Des réfugiés fuyant la région séparatiste du Tigré, en Ethiopie © Marwan Ali/AP/SIPA

En à peine deux semaines, l’escalade des hostilités dans le Tigré et le nord de l’Éthiopie a causé d’énormes souffrances et risque de dégénérer en une crise humanitaire de grande ampleur

ADDIS ABEBA, Éthiopie, 18 novembre 2020/ — En à peine deux semaines, l’escalade des hostilités dans le Tigré et le nord de l’Éthiopie a causé d’énormes souffrances et risque de dégénérer en une crise humanitaire de grande ampleur. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a visité des établissements de santé dans le Tigré et l’Amhara – dont beaucoup n’ont pas encore reçu d’assistance – et a constaté qu’ils avaient besoin de fournitures médicales et d’aide pour faire face à l’afflux de blessés. La Croix-Rouge éthiopienne a assuré le transport de centaines d’habitants blessés dans les zones touchées par les affrontements. Dans le même temps, plus d’un millier de personnes ont contacté la permanence téléphonique du CICR et se sont rendues dans ses bureaux de Mekele et d’Addis-Abeba afin de parvenir à joindre leur famille.

« À mesure que les combats continuent, nous voyons se développer une crise humanitaire catastrophique, non seulement sur le territoire éthiopien mais aussi de l’autre côté des frontières, déplore Katia Sorin, cheffe de la délégation du CICR à Addis-Abeba. Des milliers de personnes se réfugient au Soudan en quête de sécurité, et un nombre incalculable d’habitants doivent quitter leur foyer et se retrouvent déplacés à l’intérieur de l’Éthiopie. Les télécommunications ayant été coupées dans le Tigré, il est pratiquement impossible de contacter ses proches, ce qui plonge dans l’angoisse les familles qui veulent localiser des êtres chers et s’assurer qu’ils sont en sécurité. »

L’équipe du CICR a visité trois hôpitaux et un centre de soins de santé primaires dans le nord de l’Amhara pour mieux cerner leurs besoins et leur remettre des fournitures médicales tels que matériel chirurgical et articles utilisés en traumatologie, solutions intraveineuses, médicaments et consommables médicaux. Elle leur a aussi fourni des lits d’hôpital, des matelas, des nattes et des couvertures. Pour plusieurs de ces établissements, c’était la première fois qu’ils recevaient une aide extérieure depuis le début de la crise. Le CICR a également évalué les besoins de l’hôpital universitaire Ayder à Mekele.

Du matériel de premiers secours a été fourni à la Croix-Rouge éthiopienne, qui gère un des principaux services ambulanciers de la région et a réussi à évacuer des centaines de blessés. Un stock supplémentaire de fournitures médicales et de médicaments d’urgence est actuellement constitué à Nairobi et Addis-Abeba pour aider d’autres structures de santé.

Les délégués du CICR ont par ailleurs obtenu d’avoir accès aux personnes détenues en lien avec les hostilités pour évaluer leurs conditions de détention et leur fournir des articles d’hygiène et autres articles essentiels. En même temps, des équipes du CICR et de la Croix-Rouge éthiopienne sont à l’œuvre dans une école de Mekele pour aider les personnes qui cherchent à entrer en contact avec leur famille, en utilisant surtout pour cela de courts messages écrits.

