Éminence Cardinal Kutwa,

Par Excellence Zadi Vacka

Je ne suis pas un fidèle de l’Eglise catholique mais un simple fidèle chrétien qui a compris par l’évangile, l’amour de Dieu, l’amour de l’homme par Dieu. Et en cela Jésus Christ, le prophète par lequel, la chrétienté est entrée dans les mœurs des humains a fondé son action pastorale sur l’Amour du prochain. Et au moment de sa crucifixion, il nous a laissé l’Amour pour Dieu, l’Amour pour les uns et les autres comme Dieu nous aime.

Je ne suis qu’un simple pécheur qui aime Dieu et qui cherche, ainsi, à le connaître véritablement. Il serait alors prétentieux de ma part, de vous apprendre les choses de Dieu, votre Éminence. Mais déjà, l’Histoire de l’église catholique ayant évolué, nous pouvons nous autoriser à nous adresser à vous sans aucune prétention de vous enlever votre érudition théologique. Cependant vos sorties publiques, surtout sur la longue crise et la question du respect des droits humains en Côte d’Ivoire nous laissent dubitatifs nous interpellant , en même temps, sur votre posture. C’est pourquoi, à la suite de votre discours du 30 décembre 2019, dans lequel, vous demandez au Président Alassane Ouattara de ne libérer que “les prisonniers dernièrement emprisonnés”, nous donnant l’impression que vous faites une classification des prisonniers donc un choix, nous nous autorisons à vous adresser cette lettre ouverte.

Eminence, vous le savez autant que moi qu’en Côte d’Ivoire, les discours et les actes des tenants actuels du pouvoir sont en constante violation des droits humains. C’est en cela qu’ils peuvent entrer dans la catégorie de ceux que le Pape François dénonçait le 15 novembre 2019, lors du congrès international d’une association de droit pénal sur le thème ‘Criminal justice and corporate business‘ en disant :”lorsque j’entends certains discours, de certains responsables des forces de l’ordre ou de gouvernements, me viennent à l’esprit les discours d’Hitler en 1934 ou 1936»,.

Éminence, il est vrai que l’Église catholique était toujours pour les droits de Dieu contre les prétentions de l’homme, avec la vérité établie que devant Dieu, l’homme n’a que des devoirs. Mais avec l’Encyclique du Pape Jean XXIII “Pacem in terris (Paix sur la terre) en 1963 et le concile Vatican II, notamment avec le texte de la Déclaration sur la liberté religieuse en 1965, l’enseignement catholique sur les droits de l’homme a positivement évolué. Ce texte déclare que la liberté religieuse a son fondement dans la dignité de l’homme qui est connue par la parole révélée de Dieu et par la raison. Ainsi, l’Église, par le Concile, fonde les droits humains sur la Bible et la loi naturelle. Dans son texte, Jean XXIII énumère les différentes catégories des droits humains en écrivant : ” ces droits et devoirs sont universels, inviolables et inaliénables.” Il les fonde sur la loi divine inscrite au cœur de l’homme et sur le témoignage de sa conscience. À la suite de Jean XXIII, dans un message, le Pape Paul VI écrit en 1974 que “L’Église croit très fermement que la promotion des droits de l’homme est une requête de l’Évangile, et qu’elle doit occuper une place centrale dans son ministère. “

Lorsque Jean-Paul II prend les commandes de l’Eglise de Rome en 1978, “les droits de l’homme deviennent le cœur de l’enseignement de l’Église en matière sociale et politique. Dans son Encyclique Redemptoris hominis (Rédempteur de l’homme), Jean-Paul II écrit que les « droits objectifs et inviolables de l’homme » sont liés de façon étroite à la mission de l’Église dans le monde contemporain…Selon Jean-Paul II, « La dignité humaine est une valeur évangélique » et la Déclaration universelle des droits de l’homme est comme une « pierre militaire » sur la route en avant de l’humanité…”, écrit P. Jean-Paul Sagadou, dans le quotidien burkinabè Paalga en 2012.

Éminence, vous n’avez sans doute pas oublié ce qui a motivé Jean Paul Il en déclarant ceci, le 2 juin 1980, à l’UNESCO : “le respect des droits inaliénables de la personne humaine est à la base de tout. Toute menace contre les droits de l’homme, que ce soit dans le cadre de ses biens spirituels ou dans celui de ses biens matériels, fait violence à cette dimension fondamentale”? Or votre démarche, Éminence nous donne l’impression que vous avez accepté la lettre des droits de l’homme mais pas l’esprit. Or “on ne peut accepter la lettre des droits de l’homme sans réaliser leur esprit, sans respecter peuples et nations.”, comme le soutient Jean Paul Sagadou.

Éminence, pour votre dignité et la crédibilité de l’Eglise catholique de Côte d’Ivoire, faites comme beaucoup de chrétiens et même de prélats qui se sont activement engagés, souvent au péril de leur vie, dans la défense et la promotion des droits de l’homme. Avec la conscience que c’est Dieu qui est le garant des droits de l’homme, aidez les fidèles, les brebis que nous sommes à aimer Dieu en vous mettant du côté des plus faibles, du peuple qui souffre du fait de la méchanceté gratuite des hommes de pouvoir. Car Dieu est Amour !

Veuillez agréer Son Éminence Cardinal, l’expression de ma très haute considération. Bonne fin d’année. Que Dieu Bénisse la Côte d’Ivoire !