’elle soit remplacée par la dette à 3% . Somme toute , une augmentation des taux directeurs serait  suicidaire pour la France .

Et pourtant , la Banque Centrale Européenne a récemment mis un point final à ses rachats de la  dette publique  et a même revu son bilan à la baisse ; cette décision , qu’elle croyait salutaire , a plutôt déclenché une levée de boucliers , dans certains pays membres : résultat , les taux d’intérêt , au sein de la zone Euro , sont divergents . Cette situation fort embarrassante a amené la Banque Centrale Européenne à faire appel à la solidarité des pays riches du Nord , pour apporter leur soutien aux pays très endettés du Sud .

Comme tout le monde peut le constater , l’Euro est en train de faire imploser l’Europe , à cause des tensions et des désaccords profonds entre les pays solvables du Nord et les pays débiteurs du Sud . N’en déplaise aux Africains qui passent leur temps à racialiser , à provincialiser et à tribaliser la vérité . La France a beau partager la même frontière avec l’Allemagne , il n’en demeure pas moins que chacun de ces deux pays , membres de l’Union Européenne ,  assume individuellement son destin . Bien plus , c’est un secret de Polichinelle que l’Allemagne a perdu les Guerres Mondiales , avec toutes les humiliations qui  lui ont été infligées . Cependant , l’Allemagne est et demeure la locomotive de l’Union Européenne , grâce au dynamisme de son  vaillant peuple .

Que les Africains se mettent donc au travail , au lieu de consacrer des décennies à brailler , à beugler et à aboyer contre les Occidentaux , comme s’il existait , dans leur imaginaire , un pays dont les citoyens devraient creuser leurs méninges , afin de distribuer le fruit de leurs efforts à une ribambelle de paresseux et de fêtards .

Jean Collins OYONO ENGUELE ,
Leader politique ,
Président de la Renaissance Pour le Développement du Cameroun .
Tél : 656 64 65 32 / 651 97 30 05