Dans un article publié sur son site internet le 01/02/2018 sous le titre de “Côte d’Ivoire: Les cinq freins à une éventuelle alliance PDCI-FPI“, IvoireDiaspo.net, un journal en ligne, a voulu, à sa manière, revenir sur la rencontre qui a eu lieu le mercredi 24 janvier, entre le président du FPI et son homologue du PDCI. Pascal Affi N’Guessan et Aimé Henri Konan Bédié se sont en effet parlé et aujourd’hui encore, les ivoiriens et tous les observateurs étrangers de la scène politique africaine continuent de s’interroger sur les véritables motivations de leur entretien en privé et la quintessence de leurs échanges.

Comme beaucoup de nos concitoyens, ce journal en ligne y voit les signes d’une volonté d’alliance, affichée surtout par le parti fondé par Laurent Gbagbo. Il cite ainsi Pascal Affi N’Guessan, l’actuel président de ce parti qui, faisant preuve de réalisme comme à son habitude, a déclaré : « En ce qui concerne une alliance avec le PDCI-RDA, c’est notre volonté, c’est notre aspiration, parce qu’en Côte D’Ivoire, le jeu politique se déroule autour de la question des alliances. Les deux partis qui se mettent ensemble sont assurés de gagner l’élection présidentielle ».

Mais IvoireDiaspo.net se met aussitôt à prêcher le scepticisme dans son article et d’emblée entrevoit des obstacles à l’éventualité. La jugeant prématurée et surtout incertaine, ce journal annonce que « pour l’instant, cinq raisons rendent (…) cette liaison hypothétique ». Il égrène alors les motifs de ses doutes et rappelle que le FPI et le PDCI ont toujours été des partis politiques opposés dans l’histoire de la Côte D’Ivoire, soulignant que Laurent Gbagbo a été « le premier opposant à se porter candidat, en 1990, face à Félix Houphouët-Boigny ». A cette “Opposition historique“ qui constituerait, selon ce journal, le premier des cinq freins entrevus pour avoir déjà empêché en 2000 la création du Front patriotique, s’ajoute un second frein qui serait une “Opposition idéologique“. Pour l’auteur, les deux partis étant d’idéologies différentes, toute alliance serait impossible.

Elle le resterait également, toujours selon l’auteur, pour cause d’un troisième frein qui serait d’ordre politique (certains au PDCI pourraient en rejeter l’idée, Bédié lui-même n’ayant encore rien dit). Le quatrième frein évoqué dans l’article serait d’ordre purement tactique (le RDR pouvant à son tour s’allier avec la dissidence du FPI, renforcer son alliance avec l’UDPCI et les partis de la mouvance présidentielle). Enfin, un cinquième frein serait quant à lui d’ordre stratégique (si les deux partis aspirent à gagner les élections présidentielles de 2020, le FPI, dans son ensemble, voudrait, selon l’auteur, que cela se fasse après la libération de Laurent Gbagbo, un sujet sur lequel le PDCI ne s’est toujours pas prononcé).

Les allégations sont tellement fallacieuses, les insinuations si flagrantes, les affirmations si puériles et si grotesques que nous ne pourrons pas, malgré nous, nous appesantir véritablement sur ce qui a été pensé et écrit. Nous nous contenterons plutôt de nous intéresser à ce qui a été omis, à ce que, volontairement ou involontairement l’auteur de l’article n’a pas jugé nécessaire d’aborder. Car si cinq raisons pourraient empêcher une alliance entre le FPI et le PDCI, cinq autres raisons pourraient par contre rendre celle-ci possible, imminente et même inéluctable. Nous allons donc nous employer à exposer ces dernières dans une analyse divisée en cinq parties qui seront publiées sur notre page Facebook avec trois jours d’intervalle.

1- L’histoire n’est pas statique mais dynamique

L’histoire des peuples n’a jamais été statique, elle a toujours été dynamique. Elle est constituée d’évènements et de faits qui se succèdent dans le temps et dans l’espace, qui se produisent ou se reproduisent sous une forme ou sous une autre, au gré des réalités, des intérêts et des priorités du moment, suivant les activités des hommes, des sociétés et des nations. Tout change donc dans l’histoire, les situations, les hommes, leurs désirs, leurs souhaits et leurs comportements. Considérer alors que le FPI et le PDCI étant deux partis historiquement antagoniques ne peuvent jamais s’allier est donc une aberration. Si deux grands pays comme la France et l’Allemagne, qui se sont livre une guerre ayant fait des millions de morts, sont aujourd’hui très liés et pilotent ensemble l’Europe de manière harmonieuse pour consolider l’union, pourquoi deux grands partis, comme le FPI et le PDCI qui ne sont que des rivaux politiques et non des ennemis, ne pourraient-ils pas s’entendre pour former une alliance en vue de délivrer et de reconstruire la Côte D’Ivoire?

Pourquoi le Japon qui hier a été horriblement meurtri par deux bombes nucléaires américaines est-il devenu aujourd’hui un grand ami des occidentaux? Chaque époque s’installe avec ses réalités qui ne sont jamais les réalités du passé. La création du Front patriotique en 2000 avait été une très bonne initiative de la part de Laurent Gbagbo et de Laurent Fologo, mais si ce fut un échec, c’est peut-être parce que très certainement, les circonstances n’étaient pas encore propices et les conditions réunies. Peut-être bien aussi que Laurent Dona Fologo n’avait pas toutes les cartes en main et n’était pas l’interlocuteur idéal. En tout état de cause et comme le dit l’auteur de l’article, « cette alliance a duré le temps d’une conférence de presse conjointe ». Cependant, elle aura eu le mérite de montrer qu’elle est envisageable et reste une voie à explorer. La vaillante action d’Affi va donc dans le sens de la continuité pour faire aboutir ce rapprochement. Quant au Front Républicain dont parle également l’auteur, c’est une voie qui restera morte tant que le RDR ne deviendra pas un parti normal, débarrassé de ses défauts, de ses tares et de ses vices.

À SUIVRE ………

Océane Yacé, politologue, Monte-Carlo, Monaco