«Je sais où va mon candidat»

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Essy Amara, ex-ministre d’Etat au candidat à la présidentielle 2015

Le député Kramo Kouassi, porte-parole d’Essy Amara, nous a reçus, vendredi 12 juin, dans l’imposante bâtisse tenant lieu de Quartier général de campagne de son candidat, à Cocody-les 2 plateaux. Un tantinet agacé, il a ré- pondu aux rumeurs sur un soutien présumé de l’ex-ministre d’Etat au candidat unique du Rhdp Alassane Ouattara. M. Kramo assure que son candidat ira jusqu’au bout. 

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L’Honorable Député Kramo Kouassi, porte-parole d’Essy Amara

Je précise que nous ne sommes pas encore en campagne. La période actuelle qui est la pré-campagne est, de notre point de vue, très importante. Les choses doivent se faire de façon sérieuse et profonde. Quand j’entends des commentaires de ce type, je réalise que les gens sont très attachés au folklore. Parce qu’ils n’entendent pas de bruit, ne voient pas de manifestation, ils se posent des questions. Eh bien ! La pré- campagne d’Essy Amara se passe très bien. Je viens tout à l’heure de parler avec des personnes qui sont en réunion à l’Ouest du pays. Moi-même, je me rends demain (samedi 13 juin, ndlr) à Adiaké. Je serai à Aboisso, à Tiapoum. Pendant ce temps, d’autres responsables de la campagne d’Essy Amara seront dans d’autres contrées de la Côte d’Ivoire pour rencontrer les populations. Donc, ça se passe très bien.

Il était annoncé une cérémonie d’investiture de votre candidat à Yamoussoukro. Pourquoi cette cérémonie n’a pas eu lieu ?

Elle avait été annoncée puis reportée en raison de quelques contraintes.

Des contraintes de quel ordre ?

Le ministre d’État Essy Amara, qui devait être investi, était absent de la Côte d’Ivoire. Il est rentré de l’extérieur, seulement le 7 juin. Tout de suite après, il a dû repartir. En ce moment, il est à Durban au sommet des chefs d’État de l’Union africaine (Ua). Vous savez qu’il a été le secrétaire général de l’Oua (Organisation de l’unité africaine) qui a conduit la mutation de l’Oua en Ua. Donc, il a été invité ès-qualité à ce sommet. C’est très important. C’est aussi l’occasion de rencontrer de nombreuses personnes.

A quand donc l’investiture de M. Essy ?

Quand il arrivera, nous verrons un certain nombre d’éléments avant d’y aller. La cérémonie d’investiture est importante, mais ce n’est pas cela qui fait la campagne. C’est une grande fête qui va s’organiser.

Quel est l’état des lieux de vos bases et combien de partisans revendiquez-vous ?

Ça ne peut pas se quantifier de cette façon. Nous avons des comités de soutien qui sont installés partout en Côte d’Ivoire. Nous avons des coordinations spécialisées qui se sont créées. Cela ne peut pas s’exprimer en termes de nombre de personnes dans notre fichier.

Confirmez-vous que votre équipe de campagne est traversée par des dissensions notamment entre un bloc pro-Ouattara et un bloc pro-Coalition nationale pour le changement (Cnc) ?

Cela n’a aucun sens. Un camp pro-Ouattara et un camp pro-Cnc, cela ne veut rien dire. Je n’ai rien à dire sur le sujet. Essy Amara est candidat aux élections présidentielles. Je l’ai dit, je le redis. Le profil d’Essy Amara est ce qu’il peut arriver de mieux à la Côte d’Ivoire en cette année 2015 eu égard aux enjeux qui se pré- sentent, à savoir la réconciliation des filles et des fils du pays. C’est pour la reconstitution du tissu social et la réconciliation qu’Essy Amara se bat. Cela ne saurait accepter de distraction.

De nombreuses personnes suspectent, pourtant, M. Essy, de rouler pour le candidat Alassane Ouattara. Il cacherait son jeu. Que répondez-vous ?

Je viens de tout vous dire.

Vous démentez ?

Je ne déments même pas. Parce que le faire signifierait que j’accorde quelque importance à une telle interrogation. Qu’est-ce qu’Essy Amara aurait à manifester un jeu pour cacher un soutien à Alassane Ouattara ? Si Essy Amara pense qu’il faut qu’il soutienne Alassane Ouattara, il le ferait comme les autres l’ont fait. Il dit qu’Alassane Ouattara avait promis de réconcilier les Ivoiriens. Il a échoué dans ce projet. Et tout le monde voit bien qu’il a échoué à réconcilier les Ivoiriens. Il ne peut pas. Je l’ai dit souventes fois. Quand on a été partie au conflit, lorsqu’on est au nombre des protagonistes, on ne peut pas prétendre réconcilier. Ce n’est pas possible. Il faut une tierce personne. Essy Amara en a le profil.

Est-ce que le fait pour Essy Amara d’avoir refusé de signer la Charte de la Cnc n’a pas contribué à alimenter son présumé soutien à Alassane Ouattara ?

C’est quoi la Charte de la Cnc ? Est-ce le repère de la lutte pour la réconciliation des Ivoiriens ? Ce que je viens de dire. L’enjeu qui se présente à la Côte d’Ivoire est de réconcilier le peuple, en finir avec ce qui a fait l’objet de la crise que la Côte d’Ivoire a traversée. Est-ce que la Cnc en est le gage ?

