Sous le titre interrogatif ‘’Coalition nationale pour le changement, quelle mission et quelle part pour les candidats déclarés à l’élection présidentielle pour que la transition s’instaure?’’, notre compatriote Claude Koudou, un des instigateurs, inspirateurs et théoriciens de la fronde qui mine le FPI, a publié sur son mur facebook le 27 août dernier vers minuit, un post (modifié) dans lequel il définit le rôle que selon lui chaque opposant ivoirien devrait jouer pour déclencher la révolte populaire et ouvrir la voie à la transition qu’il appelle de tous ses vœux. Claude Koudou qui s’auto-proclame analyste politique, apparaît cependant comme un bien piètre amateur dont la démarche est déjà faussée dès le départ. Un analyste politique est en réalité un professionnel de la politique qui se veut crédible. Il ne se laisse pas déborder par l’émotion et la subjectivité mais présente les faits, examine profondément les relations qui les lient les uns aux autres et mesure leur impact dans une situation politique donnée.
Une analyse politique digne de ce nom est une opération qui consiste à disséquer les éléments essentiels d’un problème politique sans les altérer, à se pencher objectivement sur les causes et les effets qui en découlent, à identifier les facteurs interactifs et à proposer des théories qui jettent un nouvel éclairage sur les rapports que ces éléments entretiennent les uns avec les autres. Claude Koudou aurait voulu que son analyse soit normative qu’il se serait tout simplement limité à nous présenter les différentes stratégies, à montrer leurs insuffisances avérées ou supposées pour ensuite fournir son opinion personnelle sur leurs concepteurs. Si au contraire son objectif était de nous présenter une analyse politique essentiellement explicative et non orientative qui viserait moins l’amélioration de ces stratégies politiques que la démystification de leur élaboration et de leur mise en œuvre, il aurait pu nous faire l’économie de toutes ses nombreuses digressions qui n’honorent point un individu qui prétend être un analyste politique.
L’analyse politique a pris son essor aux États-Unis après la Seconde Guerre mondiale, notamment sous l’influence de ce que l’on appelle « Orientation policy ». Il s’agissait d’analyses moins destinées aux décideurs qu’à tout citoyen soucieux de comprendre le fonctionnement du système politique. La gamme des éléments qui pouvaient figurer dans l’analyse était alors beaucoup plus large. Témoin privilégié du rôle qu’ont joué les Sciences Sociales dans la victoire des Alliés sur l’Allemagne Nazie, l’américain Harold Dwight Lasswell avait ainsi proposé d’orienter les efforts de leurs Spécialistes vers la recherche de solutions pour éliminer les obstacles à l’émancipation humaine, sociale et démocratique. Lasswell envisageait l’émergence de « Policy Sciences » réunissant des Experts de différents horizons disciplinaires, capables de saisir la complexité des contextes dans lesquels germent les problèmes modernes et de préconiser des solutions efficaces. L’idée de Sciences Sociales a ainsi et depuis lors rendu plus pragmatiques les analyses politiques en leur imposant la rigueur, l’exigence de la clarté et de l’objectivité qui caractérisent la Science ou les Sciences. C’est dire qu’une analyse politique est avant tout une analyse scientifique, par opposition à une analyse littéraire qui mêlerait l’irréel au réel, la fiction à la réalité, l’émotion à la raison.
Or que nous offre Claude Koudou tout au long de son texte? Un réquisitoire, des récriminations, des présomptions, des accusations, des insinuations, des propos haineux, un parti pris flagrant. C’est ainsi Pascal Affi N’Guessan, président et candidat du FPI qu’il prendra d’abord pour cible, le présentant comme ex-président du FPI et l’accusant, comme toujours, d’avoir un agenda caché. Quel serait donc cet agenda que cacherait Affi? Marcel Gossio, Alcide Djédjé, Augustin Koumoué, Voho Sahi, Alain Dogou, Eugène Allou, William Atteby, Barthélémy Gnepa, Jean Bonin, Okou Zago, Agnès Monnet, Christine Konan, Pierrette Doh et tous ces hauts cadres qui le suivent ignoreraient-ils donc un tel agenda ou auraient-ils chacun le sien? Claude Koudou vous répondra certainement qu’avec Affi ils veulent tous tourner la page de Gbagbo. Or ce grossier mensonge est aujourd’hui découvert par tout le monde. Le peuple ivoirien a compris que la seule possibilité de libérer Laurent Gbagbo est de reconquérir le pouvoir d’état pour en avoir les moyens institutionnels appropriés. Affi a opté pour le « Asseyons-nous et discutons » cher à Laurent Gbagbo afin de favoriser le retour à la normalité au plan socio-politique national et l’organisation d’élections apaisées. Aujourd’hui les résultats sont palpables : La paix se réinstalle progressivement, l’insécurité recule, les partis politiques reprennent leurs activités, l’espace audiovisuel s’ouvre enfin à l’opposition, les conditions d’une élection démocratique se mettent en place. Contrairement donc à Claude Koudou et aux frondeurs qui n’ont rien retenu des enseignements du fondateur du FPI et sont en train de tourner sa page en associant son nom aux violences et aux troubles à répétition, Affi est bien celui qui est dans la ligne tracée par Laurent Gbagbo et non celui qui veut tourner sa page.
Claude Koudou s’attaque ensuite à ses alliés de la CNC et s’insurge contre Charles Konan Banny, président de cette CNC qu’il juge incapable, trop molle et trop attentiste. L’insurrection pour provoquer l’apocalypse et obtenir la transition, tel est le rêve fou de Claude Koudou et de tous ces transitionnistes, politiciens de petit calibre, qui souhaitent un Marcoussis-Bis pour se faire une place sur l’échiquier politique national. Ouattara est pourtant isolé, affaibli et prenable aujourd’hui, pourquoi refuser de le chasser par les urnes et vouloir le faire par la violence?
Il n’y a aucune gloire à triompher dans le sang quand la possibilité existe de triompher dans la paix. L’objectif d’un parti politique est de participer aux élections, de les gagner pour appliquer son programme de gouvernement et réaliser son projet de société, non de se retrouver sur la liste rouge des organisations terroristes. Bien à l’abri à l’extérieur avec femme(s) et enfants, ils prennent chaque jour un malin plaisir à manipuler les esprits et les consciences populaires en Côte d’Ivoire pour installer la chienlit, mais quel est à ce jour le bilan des troubles que, cachés dans l’ombre, Claude Koudou et certains idéologues fanatiques ont suscités et encouragés? Des dégâts matériels considérables, des morts, des blessés et des prisonniers.
N’ayant tiré aucune leçon de l’échec de leurs tentatives antérieures, ces extrémistes de tous bords appellent en ce moment les ivoiriens à une marche le lundi 28 septembre prochain sur la RTI et la CEI pour, annoncent-ils, exiger des élections transparentes en Côte d’Ivoire. Très certainement donc d’autres arrestations à l’horizon, d’autres blessés et peut-être même d’autres morts parmi les marcheurs. Ceux-ci restent cependant de simples co-auteurs, car les vrais auteurs, Claude Koudou et consorts, continuent comme toujours de préparer d’autres troubles. Les anges ou démons de l’Apocalypse devront assumer leurs responsabilités quand aura lieu le catalysme.
Océane Yacé, Politologue, Monaco.