Le mariage traditionnel
Jean-Jacques Kouassi était amoureux de Mawa Touré depuis qu’ils étaient adolescents. Mawa avait un regard limpide, un corps de kora, une taille fine, élancée comme une tige de fleur et une allure gracieuse, telle une gazelle, qui faisait chavirer le cœur de Jean-Jacques. Le teint de Jean-Jacques était d’un noir d’ébène brillant et propre qui faisait battre à tout rompre le cœur de Mawa. Ils avaient des sentiments l’un pour l’autre depuis le lycée. Les deux jeunes gens vécurent une histoire fusionnelle dès cette époque.
Mais Mawa quitta Jean-Jacques quelques années plus tard, à cause des idées qu’il commença à avoir sur la société ivoirienne, idées qu’elle jugeait tribalistes. Elle ne pouvait s’accommoder des différentes déclarations de Jean-Jacques sur ceux qu’il appelait « les étrangers », qu’il assimilait aux habitants de la région nord du pays, nord dont Mawa était elle-même issue. Pour lui, les groupes ethniques originaires du nord de la Côte d’Ivoire étaient des étrangers, inférieurs en droits et en citoyenneté aux vrais ivoiriens, qui étaient selon lui les groupes ethniques originaires des régions de l’ouest, du sud, du centre et de l’est de la Côte d’Ivoire. Or, Mawa se sentait Ivoirienne à part entière, au même titre que Jean-Jacques.
Jean-Jacques, qui était issu du centre du pays, tenta plusieurs unions après sa séparation d’avec Mawa, dont une avec une femme originaire de l’ouest du pays. Celle-ci ne fit pas long feu. Mawa à son tour, eut une aventure avec un beau jeune homme originaire de la même région, l’ouest de la Côte d’Ivoire ; elle fut éphémère aussi, bien que passionnée… Quelques années à peine après, Jean-Jacques retourna à ses anciennes amours, il retourna avec Mawa. Après tout, ils avaient la même vision du couple et leur relation avait plus de chances de réussir.
Chez les Baoulé, le mariage est une institution qui sert de socle à la cohésion de la société et à la paix. Par exemple, un homme Baoulé ne répudie pas une femme indésirable. Il adopte un comportement tel qu’elle s’en va d’elle-même. Dans la société Baoulé, les promesses de mariage sont plus importantes que le mariage… En termes de similitudes entre les deux sociétés à propos du mariage, notons que dans la société Malinké, on dit qu’une société épanouie est le fruit de mariages réussis, de familles épanouies. La société est bien constituée de familles, la famille est donc l’élément essentiel, le reflet de celle-ci. La culture Malinké attache ainsi une grande importance au mariage. Celui-ci y revêt un caractère sacré. Le divorce y est réprouvé, même s’il est possible. On fait donc tout pour arranger les choses et ne pas arriver à la séparation.
Mawa et Jean-Jacques s’aimaient. Tous deux formaient un couple solide. Ils avaient traversé beaucoup d’épreuves et mesuraient à sa juste mesure, la chance qu’ils avaient d’être ensemble à nouveau, après tant de péripéties. La chance d’avoir pu se retrouver et de vivre en paix et en harmonie.
Jean-Jacques Kouassi et Mawa Touré réalisèrent de nombreux projets ensemble : ils construisirent, grâce à leurs économies mises en commun, de nombreuses habitations, des écoles, des hôpitaux, des routes, des Mosquées, des Eglises, dans leurs villages respectifs. Ils firent des placements financiers avantageux et empruntèrent aussi des sommes d’argents importantes, afin de réaliser des projets qui leurs tenaient à cœur. Plusieurs enfants agrandirent la famille de Jean-Jacques et de Mawa, et ils décidèrent d’élever la progéniture de certains de leurs frères et sœurs, parce qu’ils en avaient les moyens : leur domicile était immense et ils disposaient de ressources suffisantes pour entretenir une famille au sens africain du terme. Seulement, Mawa et Jean-Jacques n’avaient toujours pas opté pour un mariage civil. Ce qui les unissait était un mariage religieux, ainsi qu’un mariage coutumier.
(À suivre…)