Jean-Claude DJEREKE

L’unité! Qui osera douter de son importance? Qui contestera le fait que les faibles ne sont forts que s’ils sont unis? Qui ne sait pas qu’un peuple ou un parti politique divisé court le risque de céder à la moindre bourrasque? Victor Hugo l’avait bien compris, qui, de son lieu d’exil, s’adressait à ses compatriotes en ces termes: “Étouffez toutes les haines, éloignez tous les ressentiments, soyez unis, vous serez invincibles. Serrons-nous tous autour de la République en face de l’invasion, et soyons frères. Nous vaincrons. C’est par la fraternité qu’on sauve la liberté.” (cf. “Pendant l’exil”, recueil de textes parus dans la presse entre 1852 et 1870). Avant l’immense écrivain français, on voit avec Jésus combien l’unité est utile et capitale quand il adresse cette prière à son Père: “Garde-les dans ton nom que tu m’as donné afin qu’ils soient un (ut sint unum) comme nous sommes un” (Jn 17, 11).
Pas une semaine ne passe sans que des Ivoiriens, proches ou non du Front populaire ivoirien (FPI), invitent Pascal Affi N’Guessan et Aboudramane Sangaré à l’unité, car, soutiennent-ils, le régime dictatorial, sanguinaire et inhumain (il vient une fois de plus de jeter à la rue les gens de Cocody-Danga qui avaient pourtant voté pour lui) installé par la France en avril 2011 ne tiendrait pas une semaine face à un FPI uni. Difficile de ne pas être d’accord avec eux. Peut-on, pour autant, vouloir l’unité pour l’unité? L’unité est-elle une fin en soi? Entre la ligne ou la vision du parti et l’unité, qu’est-ce qui compte le plus?
Au moment où s’achèvent les journées de réflexion organisées à Paris par la 3e vice-présidence du FPI chargée de la diaspora, il est bon de se rappeler que le FPI a été créé en 1982, entre autres, pour combattre toute domination à l’intérieur comme à l’extérieur de la Côte d’Ivoire. Or qu’est-ce qui s’est passé dans notre pays de 1960 à 1999? Les richesses ont profité à la France et au PDCI. Le RDR, quoique parti du PDCI en 1994, n’en partage pas moins l’idéologie que l’on peut résumer ainsi: seule une minorité d’Ivoiriens mérite de vivre décemment. Cette minorité arrogante et méprisante pense que personne d’autre n’a droit aux crédits bancaires, aux meilleurs écoles et hôpitaux, à des vacances ici ou là. C’est encore elle qui, avec l’aide de la France et pour conserver l’argent et les privilèges acquis de façon malhonnête, a fait la guerre à Laurent Gbagbo en 2002. Il n’est donc pas étonnant qu’elle ait formé le RHDP en France en 2005. En un mot, les soi-disant houphouétistes ne sont pas au pouvoir pour les Ivoiriens mais pour eux-mêmes et pour la France. Diriger le pays sous les ordres de la France ne les a jamais dérangés. La souveraineté nationale et le partage des richesses ne font pas partie de leurs préoccupations. Tout ce qui les intéresse, c’est d’avoir villas et comptes bancaires en France. Lorsqu’on parle de domination à l’intérieur comme à l’extérieur, c’est donc à eux (le RHDP et la France) qu’il convient d’abord de se référer. Certaines personnes, tout en se réclamant du FPI, ne voient aucun inconvénient à rouler carrosse pendant que la majorité des Ivoiriens tire le diable par la queue, ni à s’agenouiller devant un Parti socialiste devenu si moribond qu’il ne fait même pas le poids devant “La France insoumise” de Jean-Luc Mélenchon. L’unité, pour nécessaire qu’elle soit, commande-t-elle que le FPI qui lutte pour la souveraineté de la Côte d’Ivoire et pour une meilleure répartition des richesses marche et travaille avec ceux qui croient et proclament urbi et orbi que les Blancs sont forts et que ce sont eux qui donnent le pouvoir? Sans hésiter, je réponds “non”. En d’autres mots, nous devons éviter le fétichisme de l’unité car rien n’est plus dangereux qu’une fausse unité. Par ailleurs, le plus important, ce n’est pas l’unité mais la vision. À quoi sert-il de cheminer avec un individu qui ne regarde pas ou ne regarde plus dans la même direction que vous? Une unité de façade ne rendrait pas service au FPI. L’unité entre Jésus et son Père n’était pas de façade; elle était réelle parce que tous les deux regardaient dans la même direction. Il est vrai que toute séparation fait mal mais, avec le temps, certaines ruptures s’avèrent salutaires.
Ceci dit, on ne doit pas désespérer des hommes. Avant 2020, il n’est pas impossible que les camarades accusés de s’être écartés de la ligne du parti reconnaissent leur faute et reviennent dans le droit chemin. Pourquoi ne pas y croire?

