Par Bamba Abdoul Karim†
Nous l’avons déjà signalé, la bourrasque militaire qui a emporté le régime ringard du PDCI-RDA et la transition qui s’en est suivie ont vite fait de se muer non seulement en révolution de palais mais aussi et surtout en une vaste escroquerie morale.
Quatre mois seulement ont suffi à Robert Gueï d’apprécier les délices du palais et d’évaluer le confort du gruman présidentiel. Depuis le « balayeur » de la maison ivoire s’est découvert ses allures d’homme d’État. Ses velléités présidentialistes sont d’autant plus marquées aujourd’hui qu’elles ont l’allure d’une guerre d’identité : « je suis en réalité un civil, la tenue militaire que je porte n’est qu’une tenue de circonstance. » Faut-il aller plus loin ? Que non, Robert Gueï est donc candidat à l’élection présidentielle. En lieu et place de « Général » qui colle trop au treillis qu’il arborait le 24 décembre dernier 1999, il conviendrait désormais de l’appeler M. Gueï Robert. Cela fait plus civil et beaucoup plus présidentiable. Dans sa main, il cumule à la fois la présidence de la République qu’il affectionne subitement, le ministère de sa Défense et bien entendu la présidence du Comité National du Salut Public (CNPS). En attendant que le PDCI offre au Général-Houphouetiste sa bannière pour le prochain scrutin.
Mais il n’y a pas que cela dans la besace de Robert Gueï : il a aussi fait appel à certaines créatures qui dopent ses illusions présidentialistes. Ainsi voit-on dans l’arène de ce qu’on appelle la transition une escouade de malabars affamés. Dans cette édition de L’Exilé Africain, nous nous sommes intéressés ainsi que vous le verrez dans les pages qui suivent à la Une de ces créatures au ventre creux et à la conscience enchaînée : Martial Ahipeaud Joseph.
Parti du Royaume-Uni après six (6) ans, ce jeune homme sautille aujourd’hui comme un criquet du sahel dans périmètres de la transition ivoirienne. Sur sa carte de visite, la lutte des Ivoiriens de la diaspora, au nom desquels il ne cesse de gémir. Ainsi à 6000 km du Royaume-Uni, Ahipeaud se fait passer pour le leader de cette communauté. Il parle comme si celle-ci l’avait dépêché auprès de la junte militaire. Il soutient en notre nom à tous la candidature de Robert Gueï. Évidemment, ceux des Ivoiriens à qui ce plaisantin parle ne le connaissent guère et ignorent totalement ce qui a été son parcours militant de 1994.
Lorsqu’il a quitté Londres le lundi 13 mars 2000 sur la pointe des pieds, nous nous sommes contentés de vous annoncer ce voyage dont nous avions les motivations. Nous avions alors promis de suivre les pas de Ahipeaud Martial.
En deux mois, nous l’avons donc observé et écouté. En deux mois, cet énergumène a beaucoup menti et abusé de nos parents. Ce constat est d’autant plus navrant, que même la Presse ivoirienne qui n’en sait pas d’avantage a déjà offert à Ahipeaud les moyens de son exhibition. Aussi face à son impudeur grandissante, L’Exilé Africain a-t-il décidé de prendre ses responsabilités en mettant un bémol à ce qui nous apparaît comme une escroquerie morale. Il s’agit pour nous de restituer aux Ivoiriens leur part d’intelligence afin qu’ils échappent désormais aux mailles de l’ignorance et de l’abus dont ils sont victimes. De dénoncer ensuite et avec dextérité l’impudeur de l’opportunisme ambiant de l’ancien Secrétaire de la FESCI. De dire finalement à Robert Gueï qu’il se trompe lourdement. Au-delà de notre modeste Rédaction, nous avons donné la parole aux Ivoiriens résidant au Royaume-Uni afin que le Général comprenne que le cheval qu’il a choisi n’est pas le bon.
Que Ahipeaud ait faim est une chose. Qu’il se gave des deux mains au nom d’une génération qui l’a vomi cinq ans durant relève d’une impudeur que L’Exilé Africain ne saurait tolérer. Ahipeaud est le premier à le savoir.
In L’Exilé Africain de mai 2000.