En Allemagne, jusqu’à ce jour, on continue de poursuivre et jeter en prison ceux qui ont servi sous le régime nazi, malgré leurs âges très avancés.
Au Burkina Faso, les nouvelles autorités ont décidé de ne pas permettre à ceux qui avaient soutenu Blaise Compaoré dans sa volonté de changer la constitution de participer aux prochaines élections en tant que candidats. Le moins que l’on puisse dire est que cette décision est diversement appréciée. L’on reproche à ces personnes d’avoir soutenu l’illégalité, d’avoir voulu permettre à Blaise Compaoré de perpétuer indéfiniment son pouvoir. Il faut, dit-on, pour cela les exclure du jeu politique pendant au moins cinq ans. L’ancien président du Burkina Faso a sans doute beaucoup de choses à se reprocher, mais son régime était tout de même très loin de ceux que nous avons cités plus haut, et on ne peut nier qu’il a dans une large mesure fait avancer son pays. Vouloir changer sa constitution pour se maintenir au pouvoir n’est certainement pas bien. Mais c’est tout de même autre chose que massacrer son peuple ou le conduire à la guerre. N’aurait-il pas été plus simple de laisser les Burkinabè sanctionner démocratiquement ceux qui avaient cautionné sa volonté de se maintenir au pouvoir, si tant est qu’ils avaient à être sanctionnés ? Aurait-on peur de voir les partisans de l’ancien président revenir au pouvoir par les urnes après avoir en été chassés par la rue ? Espérons que cette décision ne soit pas source de troubles futurs pour ce pays frère. Car, nous en avons l’expérience ici en Côte d’Ivoire, c’est l’exclusion de certaines catégories de personnes qui amène les problèmes dans un pays.
En Côte d’Ivoire, personne n’a été exclu. Et pourtant, il y aurait eu de bonnes raisons de le faire. En 2010, à l’issue de l’élection présidentielle, le clan Gbagbo a refusé de reconnaître sa défaite et toutes les médiations entreprises par le monde entier n’y ont rien pu. Gbagbo et les siens ont persisté dans leur position, jusqu’à ce qu’une guerre éclate dans le pays, causant la mort d’au moins 3000 personnes, sans parler des blessés. Aujourd’hui la plupart des personnes qui ont soutenu Gbagbo dans sa volonté de perpétuer son pouvoir, en dépit du verdict des urnes et en marchant sur les corps des Ivoiriens, sont là, dans le pays, et en liberté. Ailleurs, à défaut de les mettre en prison, on les aurait tout simplement empêchées de parler et de se mêler des affaires du pays. Elles continuent cependant de soutenir publiquement, dans des journaux et dans des meetings que c’est leur champion qui avait gagné l’élection, et que par conséquent, le pouvoir actuel est illégitime, et elles, sont les vraies victimes. Durant les deux premières années du règne de M. Ouattara, certains d’entre ces partisans de Gbagbo ont même tenté des coups de force contre lui. Aujourd’hui, les plus extrémistes d’entre eux se sont volontairement exclus du jeu politique. Mais non contents de cela, ils cherchent par tous les moyens à le perturber, afin de plonger à nouveau le pays dans une crise. Ils avaient commencé par boycotter le recensement général de la population qui n’avait rien de politique. Maintenant c’est l’élection présidentielle qu’ils ont décidé de boycotter aussi. Dans l’espoir que par leurs manœuvres, ils parviendront à ce qu’une transition politique s’installe, seul moyen pour eux et certains « irréductibles » du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) qui les ont rejoints, de revenir dans le jeu politique, parce qu’ils savent très bien que les urnes seront cruelles pour eux. Alors, on sème des rumeurs, on publie des faux rapports, on distille la peur, on monte en épingle le moindre incident et on annonce dans des journaux des « choses qui se préparent contre le pays ». Un vieux cheval de retour a même déclaré récemment ceci : « les élections ne peuvent pas et ne doivent pas avoir lieu sans qu’on ne s’asseye pour discuter. Maintenant, si on veut nous imposer les armes, ça aussi, on n’est pas surpris, mais on est préparé pour ça. » Les Ivoiriens doivent être très vigilants jusqu’au scrutin et ne pas tomber dans le piège de la psychose que l’on essaie d’installer. Ces extrémistes tenteront tout, jusqu’à la dernière minute, pour perturber le jeu électoral, parce qu’ils savent qu’ils seront définitivement exclus de la scène politique après la prochaine élection. Qui les suivra encore pendant cinq autres années ? Pendant tout le mandat du président de la République, certains ont entretenu chez les plus naïfs d’entre eux le faux espoir d’un retour imminent de Laurent Gbagbo. Mais même les plus naïfs finissent par devenir lucides à un moment donné. Surtout lorsque rien de tout ce que l’on annonce ne se réalise.
Venance Konan
Source : Facebook