Commentaires

Yadou Maurice Gnagne

Merci mon père pour cet enseignement à notre peuple ! Il est une évidence que dans une lutte idéologique et politique, comme celle que mène cette génération du sacrifice, ce qui compte et qui demeure le préalable à tout succès c’est une homogénéité dans la vision et l’objectif principal à atteindre. C’est pour cela que le FPI est resté scotché à ses principes et à sa doctrine : “la lutte acharnée contre toute forme de domination intérieure et/ou extérieure.” C’est un élément fondamental de son Projet de Société, l’un des meilleurs qui puissent exister en Afrique au sud du Sahara, et apprécié par de grands intellectuels dans le monde, qui ont pris soin de le lire totalement. C’est ce Projet de Société, fondement de notre existence en tant que parti de gauche que certains agnostiques, ont voulu corrompre pour le mettre en adéquation avec leur aventure libérale, n’eut été la vigilance de ceux et celles qui sont restés fidèle au Président Gbagbo et à son combat. Qu’ils comprennent une bonne fois pour toute, parlant de ceux et celles qui courent vainement après leur destin arlésien, que nous ne sommes pas dans un jeu, nous sommes dans un combat historique qui exige de nous constance, cohérence et un amour profond de son engagement dans la lutte et une fidélité sans faille à ses convictions. Et tous ces attributs ne surgissent pas dans notre vie du fait d’une génération spontanée! C’est ceux et celles qui s’y sont préparés qui mènent et gagnent ce type de combat. Pas certainement des aventuriers perdus dans des calculs politiciens puérils et déshonorants. Qu’il en soit compris ainsi pour que ceux et celles qui nous bassinent les oreilles avec une pseudo-unité qui ne surviendra jamais pour des raisons évidentes qui tiennent de la vision et de l’idéologie, nous laissent continuer notre combat dans la dignité et le respect de nos principes. À de choisir leur voie, l’essentiel étant que ce jeux là participe de la rédemption de notre chère Patrie, la Côte d’Ivoire. Merci mon père et bonne fête de Pentecôte.

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Pierre-Godé

Pierre Godé

Mon cher Jean-Claude DJEREKE, il y a trop de contre-vérités dans ton papier. Tu n’as jamais été militant du FPI, tu ne connais ni Sangaré ni Affi, mais tu es prêt à juger Affi. L’unité du FPI se fera dans le respect des textes du Parti. Et Affi a déjà gagné cette bataille. Le débat sur l’unité relève désormais du passé. Ce n’est pas avec Sangaré que se fera l’alternance en Côte d’Ivoire. Sangaré est un homme du passé et dépassé. Avec AFFi nous sommes au stade de l’unité de la Côte d’Ivoire. Nous en ferons la démonstration dans les mois à venir. Je suis un peu surpris de ton esprit révolutionnaire. Mais si tu veux gagner en crédibilité prends de la hauteur. Sangaré se dit rancunier et l’assume. Je ne comprends pas comment l’ancien prêtre que tu es peux-tu prendre position pour un tel homme. la culture chrétienne que je partage avec toi repose sur l’amour du prochain. Même en politique tout chrétien ne doit pas le perdre de vue. J’ai accompagné Affi au congrès du Parti socialiste français, je ne peux accepter l’injure que tu nous fais. Mais la France insoumise de Mélenchon n’est qu’une insoumission conjoncturelle. Le Parti socialiste a au moins l’avantage d’avoir été un parti de gouvernement. Donc tu ne peux pas le comparer au parti de Mélenchon qui n’a jamais dirigé la France et qui n’est pas prêt de la diriger.

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Gino Katinan : Moi, je présenterais les choses de manière très simple:
1) Affi était le Chef du parti et propose au secrétariat général du parti, que le FPI intègre la CEI biaisée de Ouattara. Il est mis en minorité au sein du secrétariat général, mais malgré ça contre toute attente va nommer Alain Dogou siéger au sein de cette CEI pour le compte du FPI sous la bannière de sa coalition nommée AFD.
2) Comité Central du FPI du 13 septembre 2014 (voir photo): Affi surprend les participants avec un vote pour le maintien ou le retrait du FPI de la CEI pro-Ouattara. Là encore, il est mis en minorité pour la deuxième fois, mais refuse de s’exécuter. Et va accompagner Ouattara aux à la parodie électorale d’octobre 2015. Ceci est un cas d’indiscipline notoire!
Alors comment et pourquoi doit-on s’unir avec ou autour d’un individu qui en étant Chef de parti réfuse de se soumettre à la majorité de son parti?
Une telle attitude n’est pas du FPI, mais plutôt des partis constituants du RHDP.