Il semble que cette Charte comporte un volet dédié à la réconciliation nationale…

Bien sûr qu’il y a un volet ré- conciliation. Mais quand vous me dites que le fait de n’avoir pas ratifié la charte alimente les suspicions. Il faut poser la question à ceux qui alimentent cette opinion. Mais je pense que si cette opinion existe, elle provient peut-être de ceux qui ont peur de la candidature d’Essy Amara. Un journaliste qui m’a appelé, il y a quelques jours, me disait être le témoin d’une discussion où les protagonistes soutenaient que le porte-parole d’Essy Amara l’avait quitté et aurait déposé ses valises dans le camp Ouattara. J’ai ri et j’ai répondu : « Je veux que vous le teniez pour dit. S’il arrivait par extraordinaire que Essy Amara lui-même disait qu’il n’était plus candidat, moi-même, je serai candidat à sa place ». C’était pour rire. Mais surtout pour relever qu’on colporte ces informations parce qu’on pense que cela va aider à décourager ceux qui sont aujourd’hui hyper motivés à porter Essy Amara à la tête de la Côte d’Ivoire, à donner une réelle chance à la réconciliation en Côte d’Ivoire. Les Ivoiriens ne se trompent pas. Ils sont en train de travailler pour qu’au sortir des élections, Essy Amara soit élu président de la République pour la reconstitution du tissu social.

A qui faites-vous allusion en parlant de gens qui ont peur de la candidature d’Essy Amara ?

Je fais allusion à ceux qui colportent un certain type d’informations, ceux qui disent qu’Essy Amara roule pour Ouattara.

Pourquoi vous n’avez pas signé la charte de la Cnc ?

Je ne commente plus. On a assez répondu. Essy Amara lui-même a répondu plusieurs fois à cette question.

Allez-vous signer cette charte ?

Je ne réponds plus à cette question.

Vous ne la signerez pas ?

Je ne sais pas. Ce n’est pas moi qui signe la charte.

Ce n’est pas votre priorité…

Ecoutez, notre priorité, c’est l’élection présidentielle, la réconciliation des Ivoiriens, l’organisation d’élections justes, crédibles et transparentes. Notre priorité, c’est faire comprendre aux Ivoiriens que 2015 est une bonne occasion qu’ils ont de tourner effectivement la page des dures années de crise que le pays a traversées en boutant hors des structures du pouvoir ceux qui ont notoirement participé à nous plonger dans ces années difficiles.

Continuez-vous d’appartenir à la Cnc ?

Si on n’a pas ratifié la charte. Donc, on n’en fait pas partie pour l’instant.

Quelle explication donnez-vous à cette tournée diplomatique entreprise par M. Essy ? Que recherche-t-il ?

La Côte d’Ivoire est un pays indépendant. Mais, les événements que nous avons connus ces dernières années ont bien montré qu’à l’instar de tous les autres pays, la politique intérieure dépend aussi de l’extérieur. Essy Amara renforce son réseau extérieur parce que nous avons tous compris que c’est important pour l’action à l’intérieur de la Côte d’Ivoire. Essy Amara prend beaucoup de contacts. Dieu merci, sa carrière le prédispose à cela. Il a énormément renforcé son réseau.

Il est allé rencontrer l’ancien président Laurent Gbagbo à La Haye. Que cherchait-il ? Un soutien à sa candidature ?

Essy Amara est très proche de Laurent Gbagbo. Il l’a dit. Quand Gbagbo a été envoyé en prison à Korhogo, il est allé lui rendre visite. Quand Gbagbo a été à la Maca, il était encore allé lui rendre visite. Donc, Laurent Gbagbo à La Haye, Essy Amara allant lui rendre visite, cela s’inscrit dans l’ordre normal des choses. Il ne l’avait pas fait plus tôt parce qu’il avait lui-même quelques soucis de santé. Quand il a pu le faire, il l’a fait. J’avais déjà indiqué qu’Essy Amara, s’il devait rendre visite à Gbagbo, il le ferait. Mais, le faisant, il ne serait pas dans une dé- marche circonstancielle. Parce que ses rapports avec Laurent Gbagbo ont été de tout temps très étroits et très suivis. On ne peut pas le suspecter de visites intéressées.

Mais sa visite à La Haye s’inscrit tout de même dans un contexte pré-électoral avec Essy Amara comme candidat. Il espère certainement avoir le soutien des partisans de M. Gbagbo ?

Laurent Gbagbo est son frère. Je pense que si Gbagbo devait soutenir Essy Amara, il n’attendrait qu’Essy lui rende visite à La Haye avant de se faire cette idée. Lorsqu’Essy Amara a été élu secrétaire général de l’Oua et que Laurent Gbagbo est rentré d’Addis Abeba avec lui, je ne sais pas si vous vous souvenez du discours du président Gbagbo. Je ne sais pas si vous vous souvenez des éloges à l’endroit d’Essy Amara. Essy Amara souhaite devenir président de la République afin de réconcilier les Ivoiriens, je pense que Laurent Gbagbo lui-même, doit s’en faire sa petite idée.

Vous confirmez que le candidat Essy Amara restera dans la course quoiqu’il advienne ?

Il a reçu ses présidents de comités de pilotage régionaux de sa campagne avant d’aller en Afrique du Sud. C’était la veille de son départ. A cette occasion, il a dit : « J’irai jusqu’au bout de cette élection. Je la gagnerai pour la réconciliation des Ivoiriens ». Essy Amara, vous le connaissez. Il n’est pas exubérant. C’est un monsieur sans histoires. Il ne va pas s’engager dans une action qu’il ne conduira pas jusqu’au bout. L’ayant pratiqué pendant un certain temps, je puis vous dire : je sais où il va.

Par Kisselminan COULIBALY

Source : L’Inter N°5102 du Lundi 15 Juin 2015