Nos préoccupations humanitaires

  • Les hôpitaux et centres de soins de santé primaires situés dans les zones de combat et aux environs ont besoin de matériel médical et d’aide pour soigner les blessés. Ils ont aussi un besoin urgent de lits d’hôpital, de matelas, de couvertures et de draps. L’hôpital universitaire de Gondar a reçu un grand nombre de blessés graves et a pris en charge plus de 400 personnes à ce jour. Il soigne en outre 14 patients Covid-19, ce qui laisse présager les difficultés croissantes que pourraient avoir les établissements médicaux pour soigner les blessés traumatiques dans un contexte de pandémie.
  • La crise a également causé une rupture de la chaîne d’approvisionnement en médicaments courants et consommables médicaux. Notre bureau de Mekele a reçu de l’hôpital universitaire Ayder, dans le Tigré, une demande urgente de médicaments et matériel médical destinés au traitement du diabète et à la dialyse. Cet hôpital est le seul de la région à assurer ce type de traitement. Les interruptions d’approvisionnement portent également préjudice aux communautés, en particulier aux réfugiés et aux Éthiopiens déplacés qui dépendent de l’aide qu’ils peuvent recevoir dans le Tigré.
  • La semaine dernière, trois ambulances de la Croix-Rouge éthiopienne ont été attaquées. On ne connaît pas clairement les détails de ces incidents, mais il est inquiétant que les personnels de santé et les premiers intervenants ne soient pas respectés et protégés, ce qui peut être une question de vie ou de mort pour les personnes auxquelles ils doivent apporter des soins. À la suite de ces attaques, la Croix-Rouge éthiopienne a publié une déclaration appelant au respect de l’usage protecteur de l’emblème de la croix rouge, et demandant qu’il ne soit pas fait obstacle à l’action humanitaire de ses volontaires et de ses employés ainsi que des autres membres du personnel médical.
  • Des milliers de personnes traversent la frontière pour trouver refuge au Soudan, et un nombre incalculable d’habitants sont déplacés à l’intérieur de l’Éthiopie. Ils auront besoin de nourriture, d’abris, d’eau et de soins médicaux, ainsi que d’aide pour rechercher et contacter leurs proches.
  • Les télécommunications étant coupées dans le Tigré, les gens n’arrivent pas à savoir si leurs proches sont en vie et en sécurité. Cette incertitude engendre beaucoup d’angoisse. Notre permanence téléphonique et notre bureau de Mekele sont inondés de centaines de demandes de personnes qui ont besoin d’aide pour entrer en contact avec des membres de leur famille.
  • Nous sommes préoccupés par le bien-être de milliers de réfugiés érythréens qui vivent actuellement dans le Tigré et ont besoin de protection et d’assistance.
  • Les combats du Tigré viennent s’ajouter aux épisodes de violence récurrents qui se sont produits dans différentes régions de l’Éthiopie, avec leur cortège de morts, de blessés, de déplacements de population et d’arrestations.

Nos activités

  • L’équipe du CICR a visité quatre établissements de santé – un centre de soins de santé primaires et trois hôpitaux à Gondar, Sanja, Abereha Jira et Abderafi dans le nord de l’Amhara – et a distribué les fournitures nécessaires pour soigner les blessures graves et modérées. L’hôpital universitaire de Gondar a reçu des matelas, des couvertures et des nattes pour 200 patients.
  • La section de la Croix-Rouge éthiopienne couvrant les zones ouest, nord et centre du Gondar, dans l’Amhara, dispose de 10 ambulances qui ont transporté à ce jour des centaines de blessés vers des établissements médicaux. Le CICR a fourni à cette section du matériel de premier secours pour son service d’ambulances.
  • L’équipe du CICR visite les personnes détenues en lien avec les hostilités pour évaluer leurs conditions de détention et le traitement qui leur est réservé, et pour distribuer des articles d’hygiène essentiels tels que savon, désinfectant et jerrycans.
  • Une permanence téléphonique a été mise en place pour aider ceux qui recherchent des proches dans le Tigré, en collaboration avec la Croix-Rouge éthiopienne. Nos équipes ont reçu la semaine dernière plus de 1 000 appels téléphoniques, passés depuis l’Éthiopie et d’autres pays, demandant de l’aide pour retrouver des êtres chers. Toute personne cherchant un ou plusieurs membres de sa famille devrait appeler notre permanence téléphonique au numéro +251 94 312 2207 ou envoyer un courriel à l’adresse add_tracing_services@icrc.org, ou encore appeler la Croix-Rouge éthiopienne au numéro +251 11 552 7110.
  • Le CICR a créé dans une école secondaire de Mekele un petit service où plus de 400 personnes ont reçu de l’aide pour reprendre contact avec leur famille, essentiellement sous la forme de courts messages appelés salamats. Ceci ne fait toutefois qu’effleurer les besoins réels, et la coupure des télécommunications dans le Tigré rend extrêmement difficile de rechercher des proches et de reprendre contact avec eux.
  • Dans son centre logistique de Nairobi et à Addis-Abeba, le CICR rassemble actuellement du matériel médical et du matériel de secours supplémentaires, y compris des fournitures médicales permettant de soigner environ 500 blessés graves. Ce matériel améliorera immédiatement la situation dans les hôpitaux et les dispensaires qui ont beaucoup de mal à répondre aux besoins de soins de leurs patients, qu’il s’agisse de soins courants ou urgents.
  • Une équipe d’évaluation se rendra cette semaine sur la frontière entre le Soudan et l’Éthiopie pour s’entretenir avec les réfugiés et mieux cerner les besoins, notamment en matière de soins de santé et de rétablissement des liens familiaux, en collaboration avec notre partenaire le Croissant-Rouge soudanais.
  • Le CICR est présent depuis longtemps en Éthiopie, où il répond aux besoins engendrés par les situations de violence dans d’autres régions du pays, notamment les États régionaux d’Oromia, de Benishangul-Gumuz, d’Amhara et de Somali. Le CICR entretient un dialogue confidentiel bilatéral avec les porteurs d’armes pour s’assurer que ceux qui participent aux combats respectent leurs obligations au regard du droit international.

SOURCE
International Committee of the Red Cross (ICRC)